Si vous
cherchez un bon livre à offrir à Noël, je vous en
recommande un tout particulièrement. Alors que des milliers et des
milliers de pages ont été publiées sur
l’extermination des Juifs, la composante socialiste du nazisme a fait
l’objet de peu d’attention. Le livre de Benoît Malbranque, Le socialisme en Chemise Brune, vient
combler utilement cette lacune.
Saviez-vous
que les Nazis ont institué un système d’État-providence
que de nombreux historiens ont comparé au Welfare State inspiré par William
Beveridge ? Dans Mein Kampf, Hitler a longuement
salué la nécessité d’un mouvement syndical
puissant et influent pour en finir avec l’exploitation capitaliste. Il
créa ainsi un syndicat géant, le Front du travail, en 1933.
Écrit comme
une enquête policière, dans un langage clair et agréable,
ce livre s’attache à détruire un par un les mythes
populaires qui ont trop longtemps collé aux chaussures de
l’historiographie du nazisme.
Ainsi,
l’aversion d’Hitler et des Nazis pour les communistes, les
marxistes et les bolcheviks est fréquemment utilisée par les
historiens pour contrer la thèse qui fait l’objet de ce livre,
à savoir que le national-socialisme était un mouvement
socialiste.
Comme l’a montré Ludwig von
Mises, l’apport original du nazisme ne se situe pas sur le plan
idéologique, mais sur celui de l’exécution : « Les
principes fondamentaux de l'idéologie nazie ne diffèrent
pas des idéologies sociales et économiques
généralement acceptées. La différence
concerne seulement l'application de ces idéologies
aux problèmes spéciaux de l'Allemagne. » Et dès 1933, F. A. Hayek
écrivait : « la persécution des marxistes et des
démocrates en général, tend à occulter le fait
fondamental que le National-Socialisme est un véritable mouvement
socialiste, dont les idées principales sont le fruit des tendances
antilibérales qui ont progressivement gagné du terrain en
Allemagne depuis la fin de l’époque bismarckienne. »
Telles sont les
idées fondamentales qui ont guidé Benoît Malbranque dans la rédaction de ce volume,
commencé il y a plusieurs années, alors qu’il suivait ses
cours d’histoire au lycée. S’appuyant
sur des travaux d’historiens anglo-saxons contemporains comme Adam Tooze (The Wages of Destruction), il montre que ce que rejette
Hitler dans le communisme, ce n’est pas son socialisme, c’est son
origine juive et sa tendance internationaliste. Et c’est pour les
mêmes raisons qu’Hitler condamne le capitalisme.
Le
capitalisme libéral, mondialisé, financiarisé,
était pour lui le mal absolu. Or les Juifs en étaient à
la fois les créateurs et les maîtres absolus. Le capitalisme,
pensait Hitler, était un système essentiellement Juif. De
même, le bolchevisme était considéré par les nazis
comme une création essentiellement juive. Bien qu’ayant
largement versé dans l’antisémitisme, Karl Marx
était lui-même d’origine juive, et même le
descendant d’une longue lignée de rabbins.
C’est
pourquoi, écrit Benoît Malbranque,
« la source des divergences entre nazisme et communisme
n’est pas à trouver dans la doctrine socialiste mais dans ce qui
l’entoure, et notamment l’esprit nationaliste. Le communisme,
selon Hitler et selon les Nazis, n’était pas antilibéral
jusqu’au bout ». Comme l’a bien fait remarquer Hayek,
les nazis « ne s’opposaient pas aux éléments
socialistes du marxisme, mais à ses éléments
libéraux, à l’internationalisme et à la
démocratie. »
Si donc Hitler
a dénoncé le marxisme comme un « faux » socialisme
d’origine juive, ce fut pour mieux construire une économie
socialiste dans laquelle chacun agirait pour le bien-être de la
collectivité. C’est ainsi que de la législation sociale
à la fiscalité, de la politique environnementale à la
réglementation des entreprises, il fut un architecte de peuple et un
dessinateur de nation. Il voulut façonner non seulement
l’économie allemande mais aussi chaque sphère de la vie
individuelle, partant du principe que l’individu n’est
qu’un agent de l’État et qu’il doit se mettre au
service du bien commun, c’est-à-dire du bien de
l’État.
Tout comme le
système économique allemand, la vie sociale des Allemands fut
également collectivisée. L’État prit à sa
charge les activités sportives, les manifestations culturelles et tout
le temps de loisir. Il y eu plus d’État dans la culture, le
gouvernement se chargeant de subventionner grassement les manifestations
culturelles « dignes » de l’Allemagne et de proscrire les
autres.
Le ministère
de l’Éducation du Reich se chargea d’édicter les
programmes et les manuels furent réécrits. Anciennement assurée
par les écoles confessionnelles, l’éducation des jeunes
Allemands fut désormais une mission d’État. Les
professeurs devinrent des fonctionnaires du gouvernement. Or tout cela, cet
État si large, disposant de pouvoirs si grands, si étendus,
n’était-ce pas là le grand rêve des socialistes ?
Une autre
objection est souvent entendue : les socialistes n’ont jamais
parlé de la « race » et le racisme est contraire au
socialisme. Mais comme l’explique bien Benoît Malbranque,
le racisme lui-même est une idée collectiviste : il ne peut
s’établir que dans un esprit qui considère que chacun
appartient à un groupe particulier. Pour reprendre les mots du représentant
au Congrès américain Ron Paul, « le racisme n’est
qu’une affreuse forme de collectivisme, une façon de
considérer les hommes comme faisant partie de groupes plutôt que
comme étant des individus. Les racistes considèrent que tous
les individus qui partagent des caractéristiques physiques
superficielles sont pareils : étant collectivistes, les racistes ne
pensent qu’en termes de groupes ».
Table des
matières ici
A
lire aussi : l’interview de l’auteur sur Contrepoints
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