Les
exégètes du Coran ont parfois affaire à des versets qui
se contredisent. Pour connaître la vérité et savoir ce
qu’il faut croire, ils ont développé la théorie de
l’abrogation (naskh)
selon laquelle, en cas de contradiction entre deux versets, le plus
récent abroge le plus ancien.
Pour bien
comprendre le cap économique que veut suivre François Hollande,
nous pouvons appliquer cette théorie de l’abrogation au court discours
de vœux adressé aux Français par le Président le 31
décembre 2012. En effet, de prime abord, nous pouvons avoir l’impression
qu’il dit tout et son contraire, sans trop savoir ce qu’il veut.
Cela pose un vrai problème
de décryptage pour les entrepreneurs et les investisseurs :
où la France va-t-elle ?
Reprenons donc
le discours des vœux et appliquons la naskh à trois
contradictions évidentes. Nous connaîtrons ainsi le véritable
fond de la pensée du Président et ce qu’il faut croire de
la politique économique et fiscale du gouvernement pour 2013.
Première
contradiction : « Le rétablissement de nos comptes
publics. Je veux désendetter la France. […] Je vous
assure que chaque euro prélevé sera accompagné
d’une lutte drastique pour réduire les dépenses publiques
inutiles. » Cette phrase est abrogée par la citation
qui suit plus tard dans le discours : « Justice sociale.
Avec l’augmentation du SMIC, du RSA, de l’allocation de
rentrée scolaire. Et le droit de partir à la retraite à
60 ans pour ceux qui ont commencé à travailler tôt ».
La réduction des dépenses publiques ne peut pas
s’effectuer en les augmentant en même temps : le
Président cite le SMIC et le RSA, en oubliant de parler de la CMU qui
couvrira 500 000 personnes de plus, d’une probable extension du
RSA-activité à 800 000 personnes, de la
« garantie-jeune » pour 100 000 chômeurs de moins
de 25 ans la première
année. Au final, plusieurs milliard d’euros de dépenses qui
annuleront les quelques réductions que la Modernisation de
l’action publique (MAP) pourrait trouver. Nous aurons donc une
augmentation des dépenses publiques pour 2013.
Deuxième contradiction : « le pacte de compétitivité.
Je veux redonner, dès 2013, des marges de manœuvre aux
entreprises grâce à un crédit d’impôt de 20
milliards d’euros pour leur permettre d’embaucher,
d’investir et d’exporter. » Cette phrase est abrogée par la
suivante venant plus tard dans le discours : « Justice
fiscale, d’abord. Les revenus du capital sont désormais
taxés comme ceux du travail. Et il sera toujours demandé
davantage à ceux qui ont le plus. C’est le sens de la
contribution exceptionnelle sur les plus hauts revenus qui sera
réaménagée, suite à la décision du Conseil
constitutionnel, sans changer son objectif. »
L’éventuel effet positif de la mise en place d’un
système d’incitation fiscale sera annulé par la mise en
place d’une taxe confiscatoire à 75% appelée
« contribution exceptionnelle »,
annoncée pour 2014 et qui sera constitutionnelle cette fois-ci.
Nous aurons donc une baisse de la compétitivité des entreprises
française en 2013.
Troisième
contradiction : « la maîtrise de la finance : la
Banque publique d’investissement est créée ».
Une intention abrogée par une phrase qui suit plus tard dans le
discours : « j’ai
donc demandé au gouvernement de proposer une stratégie
d’investissements publics comme privés pour moderniser la France
à l’horizon 2020». La banque publique
d’investissement avait pour objectif, théorique certes,
d’être à la disposition des entreprises pour les soutenir
dans les investissements qu’elles voudront effectuer. Cet objectif est annulé
par le simple fait que ce sera le gouvernement qui décidera de la
stratégie de développement et d’investissements non
seulement publics et mais aussi privés. Nous aurons donc une
économie planifiée qui sera mise en œuvre en 2013 à
la place d’une véritable économie de marché.
Les
contradictions du Président sont évidentes. Mais elles ne
peuvent cacher le véritable cap qu’il se donne : la mise en
place d’un collectivisme à la française. Un cap que
François Hollande est bien décidé à suivre « contre vents et marées ».
Investisseurs et entrepreneurs sont prévenus.
|