Les billets
précédents (1,
2,
3)
ont mis en évidence les problèmes environnementaux posés
par l’orpaillage illégal en
Guyane, et indiqué les contradictions des solutions politiques
consistant à renforcer le contrôle policier et à
augmenter les frais de fonctionnement de l’industrie aurifère.
Ils ont également démontré les limites pratiques des
solutions proposées par WWF, visant à assurer la
traçabilité de la production aurifère. Les
problèmes environnementaux posés par l’orpaillage
illégal ne sont toutefois pas une fatalité et des solutions
existent.
L’orpaillage
est de toute évidence une entreprise périlleuse à
plusieurs égards : d’abord pour les orpailleurs, directement
impliqués dans l’extraction du métal précieux,
mais aussi pour les utilisateurs des terres adjacentes. L’usage d’acide
et de mercure empoisonnent les terres, affectant potentiellement la
biodiversité, les récoltes et la pureté des cours
d’eau.
Pour limiter
ces conséquences environnementales, les autorités publiques
s’efforcent habituellement de limiter le nombre d’orpailleurs et
de déployer des efforts de contrôle pour éviter les
« hors-la-loi ». Selon ce raisonnement, le fait de
payer la taxe aurifère affranchirait donc comme par magie certaines
entreprises de leurs responsabilités environnementales.
Cette solution
est évidemment arbitraire car, toutes choses égales par
ailleurs, une exploitation aurifère illégale n’a pas plus
de conséquences environnementales qu’une exploitation
aurifère légale. La distribution de licences aurifères par les
autorités peut aussi facilement faire l’objet de corruption, tandis que le
contrôle des licences ne saurait
éliminer complètement le marché noir et faire
disparaître tous les orpailleurs décidés à assumer
les risques de l’illégalité.
Or, en
dépit de ces insuffisances évidentes, la gestion publique des
ressources environnementales ne laisse pas la place à d’autres
solutions que celle consistant à limiter arbitrairement le nombre de
licences de fonctionnement.
Pourtant, si
au lieu de distribuer des concessions pour des périodes limités
de temps, l’on vendait définitivement et entièrement les
terres en question, il serait possible de résoudre les
problèmes environnementaux liés à l’orpaillage
d’une manière moins arbitraire, plus durable et plus efficace.
Les nuisances environnementales précédemment décrites
deviendraient automatiquement des violations de la propriété
privée, et seraient résolues de la même manière
que toutes les infractions du même ordre.
L’institution
de la propriété privée permet de prendre en compte et de
respecter les préférences individuelles des riverains. Dans un
système de droits de propriété, le fait de déverser
du cyanure sur les terres d’un autre propriétaire pose les
mêmes problèmes juridiques et éthiques, quelle que soit
l’activité personnelle ou industrielle qui les a
provoqués. Le respect de la propriété privée est
une exigence beaucoup plus forte que n’importe quel décret
décidé par l’administration publique. Ainsi, l’ouverture
des mines aurifères ne dépendrait plus d’une
décision administrative mais de l’accord des riverains
directement affecté par leur présence. De cette façon, , le nombre de concessions ne serait pas
déterminé de manière aléatoire, pas plus que
l’identité de leurs exploitants, le montant des taxes à payer
ou encore les mesures à mettre en œuvre pour empêcher les
orpailleurs illégaux.
La
propriété privée permettrait en outre de convertir les
dommages environnementaux en coûts de fonctionnement. Une exploitation
aurifère devrait nécessairement intégrer dans ses coûts
les dédommagements convenus avec les riverains et/ou la mise place des
mesures efficaces pour éviter de telles nuisances.
Il est crucial
de rappeler ici que, contrairement à tous les autres biens, l’or
a longtemps servi de moyen de paiement et continue d’être une réserve
de valeur. Son statut particulier vient notamment de sa rareté et des ses coûts de production particulièrement
élevés. Il ne serait sinon pas resté une valeur de refuge fiable. Une
augmentation de ses coûts de production qui intégreraient les dommages environnementaux ne donnerait
que des raisons supplémentaires de le préférer au
papier.
Afin
d’éviter toute conclusion hâtive, il est important de
préciser que la propriété privée ne constitue pas
une panacée environnementale. Toutefois, contrairement au
système public sujet à des influences politiques, qui tend
à multiplier le nombre de licences et à diminuer
artificiellement les coûts de l’orpaillage, le système
basé sur la propriété privé a le mérite
d’obliger les orpailleurs à assumer l’ensemble des
nuisances et à intégrer ainsi l’ensemble de leurs
coûts.
Somme toute,
pour une solution durable aux problèmes environnementaux posés
par l’orpaillage, il faudrait songer au système des droits de
propriété comme alternative au système actuel des
licences d’exploitation ou encore à la traçabilité
des produits aurifères proposée par le WWF.
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