Je me demande quel sera le
coût de la défiance dont fait aujourd’hui preuve la Grèce en relation à ce qu’il
lui aurait coûté de repousser sa dette dès le départ. Il faudra peut-être
attendre un certain temps pour que quelqu’un fasse le calcul, mais soyez
rassuré, cette statistique politiquement volatile sera utile à l’approche des
prochaines élections dans le pays.
Les créditeurs de l’euro, il
est intéressant de le noter, pourraient dire que la privatisation des actifs
gouvernementaux grecs a coûté 3 milliards d’euros – ce qui ne représente
qu’un paiement d’intérêts dans l’état actuel des choses.
Il a toujours été compris par
les esprits financièrement sophistiqués que la dette était l’outil de
l’asservissement des emprunteurs. Je ne suis aucunement endetté, mis-à-part
pour ce qui concerne mes comptes à régler au jour le jour. Le vieux dicton
qui veut que « si je vous dois un million, vous êtes propriétaire de ma
personne ; mais si je vous dois un milliard, je suis propriétaire de la
vôtre » ne fonctionne que si vous disposez des forces nécessaires à vous
assurer cette réalité. Personne ne va demander à ce que soient saisis les
Etats-Unis. Mais Lehman Brothers a été autorisée à faillir.
Les banquiers qui se trouvent
en haut de la chaine alimentaire l’ont compris depuis des siècles. Si vous
devez un milliard de dollars à une banque, cette banque la propriétaire de
votre personne, de votre famille et de leurs enfants. Parce que pour
satisfaire un créditeur, si vous ne pouvez plus payer, vous devenez son
esclave et n’avez plus aucun mot à dire de quoi que ce soit. Votre seule
échappatoire est une déclaration de banqueroute, qui impose un préjudice de
disqualification persistant (une période de rédemption de sept ans non
réductible).
Alors que les cœurs brisés
viennent hurler leur outrage au plan de sauvetage livré par l’Allemagne, qui
nous a jusqu’alors permis d’éviter un effondrement du système financier grec,
et pointent des doigts accusateurs vers la diabolique Goldman Sachs,
j’aimerais poser une question.
Quelqu’un pense-t-il vraiment
que les Grecs ont été forcés de la pointe d’un fusil à mentir pour adhérer à l’euro ?
Ne sont-ils pas impliqués dans cette tragédie souveraine ? Ce ne serait
pourtant pas la première fois qu’un loup en peau de mouton, qu’un cheval de
Troie, aurait été utilisé pour duper les Grecs. Goldman Sachs les a pris pour
cible, percevant l’opportunité représentée par leur désir d’intégrer l’euro.
Réfléchissez réellement à ce
conte de criminels s’unissant pour faire le mal. Comme le veut le code
d’honneur des voleurs, l’un d’entre eux se retrouvera à payer les pots cassés
alors que l’autre disparaîtra à l’horizon. Y-a-t’il un élément de surprise à
côté duquel je sois passé ?
La dette, pour ces emprunteurs
souverains qui ne s’en sont pas encore rendu compte, est l’instrument de
l’asservissement des uns par des entités financières plus puissantes. Si vous
n’appréciez pas l’austérité, n’empruntez pas. Si vous empruntez des fonds que
vous ne pouvez rembourser, blâmez-vous vous-même quand les choses tournent
mal.
J’aurais personnellement jeté
les Grecs sous le bus il y a des années. Ce qui aurait ultimement été un acte
de merci. L’adhésion à l’euro doit être une enclave quelque peu exclusive, où
la participation signifie recevoir le soutien du groupe dans son ensemble, à
moins qu’un Etat membre n’échoue à maintenir les standards financiers requis.
La force du groupe est préservée au travers d’un plancher minimum pour chacun
de ses membres. Rien de plus qu’une simple loi physique.
Tsipras, plutôt que de plier
sous la pression, reniant au passage son engagement au peuple grec, aurait dû
sauter sur l’occasion pour réinstaurer la drachme après la crise. En
acceptant des termes plus onéreux encore que lorsqu’il a commencé sa charade,
il a amplifié le facteur de rétribution des Allemands. Quoi qu’il en soit,
l’austérité est une conséquence naturelle de la mauvaise gestion financière,
et non une condition conférée volontairement par des créditeurs vindicatifs.
Bien que l’opinion de la
droite penche plutôt vers la distribution de leçons d’importance, celle de la
gauche pleure l’absence de compassion. La compassion a sa place dans
l’humanité, mais les mathématiques et la physique en sont dénués. Et la
destruction, dans le monde réel, est l’agent du changement véritable et
durable.
Le fait d’avoir permis à
Lehman Brothers de s’effondrer en 2008 a catalysé une liquidité globale et
des transferts de capitaux, et les actifs les plus endettés ont été placés en
haut de la chaine alimentaire financière pour couvrir le crédit émis. Le
quasi-défaut de la Grèce a engendré un transfert de capitaux et de liquidité
pour ses créditeurs. Tout ce qui pourra être mis de côté le sera, et le
peuple grec sera réduit à l’esclavage au service de Berlin pour les
générations à venir.
Au tour de la Chine
Si nous déduisons de ces
exemples que la dette est en réalité une arme financière brandie par l’élite
financière globale en tant qu’outil de concentration et d’agglomération de
capital, à quoi pouvons-nous nous attendre pour la Chine ? Souvenez-vous
que la crise de 2008 a été précédée par des records sur me marché boursier,
suivis d’une débâcle des actions. En Chine, les évènements actuels semblent
être une répétition du scénario de 2008 aux Etats-Unis. La Chine n’est pas
aussi intégrée à la fraternité bancaire internationale que le sont les
Etats-Unis, et les transferts de capitaux qui ont lieu aujourd’hui sont
peut-être plus un évènement national qu’international.
L’échec le plus persistant de
la dette en tant qu’outil de l’esclavagisme est que les citoyens les plus
pauvres manquent de percevoir que les actions de leur gouvernement sont la cause
d’un renforcement constant des difficultés financières, parce que les prix
grimpent en raison de l’affaiblissement de la devise, et que les taxes
grimpent pour couvrir la dette. Et les citoyens se retrouvent avec moins de
pouvoir d’achat par heure travaillée.
Pour ce qui est de la Chine,
la densité de population pourrait rendre plus rugissantes les vagues de
rébellion, notamment à une heure où internet facilite la dénonciation de la
corruption et de la collusion des fonctionnaires gouvernementaux chinois, qui
s’enrichissent régulièrement aux dépens directs du peuple. Le fait que la
Chine ait récemment reporté des réserves d’or ne correspondant pas aux
chiffres rapportés par les rapports indépendants souligne encore la
persistance de cette corruption.
Si les roues du bus se
détachent en Chine, le pays pourrait sombrer sans une révolution qui forcera
l’arrivée de la démocratie au gouvernement. Ainsi prendra fin l’esclavage du
peuple chinois sous le manteau du communisme. Pour que le peuple se retrouve
asservi par la dette.