- L’Horloge de l’Apocalypse
se rapproche de minuit
- Le monde n’avait
plus été aussi proche de l’autodestruction depuis 1953
- La menace d’attaque
nucléaire, le changement climatique et l’évolution technologique représentent
des risques accrus
- Pour la
première fois, le Bulletin of Atomic Scientists a nommé un individu en
particulier : Donald Trump
- Les battages
médiatiques devraient être ignorés et l’accent devrait être mis sur les incertitudes
quant à l’avenir
- L’or et l’argent
enregistrent d’excellentes performances en période d’incertitude, et
jouent le rôle de valeurs refuges
- Les plus gros
gestionnaires de fonds de Wall Street ont misé sur l’or face aux
incertitudes actuelles
Nous voilà deux minutes et demie
avant minuit. Le temps s’écoule inexorablement, et le danger est partout. Les
autorités publiques devraient agir immédiatement, guider l’humanité à l’écart
de la falaise. Si elles ne le font pas, les citoyens les plus sages devront
se présenter en bergers - Bulletin
of the Atomic Scientists, janvier 2017.
J’espère que vous n’avez pas oublié
de remonter vos pendules la semaine dernière, pas celles qui indiquent le
temps, mais celles de la fin du monde. J’espère aussi que vous ayez cochés
quelques cases sur votre liste de choses à faire avant de mourir, parce qu’il
s’avère que l’énergie nucléaire, le changement climatique, les politiques
nationalistes et la technologie nous aient fait avancer d’un pas de plus vers
l’Apocalypse.
L’Horloge de l’Apocalypse, qui
est réglée par le Bulletin of Atomic Scientists, a été avancée de trente
secondes la semaine dernière, et indique désormais deux minutes et demie
avant minuit. Elle n’avait plus été aussi proche de minuit depuis 1953, alors
que l’Union soviétique testait sa première bombe à hydrogène, neuf mois après
que les Etats-Unis ont testé la leur.
« L’Horloge est
universellement reconnue comme un indicateur de la vulnérabilité du monde face
aux catastrophes, depuis les armes nucléaires jusqu’au changement climatique,
en passant par l’émergence de nouvelles technologies dans divers domaines. »
- Bulletin
of Atomic Scientists
L’Horloge de l’Apocalypse a été
avancée de 30 secondes parce que le groupe de scientifiques estime qu’en
2016, le paysage global s’est assombri à mesure que la communauté internationale
a manqué de répondre aux crises existentielles les plus pressantes de l’humanité :
les armes nucléaires et le changement climatique.
Le bulletin reconnaît que les
perspectives de changement climatique n’ont pas changé au cours de l’année
dernière, mais s’inquiète du manque d’action. Il mentionne également son
inquiétude face à la technologie et certains domaines d’évolution
technologiques susceptibles de représenter une menace pour l’humanité. En 1947,
il mentionnait une technologie susceptible de détruire la planète : le
nucléaire. Aujourd’hui, il en existe plusieurs.
Ce sont cependant les élections
présidentielles aux Etats-Unis et les commentaires du président Trump qui
semblent avoir poussé les scientifiques à avancer l’Horloge. Le bulletin
mentionne la montée du nationalisme apportée par l’élection de Trump, et s’inquiète
des positions de Trump quant aux armes nucléaires et au changement
climatique.
Bien que les codes d’accès
nucléaires et le changement climatique n’aient pas tant concerné le
président, ce n’est pas la première fois que des termes apocalyptiques ont
été utilisés depuis son arrivée au pouvoir. Trump s’est même fait un plaisir,
à l’occasion de son discours d’investiture, de dépeindre le « carnage
américain » qu’il perçoit aujourd’hui au travers des Etats-Unis.
Les scientifiques contre
Trump
Le bulletin stipule clairement
qu’il se concentre normalement sur les tendances de long terme (et non sur le
comportement d’un président qui pourrait n’être au pouvoir que quatre ans),
mais :
« …les déclarations d’une
seule personne – notamment celle faites avant son investiture – n’ont pas
historiquement influencé notre décision d’avancer l’Horloge de l’Apocalypse.
