L'économie allemande peut bien plonger (de 6 % à 7 % en 2009, selon la Commerzbank), Angela Merkel refuse d'entendre parler de nouveau plan de relance. Malgré les appels insistants du président américain Barack Obama, en amont du sommet du G20 qui se tiendra à Londres, le 2 avril, la chancelière l'a dit et répété : pas question de remettre la main au porte-monnaie et de laisser exploser les déficits publics en Europe. "Elle sait que la peur de l'hyperinflation est la plus forte chez les Allemands", constate Ulrike Guérot, directrice du bureau berlinois du European Council on Foreign Relations.
Car il ne faut pas s'y tromper : le vrai traumatisme économique de l'Allemagne, c'est moins la Grande Dépression des années 1930 que l'hyperinflation de 1923. Et les craintes d'une nouvelle flambée des prix resurgissent à la faveur de la crise. Témoin : la "une" du tabloïd Bild, samedi 21 mars : "Danger d'inflation. Devons-nous avoir peur de l'euro ?" s'interroge, en grosses lettres, le quotidien le plus lu outre-Rhin. En photo, la reproduction d'un billet de 1923, d'une valeur de 50 millions de mark. A l'époque, les prix étaient multipliés par deux tous les quinze jours, précise la légende, et les petits épargnants ont vu leurs économies partir en fumée.
DÉCALÉE
L'Allemagne s'inquiète de voir les banques centrales faire tourner la planche à billets pour soutenir l'économie. En tête, la Réserve fédérale américaine (Fed) qui a annoncé, le 18 mars, vouloir injecter mille milliards de dollars dans le secteur financier en rachetant des bons du Trésor et des titres adossés à des crédits immobiliers. Bref, en monétisant la dette. Ajouté à cela, la multiplication des plans de relance financés à coups de milliards de fonds publics... Rompant avec des années d'orthodoxie budgétaire, l'Allemagne a déjà consacré, à elle seule, 80 milliards d'euros au soutien de son économie. Pour autant, les experts ne croient pas au scénario d'un nouvel épisode d'hyperinflation, avec des taux de plus de 50 %. Ni même à une hausse des prix à court terme. La sonnette d'alarme tirée par certains commentateurs et économistes peut d'ailleurs sembler décalée alors que c'est justement la déflation qui constitue, aujourd'hui, la principale menace.
Mais tôt ou tard, il faudra bien payer l'addition. Après 2010, l'inflation regagnera en vigueur au sein de la zone euro. Selon l'Institut d'économie de Hambourg (HWWI), elle pourrait dépasser les 5 %. "Il ne peut y avoir de sortie de crise indolore", a estimé, pour sa part, Thomas Mayer, chef économiste pour l'Europe à la Deutsche Bank. Or, selon l'expert, "nous avons le choix entre la peste et le choléra : entre la déflation et l'inflation. Je préfère choisir le choléra car les chances d'y survivre sont plus grandes qu'avec la peste".
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