Ces derniers mois, les dominos tombent les uns après les autres : presque tous les scrutins tenus dans le monde occidental et l’espace postsoviétique donnent le résultat voulu par le Kremlin. Référendum néerlandais sur l’accord d’association avec l’Ukraine, Brexit, élection de Trump, victoire du parti du Centre prorusse en Estonie, élection du prorusse Dodon en Moldavie, du prorusse Rumen Radev en Bulgarie, victoire de Fillon au premier tour de la primaire de la droite : la liste s’allonge quotidiennement.
La patiente stratégie de prise de contrôle des élites et des opinions étrangères par le Kremlin, lancée depuis l’arrivée aux commandes en 2000 de l’équipe du KGB autour de Poutine, commence à porter ses fruits.
Les méthodes sont simples et calquées sur celles qui ont fait leurs preuves en Russie pour obtenir la mise au pas du pays : compilation de dossiers compromettants sur les personnalités qui comptent, corruption, chantage, promesses d’avancement voire de propulsion au pouvoir, contrôle des médias (par les mêmes procédés), contrôle des thèmes de propagande.
Les méthodes de mise sous influence de l’opinion ont été affinées à partir de 2014 avec une utilisation massive des réseaux sociaux, et là encore l’application des techniques éprouvées qui permettent au régime poutinien de manipuler l’opinion russe : excitation constante des émotions, à commencer par la haine et la peur ; bombardement radioactif de faits divers, souvent falsifiés ; développement de ce qu’on peut appeler une « conscience apocalyptique » autour du mythe de la « fin de l’Occident », qui conditionne les populations à consentir à l’abandon des libertés et leur fait souhaiter l’avènement d’une forte poigne. Tout cela débranche l’esprit critique et engendre l’indifférence à la vérité.
La dangerosité de la Russie, absente du débat électoral
La France est travaillée en profondeur par la propagande du Kremlin depuis des années. Au point que le danger que représente la Russie est totalement absent du débat électoral. Surtout pas de retour à la guerre froide, nous dit la Russie, nous faisant oublier que la guerre froide a commencé quand les Occidentaux ont cessé de céder à Staline et que nous lui devons notre liberté.
Le pouvoir de Poutine a considérablement appauvri la majorité des Russes, forcé des millions d’entre eux à choisir l’exil, imposé au reste une propagande abrutissante charriant la haine et le mensonge
Or qu’avons-nous aujourd’hui ? Une Europe désarmée, divisée et démoralisée. Une Amérique tentée par l’égoïsme national et l’isolationnisme. En face, l’Etat russe, tout entier adonné à un projet de puissance, qui consacre l’essentiel de son budget à l’armée et aux services spéciaux, qui teste quotidiennement les défenses des pays de l’Alliance Atlantique (OTAN), qui entretient chez lui une psychose de guerre chronique, qui, à l’étranger, a déployé un prodigieux réseau d’agents, bien supérieur en nombre à celui existant pendant la guerre froide.
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