Mes chères contrariées, mes chers contrariens !
Florange
mécanique ne sera pas nationalisée
Normalement, vous n’avez pas pu passer à
côté d’une telle information. L’usine de Florange
n’a pas été nationalisée (encore) par les
commissaires politiques au redressement productif de notre pays.
Recul pour les uns, « sagesse » pour les autres
et respect de la propriété privée, ou encore
escroquerie. On entend à peu près tous les sons de cloche au
sujet de l’affaire Mittal.
Alors qu’en penser. Pour une fois, moi qui ai un avis sur tout,
je n’en ai pas vraiment.
Évidemment, depuis le rachat par Mittal
d’Arcelor, nous perdons des usines, des emplois, du savoir-faire et de
l’indépendance.
Le
redressement productif devrait être pensé en termes
d’indépendance de notre nation
Pour tout vous dire, et que nos amis métallos ne le prennent
pas mal, je n’en ai pas grand-chose à faire de l’usine de
Florange. Non, en fait, ce n’est pas tout à fait exact.
Disons que ce que je souhaiterais savoir c’est est-ce que
maintenir une activité autour de l’acier est stratégique
pour notre pays ?
Voilà à mon sens la seule bonne question que l’on
devrait se poser dans toute cette affaire. À partir de là, en
fonction de la réponse, la solution découlera logiquement.
Pourquoi ce commentaire ? Parce que je viens d’achever la
lecture du dernier numéro de L’Expansion
(celui du mois de novembre) qui consacre un dossier spécial à
« l’indépendance de la France ».
Et là je suis sidéré par ce que j’y ai vu
et appris, quand bien même il y aurait quelques approximations ou
exagérations.
Nous ne produisons plus l’essentiel de nos médicaments
qui viennent de Chine mais restent payés par la sécurité
sociale à des prix… tout français, les laboratoires
pharmaceutiques ayant délocalisé s’embourbant la
différence de marge.
D’ailleurs, les laboratoires n’ont pas vraiment
délocalisé. Non, ils sous-traitent à des
sociétés chinoises. Certaines respectent les normes.
D’autres pas du tout. Alors de temps en temps, il faut retirer quelques
lots du marché car ils sont défectueux. Mais ce n’est pas
grave, c’est juste de la santé des gens dont on parle.
Peut-être qu’avoir des usines chez nous, sur notre sol
fabricant nos médicaments est stratégique pour notre pays.
Alors on peut parler de redressement productif.
Vous pouvez, grâce à L’Expansion,
multiplier les exemples presque à l’infini.
Un autre exemple très « rigolo » pour
illustrer l’état de décrépitude avancé de
notre pays, c’est la gronde qui a touché nos militaires en
opérations extérieures. Ils ont osé se plaindre
d’incidents de tirs à répétitions. En clair, quand
ils appuient sur la gâchette sous le feu ennemi… les balles ne
marchent pas.
Il faut dire que nos armées ont eu la bonne et excellente
idée de délocaliser la fabrication de nos munitions notamment
au Qatar, qui est l’un de nos grands alliés… mais dont les
munitions ne sont pas de très bonne qualité semble-t-il.
Peut-être que là aussi nous pourrions parler de
redressement productif pour notre pays.
Il faut
avoir une vision !
Le général de Gaulle qui parlait de ceux qui parlaient
de l’Europe en sautant comme des cabris aurait pu faire la même
chose en parlant de ceux qui parlent du redressement productif.
Je trouve l’idée du « redressement
productif » excellente. Mais en elle-même elle n’a
aucun intérêt.
D’où l’indispensable vision qui doit accompagner
une idée de ce type, qui pourrait justement être celle de
l’indépendance de notre pays et la reprise en main de secteurs
stratégiques pour le bien commun.
Oui, nous devons produire nos munitions.
Oui, nous devons produire nos médicaments.
Oui, nous devons produire notre armement et sans doute avec en plus
une vision européenne, mais pour le moment ce n’est pas
gagné.
Oui, nous devons être énergétiquement
indépendants.
Oui, nous devons être capables d’alimenter nos têtes
de bétails sans devoir importer 80 % des quantités du
Brésil sous forme de soja OGM…
Oui, nous devons redonner à notre pays un élan
économique.
Oui, l’État a son rôle de chef d’orchestre
à jouer en impulsant une grande politique industrielle.
Oui, une entreprise peut voir la majorité de son capital
détenue par l’État français, sans pour autant que
les salariés deviennent des fonctionnaires, et encore moins
qu’ils aient la sécurité de l’emploi.
Alors oui, nous devons parler de l’idée de redressement
productif et d’indépendance de notre pays, comme savent le faire
aussi bien nos amis chinois qu’américains.
Peut-être alors, si nous avons une vision précise de ce
qu’il doit être, nous pourrons concrétiser ensemble un
véritable redressement qui, au-delà d’être
productif, sera celui de la France.
Charles
SANNAT
Directeur des Études Économiques Aucoffre.com
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