Aujourd’hui, les économistes mainstream et même certains économistes libéraux français jugent les politiques monétaires activistes menées par les principales banques centrales comme un moindre mal. En effet, ils considèrent que la déflation est à éviter à tout prix. Paraît-il que rien ne serait pire qu’une situation de taux d’intérêt réel négatif. Il s’en suivrait un arrêt de l’investissement et de l’activité économique en raison de l’attentisme des décideurs économiques et des acheteurs. La perspective de baisse des prix conduirait à un cercle vicieux de ralentissement économique.
Pourquoi une telle asymétrie de traitement entre l’inflation et la déflation ? La déflation est-elle le mal absolu ? Arrêtons-nous un instant sur les origines de la déflation.
Les origines de la déflation
Il est important de distinguer deux types de déflation : la déflation monétaire et la déflation des prix. La déflation des prix a des causes réelles dans la mesure où elle résulte d’une augmentation de la productivité plus rapide que cella de la masse monétaire. Cette situation s’est produite à maintes reprises au cours du 19ème siècle puisque l’époque de la révolution industrielle est caractérisée par une forte augmentation de la productivité alors que le système monétaire international était dominé par l’étalon-or. L’élasticité de l’offre de monnaie-or étant faible, la baisse des prix ne faisait que traduire la hausse continue et soutenue de la productivité.
En effet, le rythme auquel on découvrait des mines d’or était bien inférieur au rythme de progression de la productivité. La raréfaction de l’or se traduisait donc par une augmentation de la valeur de la monnaie et donc une baisse générale des prix des biens manufacturés. Eh oui, c’était l’époque – oh combien regrettée ! - où les banques centrales avaient un pouvoir de nuisance somme toute relativement réduit puisque la monnaie papier était liée à l’or par un taux de change fixe.
Ce type de déflation ne revêt en aucun cas de caractère récessif et n’est pas source de pessimisme et d’attentisme. Elle ne signe pas l’arrêt de l’activité économique, bien au contraire ! Nous pourrions presque la qualifier de « bonne déflation ». Il est certain que ce type de déflation a disparu depuis fort longtemps de la mémoire collective ! Aujourd’hui la déflation reste associée aux scènes les plus dramatiques des années 1930 et à la Grande Dépression caractérisée par un recul de la croissance économique et une explosion du chômage et de la pauvreté.
Malheureusement la pauvreté intellectuelle qui caractérise les sciences économiques depuis de nombreuses décennies conduit à nous faire presque oublier que la déflation pouvait être source d’enrichissement. C’est tout à fait regrettable parce que le dynamisme économique qui caractérise les pays nouvellement émergents pourrait justifier aujourd’hui la baisse continue des prix des biens manufacturés exposés à la concurrence internationale. Cette baisse des prix (déflation) est sans aucun doute accentuée par l’introduction des nouvelles technologies de l’information, source d’accélération du progrès technique dans les secteurs les plus directement affectés. Dans ces conditions, il est probable que même sans crise financière la déflation aurait dû prévaloir dans nos économies grâce aux gains de productivité, l’innovation et le commerce international.