Mes chères contrariées, mes chers contrariens !
Vous le savez, j’adore nos amis anglais, c’est une vieille
tradition entre nos deux nations, dont l’amitié doit remonter
quelque part à la guerre de Cent Ans. Bref, quand les Français
se font ratatiner, c’est en général pour le plus grand
plaisir souvent mal dissimulé de nos grands « zamis » de la perfide Albion.
Remarquez que, pour être honnête, l’inverse est
également vrai. Chaque souci britannique est souvent accueilli avec un
sourire en coin par nous autres mangeurs de grenouilles.
En cas de victoire du XV de France sur l’Angleterre, nous sommes
en général beaucoup plus heureux que de raison, mais que
voulez-vous, des raisons nous en avons !!
Tenez, par exemple, en deux mois, les Grands-Bretons nous ont
embêtés deux fois avec une histoire vaseuse de tapis rouge qui
leur servirait prétendument à accueillir nos exilés
fiscaux boutés hors de France par les forces socialo-communistes (qui
ne sont parfois pas si loin que cela, je vous le concède).
Franchement, un Anglais ne pourra jamais comprendre un
Français, et inversement.
Je vais de temps en temps à Londres. Pas parce que j’aime
Londres (il ne faut pas le dire), non, uniquement à des fins de
séjours ethnographiques afin d’étudier l’une des
dernières populations au monde heureuse d’avoir une reine et de
chaque grossesse princière (enfin, ce n’est pas le prince qui
est enceinte mais la princesse, vous l’aurez compris en cette
période de mariage pour tous).
Cette population en liesse remercie chaque jour ses Lords (des
espèces de nobles n’ayant pas été encore raccourcis par une guillotine lors d’une
révolution) de posséder entre 60 et 80 % du sol du royaume, ce
qui leur permet non pas de vendre de l’immobilier mais une
espèce de bail emphytéotique de quelques années ou
décennies depuis plusieurs siècles… Et ça
continue, ce qui explique que des Anglais achètent en France,
notamment en Dordogne, mais pas chez eux où ils n’en ont pas et
n’en auront jamais les moyens.
Que voulez-vous, c’est comme ça. Depuis Thatcher, ils ont
décidé de supprimer toutes les aides ou presque…
Franchement, ils ne se portent pas forcément beaucoup mieux que nous,
surtout que l’une de leurs grandes sources de richesses c’est
désormais la place financière de Londres (la City) dont
hélas, il faut renflouer quelques acteurs avec l’argent du
contribuable quelque peu saigné ces derniers temps quel que soit le
pays.
Alors ces Anglais peuvent toujours nous donner des leçons. Certaines
choses, ils les réussissent mieux, pour d’autres ce n’est
pas le cas, et le temps est le meilleur des égalisateurs.
Je n’aime pas lorsque l’on encense un pays en parlant du
« miracle machin ». En général, le
miracle ne dure jamais très longtemps. Souvenez-vous du miracle
irlandais !!
Il y a un mois, on nous expliquait avec sérieux que
l’Angleterre avait trouvé la solution pour sortir de la crise
facilement et sans problème. Un mélange
d’austérité et d’impression monétaire
grâce à une Bank Of England
intelligente et compréhensive.
Bon, apparemment, il va falloir réviser le diagnostic.
Grande-Bretagne :
Osborne va admettre que la rigueur peine à porter ses fruits
« Le ministre des Finances britannique, George Osborne, va
devoir admettre mercredi que sa cure drastique de rigueur mettra plus de
temps que prévu à porter ses fruits, tout en gardant le cap et
en annonçant de nouvelles coupes même si l'économie du
pays reste convalescente. » C’est vrai ça, pourquoi
ne pas continuer une politique qui ne fonctionne pas.
Demandez aux Grecs. Depuis cinq ans, chaque année, il faut
encore plus de rigueur puisque la rigueur n’a pas fonctionné
l’année d’avant.
« Chantre de la rigueur, M. Osborne a mis en œuvre une
cure drastique depuis l'arrivée au pouvoir de la coalition
conservateurs-libéraux démocrates en 2010 dans le but de
réduire le ratio dette/PIB à partir de 2015/2016, soit au terme
de la législature qui s'achève en 2015, et de parvenir à
l'équilibre budgétaire l'année suivante.
Mais dimanche, afin de préparer le terrain à une
révision à la baisse de ses objectifs, le ministre a admis sur
la chaîne BBC1 que "réduire la dette britannique et nous
remettre de la crise financière va prendre manifestement plus de temps
que ce que nous avions espéré". »
Et il est bien là le problème pour tous. Ce n’est
pas exclusivement un problème anglais. Nous n’avons plus les
moyens de relancer quoi que ce soit et toute politique
d’austérité ou de rigueur ne peut entraîner
qu’une récession dans des économies très fragilisées
par des déséquilibres accumulés depuis plus de 20 ans.
« Prise en tenaille entre l'austérité et la
crise de la zone euro, l'économie britannique, qui vient de sortir de
la récession au troisième trimestre, reste en effet fragile et
pourrait même de nouveau se contracter au quatrième trimestre,
selon la Banque d'Angleterre. »
Bientôt, ces perfides anglais vont nous expliquer que
c’est la faute de la récession en France si leur budget
dérape… Sans doute un coup d’outre-tombe de
Napoléon.
