La naissance du
capitalisme a donné lieu à un exode depuis les fermes vers les usines.
Personne n’a jamais forcé les masses à partir travailler à l’usine : si
elles l’ont fait, c’est parce que le travail d’ouvrier était bien plus
profitable que l’alternative qui leur était disponible – seize heures par
jour de travail agricole, pour un salaire moindre. Ou encore la prostitution,
la mendicité, le crime ou la famine. Comme Ludwig von Mises l’a expliqué dans
L'Action humaine :
Les propriétaires
d’usines n’avaient pas le pouvoir de forcer quiconque à venir travailler à
l’usine. Ils ne pouvaient qu’employer ceux qui étaient prêts à travailler
pour le salaire qui leur était offert. Aussi faibles qu’ils aient pu être,
ils étaient supérieurs à ce que les plus pauvres pouvaient gagner dans
n’importe quelle autre branche qui leur était accessible. Il est une
distorsion de faits que de dire que les usines ont détourné les femmes des
garderies et des cuisines et les enfants de leurs jeux. Ces femmes n’avaient
rien avec quoi faire à manger, rien avec quoi nourrir leurs enfants. Ces
enfants n’avaient rien sur le dos, et mouraient de faim. Leur seul refuge
était l’usine. L’usine les a sauvés au sens le plus strict du terme, de la
mort et de la famine.
La même chose peut être
dite des conditions des citoyens des pays les plus pauvres d’aujourd’hui. Les
syndicats de travailleurs qui se plaignent des usines à sueur et du travail
des enfants ne se soucient pas du bien-être des enfants du Tiers-monde. Bien
au contraire – ils les perçoivent comme une compétition pour le travail
syndicalisé et veulent qu’ils perdent leur travail au profit de la rue. Les
intellectuels et le clergé qui les assistent dans leurs croisades sont perçus
par les directeurs de syndicats comme d’utile imbéciles.
A mesure que le
capitalisme s’est développé, nous avons assisté à une hausse inexorable des
salaires, grâce notamment aux investissements de capital par les
entrepreneurs. L’amélioration des connaissances, de l’éducation et de
l’expérience des travailleurs (développement de capital humain) les ont
rendus plus intéressants aux yeux des employeurs, en raison de leur
productivité accrue. Et leurs salaires ont grimpé. Mais ce processus est
lent, et se fait toujours par étapes. L’investissement de capital est, en
revanche, capable de produire des améliorations bien plus larges de
productivité. Pensez à la productivité d’un travailleur agricole qui laboure
un champ derrière des chevaux, et comparez-là à la même tâche accomplie grâce
à un tracteur. Le travailleur n’a pas plus de connaissances ou de savoir,
mais il est plus productif en termes d’acres labourées par jour.
Bien que les investissements de capital augmentent la productivité des
travailleurs, ils signifient aussi davantage de profits pour les capitalistes
qui doivent ensuite entrer en compétition pour obtenir les meilleurs
employés. Ils doivent les rémunérer plus, au risque de les perdre à la
concurrence – et de perdre également les revenus qu’ils seraient capables de
générer. Sous le capitalisme, il existe une forte corrélation entre la
croissance de la productivité du travail et la croissance des salaires.
En plus d’être
responsable de la hausse des salaires, le capitalisme permet de produire des
produits moins chers et de meilleure qualité, grâce au processus de
compétition. La baisse des prix offre aux travailleurs une hausse de salaire
plus importante encore, grâce à laquelle ils sont en mesure d’acheter plus de
biens et services produits par le capitalisme, augmentant ainsi leur niveau
de vie.
Economiquement parlant,
rien ne bénéficie plus aux « masses » que la croissance du
capitalisme, puisque les capitalistes ont toujours compris que pour devenir
riche, il est nécessaire de fournir plus de valeur à moindre prix à autant de
personnes que possible. Certains produits tels que les voitures et les
réfrigérateurs étaient en premier lieu réservés exclusivement aux plus
riches, et sont vite devenus accessibles à tous.
