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Monnaie, inflation et réglementation

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Chroniques en Liberté
Published : October 10th, 2012
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Dès les origines, les hommes ont observé que les pommes tombaient au sol en se décrochant des arbres mais il a fallu attendre Newton pour comprendre les lois de la gravitation universelle. Il en va de même des phénomènes économiques en général, et monétaires en particulier : on les observe depuis des siècles mais il faut du temps pour en comprendre le mécanisme.


A l’époque romaine, la monnaie se présente sous forme de pièces métalliques en or, argent, cuivre ou bronze. La planche à billet n’existe pas encore. L’empire romain s’est bâtie par une succession de périodes de guerres, destinées à conquérir de nouveaux territoires, et de périodes de constructions : les romains étaient de grands bâtisseurs. Mais les romains ne disposaient pas assez de richesses pour financer les guerres (payer les soldats, ceux qui touchent la solde) ainsi que les travaux de construction.


C’est pourquoi les empereurs ont rapidement manipulé la nature et le poids des pièces en circulation. Ainsi, l’aureus, pièce d’or de 7,2 g sous Néron, fut remplacé par le solidus de 4,5 g, qui se maintint ensuite en France sous le nom de sol, puis de sou. Les pièces nouvelles contenant moins d’or, on pouvait mettre en circulation une quantité plus importante de pièces avec la même quantité d’or. Mais pour obtenir la même quantité d’or en échange de sa marchandise, le commerçant augmentait les prix. On ne défie pas impunément l’économie…


Pour lutter contre l’inflation, les empereurs allaient s’attaquer non pas à la cause de l’inflation (l’augmentation de la masse monétaire en circulation, c’est-à-dire de la quantité de pièces dépréciées) mais à son effet (hausse des prix) en interdisant l’augmentation des prix sous peine de mort. Il est vrai que les romains, contrairement aux grecques, ne disposaient pas de connaissances économiques leur permettant de faire un lien entre prix et quantité de monnaie en circulation.


Malgré l’évolution de la science économique, la tentation de bloquer les prix (agir sur les effets plutôt que sur les causes) pour lutter contre l’inflation a toujours été présente chez les hommes de pouvoir. Ainsi, les dirigeants de l’union soviétique bloquèrent les prix des denrées de première nécessité, croyant pouvoir ainsi éradiquer l’inflation. En fait, ils ne firent qu’engendrer pénurie et files d’attente devant les magasins vides. Plus près de nous, le gouvernement français pratique le gel de certains prix comme le gaz, l’essence, les loyers ou encore les tarifs des médecins.


A l’heure où l’on attend tout de la réglementation, l’histoire enseigne que l’inflation est née de la toute première réglementation monétaire qui consista à marquer les pièces d’or d’une effigie royale et d’en imposer le cours forcé ou cours légal. Car, réfléchissons un instant, pourquoi imposer le cours d’une monnaie en or ? De tout temps, tous les agents économiques acceptaient spontanément l’or. De ce fait, les pièces d’or n’avaient nul besoin d’être marquées d’une effigie officielle (tout comme les lingots d’or aujourd’hui). Leur poids en or faisait leur valeur réelle. L’or ne « fond » pas et conserve la valeur, premier service que l’on attend d’une unité monétaire. Or, l’inflation fait « fondre » la valeur de la monnaie. Et quand ils en ont le choix, les agents économiques préfèrent toujours se débarrasser de la monnaie qui perd sa valeur. Personne ne veut mettre ses économies dans un coffre percé…


Mais, les rois ont toujours eu à faire face à des problèmes de finances publiques, notamment pour financer les dépenses de conquêtes, de guerres ou tout simplement le maintien du train de vie et du prestige de l’Etat. Et face à un peuple au bord de la misère, ils leur étaient difficiles d’augmenter indéfiniment les impôts au risque d’être impopulaires et de provoquer des révoltes dangereuses pour la couronne.


Même s’ils s’entouraient volontiers d’alchimistes, ils ne sont pas parvenus à transformer le plomb en or. Alors ils ont compris qu’ils pouvaient produire plus de pièces d’or avec la même quantité d’or en coupant les pièces d’or avec un autre métal. A partir de ce moment là, la valeur faciale ou valeur nominale de la pièce d’or ne correspondait plus à sa valeur réelle, c’est-à-dire son poids physique en or.


Bien-sûr, les agents économiques allaient s’en apercevoir et refuseraient d’être payés avec de telles pièces préférant utiliser les pièces non manipulées. Alors les rois ont marqué de leur effigie ces pièces et en ont imposé le cours, ouvrant la voie au contrôle de la masse monétaire par le pouvoir central.