L'Office pour la responsabilité budgétaire (OBR),
organisme indépendant chargé de faire les prévisions
économiques et surveiller les finances publiques, devrait donc
réviser en baisse ses prévisions. Puisque ces dernières,
publiées lors de la présentation du budget en mars, faisaient
état d'une croissance de 0,8 % cette année et de 2 % pour 2013,
ce qui est désormais inatteignable !!
Et Osborne d’insister : « Revenir sur cette
politique maintenant, revenir aux dépenses, à l'endettement et
à l'emprunt (...) serait un complet désastre pour notre pays »,
a-t-il affirmé. « Ayons le courage de garder le cap »
malgré l'impopularité des mesures, a-t-il par ailleurs insisté
dans le journal Sun on Sunday.
Je suis d’accord sur le fait que lutter contre une crise
d’endettement par encore plus de nouvelles dettes n’est en soi
pas une excellente idée économique. Mais la rigueur par la
hausse d’impôts ou la baisse des dépenses, peu importe ce
que l’on fait c’est au final le même résultat
(à court et moyen terme), c’est-à-dire moins
d’argent injecté ou disponible pour le système
économique. Donc il en résultera une baisse du PIB qui aura
pour conséquence d’augmenter in fine le ratio dette/PIB, quand
bien même la dette resterait constante.
Alors en Angleterre aussi on part à la chasse à la
fraude fiscale qui est la fausse bonne idée systématiquement
avancée par des ministres et des gouvernants à court,
justement, de bonne idée.
On va encore augmenter un peu la pression fiscale, finalement comme
chez nous. À ce rythme, c’est nous les Français qui
pourront installer notre tapis rouge à la gare du Nord à la
sortie de l’Eurostar.
Anglais, nous vous attendons. Chez nous, le droit à la
propriété est respecté – enfin, pas si vous vous
appelez Mittal, quoique…
–, vous pourrez être propriétaire et léguer un bien
à vos enfants. Vous n’avez pas besoin d’attendre 6 mois
pour vous faire arracher une dent et la moitié de votre salaire avec.
En plus chez nous, vous mangerez bien.
Mes chers « zamis »
anglais, nous vous attendons, et vu la rigueur à laquelle vous soumet
Osborne, sachez que vous serez mieux, beaucoup mieux chez nous.
Bref, les Anglais ne sont pas économiquement dans une si grande
forme que cela.
Mais ce ne sont pas les seuls… Tenez encore eux, les Japonais.
J’aime bien les Japonais, surtout leur cuisine, bien qu’ici ce
soit des Chinois qui se soient improvisés restaurateurs
japonais…
Japon
l'économie sur une mauvaise pente
Cette fois-ci les bonnes nouvelles proviennent du Gouverneur de la
Banque centrale japonaise lui-même.
« L'économie japonaise prend globalement une
direction négative », a déclaré Kiyohiko Nishimura, lors d'une
conférence de presse à Niigata (centre-nord).
Cela me fait penser à la célèbre phrase de
Marchais concernant le bilan « globalement positif du communisme ».
Mais rassurez-vous, on n’est pas sûr que cela aille si mal
que ça. « Nous devons suivre attentivement
l'évolution mois par mois », a-t-il ajouté,
indiquant que « même la petite remontée de la
production industrielle constatée en octobre ne devait pas conduire
à un trop grand optimisme ».
Nous voilà désormais plus confiants. Nous savons donc
que Kiyohiko Nishimura va
surveiller la situation tous les mois… Alors je suis sûr que vous
pensez que c’est une mauvaise nouvelle.
Si c’est ce que vous pensez, eh bien vous avez tout faux, vous
n’avez rien compris. C’est une excellente nouvelle. Youpi, le
Japon va mal, c’est génial. De même le Royaume-Uni qui
s’enfonce, c’est une mauvaise nouvelle ? NON, bien
sûr, c’est extraordinaire. Et les USA… Plus ils vont mal,
mieux c’est, car en « vérité je vous le
dis », à chaque fois que ça va plus mal que mal, les
autorités font la seule chose qu’elles savent faire depuis la
nuit des temps… Elles impriment des billets, font des QE ou de
l’assouplissement quantitatif…
Bref, elles inondent la planète de liquidité et
d’argent… donné aux banquiers pour pas cher qui, à
leur tour, rachètent des actions pour faire monter les cours, leurs
bilans et se prendre le maximum de méga-bonus qui seront encore
records cette année !!
Vous verrez les gros titres de début 2013…
« Bonus année record »… Qu’est-ce
qu’ils vont se gaver encore cette année.
Le problème, c’est qu’à un moment ou
à un autre, nous devrons tous passer à la caisse. Parce
qu’il n’y a aucun secret, aucune formule magique, aucune
incantation ni prière pour nous sortir du piège dans lequel
nous avons mis nos économies.
Il n’y aura que « du sang, de la sueur et des
larmes »… Mais pour ce genre de choses, il faut le
reconnaître, nos amis anglais ont toujours été
très forts.
Charles
SANNAT
Directeur des Études Économiques Aucoffre.com
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