J’évoquais récemment le fait, consternant mais parfaitement documenté, que la presse française avait finalement laissé tomber toute prétention à délivrer une information à peu près équilibrée ou au moins complète pour virer définitivement à la propagande la plus décontractée, voire assumée pour certains organes sur-subventionnés.
Ce choix de faire de la propagande s’exprime dans différents domaines.
En politique, cela reviendra à orienter les débats et à ne choisir que les questions et les revendications qui correspond à la doxa du moment ; il n’est qu’à voir comment, dans la crise actuelle des Gilets Jaunes, les questions du tabassage fiscal que subissent les Français ont été évacuées très rapidement des médias pour leur permettre de se concentrer sur les autres revendications plus ou moins fourre-tout mais résolument anti-libérales (comme le retour de l’ISF ou les revendications sur la hausse du SMIC).
En économie, la même manœuvre sera mise en place pour évacuer toute étude, toute analyse critique des « solutions » qui ne marchent pas – ce qui donne d’intéressantes contorsions et dénis de réalité lorsqu’il s’agit d’évoquer le Venezuela par exemple, pour ne surtout pas évoquer les solutions qui marchent (au hasard, la baisse des dépenses publiques et l’équilibre budgétaire strict) et se concentrer sur les solutions qui ont l’imprimatur du gouvernement et des classes jacassantes, d’où le torrent de keynésianisme, de redistribution tous azimuts et de collectivisation endiablée pour camoufler les désastres.
Bien sûr, cette propagande ne s’arrête pas là : s’il est un domaine où elle est encore plus mis en oeuvre, c’est celui du climat et ce d’autant plus qu’il offre un vaste champ d’expériences sociétales pour ceux qui rêvent de régenter, interdire et taxer tout ce qu’ils peuvent. Du reste, il n’y a absolument rien d’étonnant dans le succès des thèses climato-réchauffistes auprès des politiciens lorsqu’on se rend compte qu’elles aboutissent absolument toutes à augmenter les taxes, ponctions et accises sur les biens et services de consommation courante. Il faut se résoudre à l’évidence : si le catastrophisme écolo aboutissait à la conclusion inévitable qu’il faut absolument diminuer les taxes et les impôts, absolument personne n’en aurait jamais entendu parler, nulle part.
Le souci avec ce genre de procédés c’est qu’au bout d’un moment, tout ce qui pouvait être taxé l’a été, à mort même, et que chaque ponction supplémentaire ne rapporte plus rien et incite les consommateurs à renoncer, jusqu’à l’exil. Un phénomène nouveau apparaît : la propagande qui, sans être subtile (n’exagérons rien) était jusque-là insidieuse se transforme alors en véritable Luna Park de la désinformation ou le grotesque y côtoie le véritablement obscène dans une insouciance même pas consciente.
J’en veux pour preuve la récente diffusion par un nombre conséquent de médias d’une « étude » tendant à prouver que la mort des Amérindiens pendant le premier siècle de colonisation des Amériques aurait provoqué tout ou partie du petit âge glaciaire observé à cette période. Oui, vous avez bien lu : Slate, Figaro, 20 Minutes – et j’en passe – se sont passés le mot pour diffuser aussi largement que possible ces fadaises (on peut difficilement trouver d’autres mots plus aptes à décrire ces calembredaines consternantes).
Pour s’en convaincre, on pourra lire l’étude en question : si on peut éventuellement faire crédit aux chercheurs pour les efforts déployés afin d’estimer les chiffres des populations amérindiennes du seizième siècle (qui restent pifométriques, soyons honnêtes), et si l’on peut raisonnablement imaginer que les colons ont bel et bien provoqué la mort d’une majorité d’entre eux (beaucoup plus par maladie que par le fil de l’épée, sans l’ombre d’un doute), l’étude cesse rapidement d’occuper le terrain scientifique pour aller trotter hardiment dans les steppes cabossées des pures supputations lorsqu’il s’agit ensuite de relier ces morts avec une baisse constatée du taux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère de l’époque.