En réponse, et puisqu’ils n’avaient plus le choix des monnaies, les agents économiques augmentaient les prix pour compenser la perte de valeur de l’unité monétaire officielle et imposée. Ce mécanisme sera encore plus facilité avec les billets de banque centrale, dont le coût de production est infime, d’autant plus qu’avec l’époque moderne, ils ne sauront plus du tout rattachés à un équivalent-or. Et, comme l’a souligné Milton Friedman, le XX° siècle inaugura « l’ère de l’inflation », voire de l’hyperinflation dans de nombreux pays.

 

 

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Docteur en sciences économiques de l'université de la Méditerranée et Maître de conférences – HDR - à l'IAE de l'université de Perpignan. Médaille du Bibliographical Institute of Cambridge (London, 2012), il est spécialiste de croissance économique ainsi que chercheur en tourisme international et consultant pour l’Organisation Mondiale du Tourisme (Nations-Unies). Il signe des chroniques économiques dans la presse nationale (Les Echos, Le Monde, le Figaro, Economie-Matin) et internationale (l’AGEFI le quotidien suisse des finances, le Boston de Providence aux USA, le Québécois Libre à Montréal). Il anime enfin, depuis plus de 15 ans, un blog à vocation pédagogique, Chroniques en liberté, à l'attention de ses étudiants et du grand public. Ouvrages [1] Les défis économiques de l'information, la numérisation, L'Harmattan, Paris 1996. [2] L’innovation dans l’industrie du tourisme - Enjeux et stratégies. En co-écriture avec B. Solonandrasana, L’Harmattan, Paris, 2001 [3] L’épopée de l’innovation – Innovation technologique et évolution économique, L’Harmattan, Paris, 2005. [4] L’innovation dans l’industrie du tourisme. Enjeux et stratégie, avec B. Solonandrasana, L’Harmattan, Paris 2006. [5] Fondements d’économie du tourisme. Acteurs, marchés, stratégies. De Boeck Université, Bruxelles 2007. [6] Le modèle français dans l’impasse, Tatamis Editions, Paris 2013. [7] Histoire thématique et contemporaine des faits économiques, Ellipses, Paris 2015. [8] Analyse de la finance internationale : le grand naufrage, en co-écriture avec Faouzzi Souissi (Trader),The Book Edition, Paris 2019.
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Vous traitez uniquement de la monnaie fiduciaire, cette monnaie d'échange et de réserve, mais dès lors que notre économie repose sur la monnaie scripturale qui représente les 9/10e de l'économie et que celle-ci ne voit sa destruction que lors du parfait remboursement, un autre désordre différent de l'inflation vient rompre la confiance des agents économiques car ils ne comprennent pas que si leurs propres emprunts (habitations ,véhicules, développement entrepreneuriaux, etc) sont financés avec de la dette et qu'ils sont tenus de la rembourser, à côté d'eux des états s'endettent pour des dépenses courantes qui ne participent pas à l'économie. La monnaie fiduciaire des agents économiques est détruite par la consommation et leur dette par son remboursement. Ce qui est la règle. Mais lorsque les états empruntent pour des dépenses courantes il y a destruction de cette dette immédiatement et son remboursement en reste cependant obligatoire aussi et va peser à un moment ou un autre sur les agents économiques par l'impôt (l'inflation étant un impôt) donc va réduire sa capacité d'investissement et de consommation et l'ensemble de l'économie s'en trouvera bloqué. Cet effet d’éviction était prévisible, mais n’a pas été respecté, il se rappelle tout simplement à nous. Mais cet effet d’éviction est la puissance carrée, car l’argent emprunté par les états est bel et bien de l’épargne, donc de la monnaie fiduciaire (revenu – consommation) qui a été consommée et détruite d’une part mais qu’il va falloir rembourser d’autre part. C’est la double faute des dirigeants politiques et notre double peine. Et rien ne sert de vouloir s’exonérer de cette dette, elle sera remboursée de toute manière dans les larmes ou le sang. Milton Friedman avait l’art de dire la chose « TANSTAAFL » There Ain't No Such Thing As A Free Lunch ou There Is No Free Lunch». Il n’y a pas de repas gratuit.
Les hommes de " pouvoir" ....Une vraie plaie du genre gangrène hydrogénée...
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Vous traitez uniquement de la monnaie fiduciaire, cette monnaie d'échange et de réserve, mais dès lors que notre économie repose sur la monnaie scripturale qui représente les 9/10e de l'économie et que celle-ci ne voit sa destruction que lors du parfait  Read more
CLAUDE F. - 10/21/2012 at 7:01 AM GMT
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