La consanguinité – stricto sensu,
résultat de la reproduction entre deux individus ayant un ou plusieurs
ancêtres communs – a généralement des effets néfastes, comme l’augmentation
du risque de maladies génétiques ou la survenue de certains syndromes (par
exemple le Syndrome
de Bardet-Biedl).
Les conséquences des mariages
consanguins sont connues depuis longtemps, mais une étude
– publiée dans la revue The Lancet en juillet 2013 – en fait une évaluation
précise. Les chercheurs ont ainsi montré que l’union entre cousins germains
multiplie par deux le risque de malformation des enfants.
L’étude s’est concentrée, entre 2007 et
2010, sur les nouveau-nés de la ville anglaise de Bradford. Cette dernière a
la particularité d’abriter une forte communauté pakistanaise dans laquelle la
proportion de mariages consanguins est très élevée. Sur les 11 300 enfants
nés à Bradford durant cette période, 386 avaient des anomalies congénitales.
Les enfants d’origine pakistanaise étaient plus atteints que les autres. Plus
précisément, les enfants dont les parents pakistanais étaient cousins avaient
deux fois plus de risque que les autres de souffrir de telles anomalies. En
revanche, les bébés dont les parents pakistanais n’étaient pas apparentés
présentaient la même proportion d’anomalies congénitales que les autres
enfants nés à Bradford.
Précisons tout de même que les risques
restent faibles : quand les géniteurs ne sont pas apparentés, la probabilité
d’avoir un enfant atteint d’anomalies congénitales est de 3 %. Le risque
passe à 6 % quand les parents sont cousins, selon l’étude de The Lancet.
L’Histoire de France offre un exemple
assez frappant de consanguinité : celle de Louis XIV et de Marie-Thérèse
d’Autriche. Le couple a eu six enfants, dont cinq sont décédés en bas âge.
Louis XIV a, par ailleurs, eu dix enfants adultérins reconnus, dont six
atteignirent l’âge adulte. Une proportion beaucoup plus grande que pour ses
enfants légitimes. Certes, personne aujourd’hui ne peut se prononcer sur les
causes précises du décès des enfants légitimes, mais beaucoup d’historiens
pensent que le risque génétique lié à la consanguinité est probable.
En effet, les époux royaux étaient
doubles cousins germains : le père de Louis XIV (Louis XIII) était le frère
de la mère (Élisabeth de France) de Marie-Thérèse. La mère de Louis XIV (Anne
d’Autriche) était la sœur du père (Philippe IV) de Marie-Thérèse. Bref, si
vous avez suivi, Louis XIV et son épouse avaient les mêmes quatre
grands-parents.
Dans le règne animal, nous avons un
exemple de consanguinité ravageuse chez le tigre blanc. Le tigre blanc n’est
pas à confondre avec le tigre de Sibérie. Il s’agit d’un tigre du Bengale
victime d’une mutation génétique – le leucisme – qui lui donne sa couleur
blanche. Il peut se reproduire avec ses congénères et perd alors son pelage
blanc, la mutation étant récessive (c’est-à-dire que le tigre blanc doit
s’accoupler avec une femelle blanche elle aussi pour que les petits tigres
soient blancs à leur tour). Le tigre blanc apparaît donc de manière
accidentelle dans la nature et disparaît aussi rapidement qu’il est apparu.
En 1951, le maharajah de Rewa captura
un tigre blanc qu’il appela Mohan. Il voulut alors avoir d’autres tigres
blancs. Pour cela, Mohan fût accouplé à sa propre fille qui donna naissance à
des tigreaux blancs. Ceux-ci furent accouplés les uns aux autres afin de
faire perdurer la lignée. Aujourd’hui, tous les tigres blancs sont des
descendants de Mohan.
Cette consanguinité fragilise un peu
plus chaque génération. Certains experts estiment que 80 % des petits tigres
blancs meurent à la naissance, et que les 20 % qui survivent ont des
anomalies (strabisme, déficience immunitaire, scoliose, malformations,
troubles du comportement).
Passons maintenant à la consanguinité
dans le monde politique où elle fait également des ravages. Nous connaissons
tous le couple que formèrent longtemps François Hollande et Ségolène Royal.
Rappelons qu’ils se sont connus à l’Éna et qu’ils ont travaillé en même temps
comme conseillers de François Mitterrand à l’Élysée. Aujourd’hui l’une est le
ministre de l’autre.
Nous avons découvert, à l’occasion de
récentes « affaires », que cette consanguinité est finalement répandue chez
les hauts fonctionnaires et politiciens. Ainsi, Thomas Thévenoud, le célèbre
ancien secrétaire d’État au Commerce extérieur et ancien conseiller technique
au cabinet de Laurent Fabius dans les années 2000, est-il l’époux de Sandra
Elouarghi, nommée, en 2001, conseillère au cabinet de Pierre Moscovici.
Quand, l’affaire de la « phobie administrative » éclate, Sandra
Elouarghi-Thévenoud est chef de cabinet du président du Sénat. Peut-être, si
Sandra avait été comptable dans une agence immobilière, aurait-elle pu dire à
Thomas que ne pas payer ses factures, ni ses impôts, n’est pas bien ?
Et Laurence Engel, si elle avait été
vendeuse dans un magasin de chaussures, peut-être aurait-elle pu dire à son
mari, Aquilino Morelle, que conseiller des laboratoires pharmaceutiques alors
qu’il travaille à l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) est
contraire aux règles déontologiques ? Peut-être Laurence aurait-elle pu dire
à Aquilino que « privatiser » un salon de l’hôtel de Marigny pour se faire
cirer les souliers n’est pas très malin ? Mais Laurence est directrice de
cabinet d’Aurélie Filippetti, ministre de la Culture. Alors…
Nous pourrions aussi parler de Rama
Yade, ancienne administratrice du Sénat et secrétaire d’État de Nicolas
Sarkozy, épouse de Joseph Zimet qui travailla pour Christian Sautter, adjoint
au maire de Paris et Jean-Marie Bockel, secrétaire d’État à la Coopération et
à la Francophonie. Ou bien de Najat Vallaud-Belkacem, l’actuelle ministre de
l’Éducation nationale, qui est l’épouse de Boris Vallaud, l’ancien directeur
de cabinet d’Arnaud Montebourg au ministère de l’Économie.
Bref, politiciens et
hauts-fonctionnaires, issus des mêmes moules que sont Sciences-po et l’Ena,
tous formatés à la pensée unique, côtoyant les mêmes lieux, fréquentant les
mêmes milieux bobos, se mettent de plus en plus à s’épouser les uns les
autres.
De quoi les couper encore un peu plus
des réalités… si tant est que cela soit possible.
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