Mais le déclin de la
confiance du public en les institutions démocratiques chargées de gérer les
menaces globales affectent la décision de notre conseil. Et cette année, les
évènements qui ont accompagné les élections présidentielles aux Etats-Unis –
dont les cyber-attaques et l’apparente intervention de la Russie dans le
processus électoral – ont remis en question la démocratie américaine et les
intentions de la Russie, et mis le monde plus en danger qu’il ne l’était l’année
dernière. »
Cette décision du Bulletin of Atomic
Scientists est une affirmation, comme l’explique Lawrence Krauss, directeur
du conseil des commanditaires du groupe. « Six jours après son
investiture, ses actes parlent déjà plus que ses paroles, et nous souhaitons
que les gens comprennent que nous n’avançons pas dans la bonne direction ».
Absence de faits et
narcissisme moral
Nous avons abordé hier
les actualités alternatives du gouvernement. Le Bulletin of Scientists s’inquiète
également des effets d’une telle hyperbole sur les décisions relatives aux
menaces existantes :
« Des hommes et des
femmes instruits nous ont un jour dit que les politiques publiques ne s’établissent
pas en l’absence de politique. Mais en cette année peu habituelle, nous avons
un corollaire à proposer : les bonnes politiques prennent la politique
en compte, mais ne laissent jamais de côté les expertises. Les faits sont
têtus, et devront être considérés si nous voulons préserver l’avenir de l’humanité
sur le long terme. Les armes nucléaires et le changement climatique sont
précisément le genre de menaces complexes qui ne peuvent pas être gérées sans
l’accès au savoir des experts. »
Il y a ici un élément évident de
narcissisme moral, et des deux côtés – Trump, et les scientifiques. Les deux
camps pensent en savoir plus que l’autre, et se pensent plus aptes que l’autre
à influencer les politiques établies.
Nassim Taleb a écrit sur ce
phénomène sur son blog, Intellectuals
but Idiots, et nous dit que « cette classe d’experts paternalistes
et semi-intellectuels sortis de l’Ivy League ou de Cambridge pense pouvoir
nous dicter 1) quoi faire, 2) quoi manger, 3) comment parler, 4) comment
penser et 5) pour qui voter.
Les mots de Taleb sont peut-être
un peu durs, mais ils nous expliquent clairement comment des groupes de
pensée autoritaires tels que le Bulletin of Scientists peuvent eux-mêmes
avoir encouragé des politiques nationalistes et mis Trump au pouvoir.
Il nous est aussi nécessaire d’observer
le point de vue de Trump, qui se trouve renforcé par ceux qui gravitent
autour de lui. Les gens n’ont pas tendance à penser que ceux qui influencent
la politique cherchent à prendre soin d’eux et à s’occuper de ce qui importe
vraiment pour la vie de tous les jours.
Dans I Know Best, Roger
Simon nous écrit que « c’est ce genre de narcissisme de groupe qui en
pousse certains à se penser meilleurs qu’ils ne le sont vraiment, parce qu’ils
ont les mêmes idées reçues et conventionnelles que leurs semblables. C’est un
système de récompense mutuelle ».
Tout est question d’incertitude,
et pas de prophétisme de l’Apocalypse
Nous pourrions dire que les
mises en garde des scientifiques et le narcissisme moral de même degré dont
fait preuve Trump lorsqu’il se dit vouloir travailler pour le peuple sont
contreproductifs. Voici ce que nous en dit Will
Boisvert :
« Le prophétisme de l’Apocalypse
distord systématiquement notre compréhension du risque, et nous hypnotise par
des scénarios sensationnels qui nous distraient des risques mondains qui sont
objectivement plus importants. Pire encore, il peut amoindrir plutôt que
galvaniser les efforts de résoudre les problèmes globaux. En observant les
risques comme étant infinis, il devient plus difficile de les mesurer, le des
prioriser et de les équilibrer, ou encore de contenir les plus petits afin de
mitiger les plus gros. La conséquence peut en être une paralysie. »
Je suis tout à fait d’accord. La
décision d’avancer l’heure indiquée par l’Horloge de l’Apocalypse a beaucoup
fait parler d’elle, mais à quelles fins ? Cette information nous
apprend-elle autre chose que le fait que ce groupe de scientifiques n’apprécie
pas Trump ? Le commun des mortels n’en tire aucune information utile.
