L’appétit de dépense de l’État
et des collectivités locales est insatiable, on le sait. Alors comment
continuer à dépenser lorsqu’il faut réduire les déficits publics au risque de
perdre la confiance des marchés et des agences de notation ? Les hauts
fonctionnaires, toujours très imaginatifs dans ce domaine, ont inventé pour
cela le « PPP », le Partenariat public-privé.
La construction d’un
équipement public oblige l’État ou la région à accroître son endettement, ce
qui est de plus en plus mal perçu. Pour éviter cela, une structure juridique
dédiée au projet est mise en place, le PPP, qui réunit les entreprises
concernées et des représentants de la puissance publique. Et c’est ce PPP qui
s’endette, et se remboursera en percevant des versements de l’État, pendant
une ou plusieurs décennies. Des versements plutôt qu’un emprunt, pour l’État
l’avantage est évident : sa dette n’augmente pas !
L’État utilise ici exactement
le même procédé qu’il reproche aux banques, le hors bilan, en l’occurrence un
SPV (Special Purpose Vehicle), qui permet d’isoler des risques dans une
structure opaque. Car les versements vont bien sûr peser sur les dépenses
publiques, et surtout les termes du contrat indiquent systématiquement qu’en
cas de recettes moindres que prévues, c’est l’État qui doit compenser le manque
à gagner.
Le Royaume-Uni fait figure de
précurseur dans ce domaine, et il a pu constater la dérive des coûts, ce qui
l’a amené à restreindre son utilisation des PPP. Pas en France où, depuis
2004, 41 milliards d’euros ont été engagés de cette façon, par l’État et les
collectivités locales. Les dérapages sont déjà nombreux. Par exemple, le
Musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem) de
Marseille, a été audité par la Cour des comptes : coût de la construction :
30 millions, charges financières : 26,7 millions, maintenance : 34 millions !
Faut-il ralentir la cadence ? Au contraire, le rythme s’accélère puisque le
métro du Grand Paris (20 milliards d’euros) et les éoliennes en mer (10
milliards d’euros) seront financés de cette façon. L’État prévoit de
construire 2000 kilomètres de voies TGV supplémentaires, soit une facture
globale de 80 milliards d’euros, et ce sont encore les PPP qui seront
sollicités.
En toute bonne logique, il
faudrait rajouter le montant total de ces PPP à la dette publique «
officielle » de la France (1832,6 milliards d’euros) ! Pourquoi une telle
fuite en avant ? Les intérêts des responsables politiques sont liés à ceux
des grands groupes de construction publique, et qui sont, en France,
également présents dans les médias, sans lesquels une carrière politique ne
peut pas se faire... Cette réalité compte bien plus que la bonne gestion des
comptes publics