La croissance de la productivité générée par l’investissement de capital est
également responsable du raccourcissement de la semaine de travail. La seule
manière pour les travailleurs de travailler moins pour gagner plus est d’être
plus productifs, c’est-à-dire de produire plus de revenus par heure
travaillée pour leur employeur. L’investissement de capital humain joue un
rôle important ici, mais c’est aussi le cas de l’investissement en capital et
la prise de risque des entrepreneurs. Grâce au capital d’investissement, la semaine
de travail aux Etats-Unis est aujourd’hui deux fois moins longue que ce
qu’elle était à l’aube de ce que les historiens appellent la « deuxième
révolution industrielle », qui a commencé à la fin de la Guerre civile
(1865). Le raccourcissement de la semaine de travail est une conséquence du
capitalisme, et non du lobbying des syndicats ou d’une législation fédérale
qui a codifié ce qui existait déjà.
Le capitalisme est
également responsable de l’abolition du travail des enfants. Les jeunes
travaillaient autrefois dans les usines (et certains le font encore dans de
nombreux pays du monde), pour des raisons économiques. Leurs alternatives
étaient le crime, la prostitution, la mendicité ou la famine. A mesure que
les travailleurs sont devenus plus productifs et que leurs salaires ont
grimpés, grâce au capitalisme, ils ont été en mesure de sortir leurs enfants
des usines et de les envoyer à l’école. Les lois qui interdisent le travail
des enfants n’ont fait que codifier ce que le capitalisme avait déjà achevé.
Ces lois étaient notons-le inspirées par les syndicats de travailleurs qui
cherchaient à chasser les plus jeunes, avec qui ils étaient en compétition,
du monde du travail. La loi sur le travail des enfants avait pour objectif de
nuire aux plus jeunes en les privant, eux et leurs familles, des opportunités
économiques dont ils avaient (et ont) tant besoin.
Le capitalisme a également rendu le travail plus sûr. Pour les emplois les
plus dangereux ou les plus exposés, les employeurs sont obligés de verser des
premiums, parce que seuls très peu de gens sont prêts à les accepter. Les
économistes appellent cela une « différence de compensation ».
Celui qui se tient derrière le camion à ordures, en plein hiver, dans un Etat
du nord, le fait parce qu’on lui verse un bon salaire – bien plus avantageux
que beaucoup d’alternatives. Les capitalistes qui recherchent le profit ont
toujours compris qu’il est nécessaire de payer plus pour pousser les gens à
accepter des emplois risqués. Ils ont donc toujours compris qu’il est
possible de tirer profit de la sécurisation du travail. Un lieu de travail
plus sûr nécessite une différence de compensation moindre. La baisse des
salaires versés aux travailleurs est synonyme d’une hausse de profit pour le
capitaliste. OSHA a par exemple souvent rendu le travail plus risqué avec ses
législations insensées mises en place par les bureaucrates du gouvernement
qui ne connaissent rien des emplois qu’ils cherchent à réguler.
Les syndicats du
travail, d’autre part, n’ont jamais bénéficié à personne si ce n’est à leurs
riches patrons et à certains de leurs membres, qui n’ont jamais
représenté plus du tiers de la force de travail américaine (moins de 10%
aujourd’hui sur le secteur privé). Si les syndicats parviennent aujourd’hui à
faire grimper les salaires grâce aux grèves, aux menaces de grève, aux
fermetures d’usines, aux sabotages ou aux campagnes de diffamation de
directeurs d’entreprises, les lois économiques veulent que certains de leurs
membres perdent leur travail – habituellement les personnes les moins
qualifiées et qui ont le moins d’ancienneté. Les employeurs ne paient pas les
travailleurs plus que ce qu’ils peuvent produire en termes de revenus s’ils
veulent poursuivre leurs activités. Ainsi, un nouvel employé capable de
générer 500 dollars de revenus par semaine n’est pas employable si le
syndicat impose un salaire de 700 dollars par semaine. C’est là l’effet de « désemploiement »,
ou de destruction d’emplois, des syndicats.
Notons également que les
syndicats américains sont depuis longtemps la source principale de propagande
anticapitaliste, et de lobbying de législations anticapitalistes (taxes
d’entreprises, salaires de base, régulation du travail, etc). En
affaiblissant ainsi le capitalisme, ils affaiblissent la première source de
croissance de la productivité, et donc la source primaire des hausses de
revenus. Les patrons des syndicats conservent leur poste en bénéficiant au
mieux à une maigre majorité de leurs membres, tout en portant atteinte aux
perspectives économiques de tous les autres, notamment des travailleurs
non-syndiqués, qu’ils diabolisent et qualifient de « rats » et de bien
pire encore. Il existe un long historique de violences perpétrées contre les
travailleurs non-syndiqués par les syndicats américains, qui sont célébrés
par leur propre jour férié à la fin de chaque été.