Lorsqu’on l’épluche, on y lit surtout une succession de conditionnels dodus qui n’apportent en rien la moindre preuve claire entre d’un côté la décimation des autochtones américains et de l’autre, la diminution du taux de CO2 dans l’atmosphère, quand bien même la conclusion l’affirme péremptoirement. Pour les auteurs du papier, la disparition de dizaines de millions d’hectares de plantations céréalières (servant de nourriture à nos Amérindiens) qui ont été remplacés par de la forêt vierge (suite à leur mort) aurait conduit à cette diminution du CO2 atmosphérique. Aucune autre explication pour cette baisse ne semble possible, même si, à d’autres périodes géologiques, les taux de CO2 étaient 5 à 20 fois supérieurs et la végétation luxuriante (ce qui calme toute explication à base de puits de carbone et autres sornettes du même acabit). Et puis bon, le fait est que la population mondiale a, depuis cette colonisation américaine, été multipliée par 14, sans que le taux de CO2 dans l’atmosphère n’ait subi la même augmentation, de loin. S’il y a corrélation, elle est donc fort ténue.
En fait, tout ceci sent bon la recherche de validation de thèse a priori, comme nous y sommes maintenant habitué : les dotations aux recherches étant directement dépendantes de la publicité obtenue, les thèses visant à confirmer l’impact de l’Humain sur le climat seront toujours bien mieux financées que les thèses diamétralement opposées.
Mais le pompon est ici atteint par la presse qui, relayant cette étude aux conclusions douteuses habilement enrobées de conditionnels sucrés, s’empresse de nous pondre des titres aussi putassiers que choquants : pour elle, « Les colons ont tué tellement d’Amérindiens que la terre s’est refroidie », aucun doute possible.
Dans une tradition journalistique qui nous rappelle que « Selon une étude » est le nouveau « Ivre virgule », nos fiers colporteurs de la Parole Officielle de l’Eglise Universelle du Réchauffement Climatique Anthropique se font fort d’oublier qu’un titre pareil justifie les pires abominations pour peu qu’on veuille se donner la peine d’y réfléchir deux minutes.
J’attends ainsi une nouvelle « étude », réalisée avec le maximum de soins par des chercheurs aussi malin financièrement que ceux de la précédente étude, qui fera le calcul de ce qu’auraient coûté, sur le plan de l’empreinte carbone, les millions de Juifs et autres Tziganes passés par les camps d’Hitler. Nul doute que cette facture carbone putative serait particulièrement salée, si l’on tient compte de toute l’énergie, de toutes les infrastructures et de toute la nourriture qu’il aurait fallu mobiliser pour assurer une existence digne à ces individus au-delà de leur fin abominable au milieu du XXème siècle.
Après tout, puisqu’on arrive à la conclusion détendue que la mort de 55 millions d’Amérindiens (soit 10% de la population mondiale de l’époque estimée à 550 millions) a provoqué un petit âge glaciaire, attendu que tous les gouvernants et tous les écolos, vibrant d’un humanisme sans faille, souhaitent lutter contre un réchauffement climatique sûr, certain, et catastrophique, la conclusion de cette étude et de cette obstination politico-écologique est imparable : il va falloir rayer 700 millions d’individus de cette planète, nom d’une pipe en bois. Notre avenir en dépend (enfin, si vous êtes dans les 90% restant, s’entend). Et dans ce contexte, Hitler – lui-même écolo revendiqué (Coïncidence ? Je ne crois pas) – n’aurait donc rien fait d’autre que lutter, à sa façon quelque peu radicale, contre un phénomène de surpopulation dangereux pour notre planète.
Tout ceci est, bien évidemment, absolument ignoble.
Mais justement : le caractère ignoble ne provient pas des extrémités auxquelles on peut arriver (comme les derniers paragraphes le montrent) mais bien des présupposés initiaux (i.e. l’Homme a une telle influence sur le climat qu’une décimation entraîne une baisse du CO2, même en temps pré-industriel) et des raisonnements qui sont, ici et maintenant, effectivement tenus par les écolos de combat qu’on peut lire et voir un peu partout : lorsque ceux-ci réclament, à force de marches climatiques expiatoires, que soient taxés les vilains et les méchants, que soient contraints les peuples et que soient réduites les populations, ils ne tiennent pas d’autre discours que celui d’une décimation raisonnée pour sauver Gaïa.
Réclamer une décroissance, un abandon de la plupart (sinon toutes) nos sources d’énergies, c’est littéralement condamner à mort des millions d’individus, et pas parmi les plus riches. Quant à la presse, parfaitement confite de ses habitudes et de ses certitudes, elle ne fait rien d’autre qu’attiser ces désirs néfastes en relayant ce genre d’études.