Anders Sandberg, chercheur au
Future of Humanity Institute de l’Oxford Martin School, à l’Université d’Oxford,
écrit
sur les conséquences de ces distorsions pour les tentatives de classifier ces
dangers et sur notre perception du risque. « Il y a de fortes chances qu’au
moins une de ces prédictions se trompe. Il est peut-être plus utile de
prendre en compte l’incertitude. »
Sandberg a raison, mieux vaut
considérer le niveau d’incertitude à un moment donné, ainsi que les risques
connus. Nous ne connaissons véritablement les risques qu’après-coup, et il arrive
bien souvent que nous ne parvenions pas à en déterminer la cause ou le
catalyseur.
Ce que nous savons, c’est que
rien n’est certain, et qu’il semblerait que nous vivions aujourd’hui dans un
monde plus incertain que jamais. Ce que nous savons également, c’est que l’or
et l’argent enregistrent d’excellentes performances en période d’incertitudes
accrues, et qu’ils pourraient être forcés à la hausse par la présidence de
Trump et les mouvements des plaques économiques tout autour du globe.
Face à l’incertitude,
achetez de l’or
Un peu plus tôt cette semaine,
nous avons publié un résumé de Reassessing the Role of Precious Metals As
Safe Havens – What Colour Is Your Haven and Why?, par le Dr. Brian Lucey
et Sile Li, du Trinity College et de l’école de commerce Trinity, à Dublin,
qui se penche sur les propriétés des valeurs refuges que sont les quatre
métaux précieux (or, argent, platine et palladium) contre celles des actions
et obligations, dans onze pays.
Dans cette étude, les auteurs
ont tenté d’identifier les déterminants politiques et économiques robustes des
propriétés de valeur refuge des métaux précieux. Ils en concluent que « les
incertitudes en matière de politiques économiques sont un déterminant positif
et robuste du rôle des métaux précieux en tant que valeurs refuges,
indépendamment des pays ».
Le Bulletin of Atomic Scientists
manque de se pencher sur le système financier, bien qu’il mentionne la montée
du nationalisme comme un facteur clé du risque nucléaire. Je suis d’avis que
les risques économiques devraient toujours être pris en considération.
Et je ne suis pas le seul. Reuters
a récemment rapporté que l’or est devenu la valeur refuge favorite de
certains gestionnaires de fonds de Wall Street :
Certains des plus gros
gestionnaires de fonds de Wall Street ont misé sur l’or face aux méthodes
employées par le nouveau président américain et les élections imminentes en
Europe, qui devraient générer davantage de volatilité sur les marchés et
renforcer le rôle du métal en tant que valeur refuge.
Les gestionnaires de fonds
de chez IVA, Ridgeworth et Fidelity comptent parmi ceux qui ont adopté une
position haussière sur l’or, à une heure où le VIX, l’indice de volatilité de
Wall Street, est au plus bas sur deux ans face à une reprise du marché
boursier qui a fait grimper le S&P500 de 6,5% depuis les élections de
novembre.
Conclusion – l’incertitude
est une bonne chose pour l’or
En guise de conclusion, le Bulletin
of Atomic Scientists stipule que « les délibérations de cette année ont
été plus urgentes que d’habitude. Parmi les sujets qui inquiètent les
scientifiques figue le fait que les chefs d’Etat du monde n’ont pas
suffisamment progressé face aux turbulences continuelles ».
Je suis d’avis qu’il en va de
même pour le système financier et le désastre systémique global qu’il est
devenu ces quelques dernières années. Comme je l’ai déjà dit suite à l’élection
de Trump, je m’attends à une forte dose d’incertitude et de volatilité au
cours des mois et années à venir. Bien que nous ayons maintenant une idée de
la méthode de gestion gouvernementale de Trump, les inconnues restent
nombreuses aux Etats-Unis comme dans le reste du monde.
Les investisseurs devraient
ignorer le narcissisme moral des élites, des politiciens et des scientifiques,
et se préparer à l’incertitude à venir en diversifiant leur portefeuille sur
l’or et sur l’argent. Ces dernières années et au fil des âges, les deux
métaux précieux ont protégé les investisseurs et les épargnants face à l’incertitude,
économique comme politique.