L’année dernière, 22 banques centrales, largement situées à l’est de
l’Allemagne, ont acheté des quantités record d’or depuis 1967, soit l’année
de l’effondrement
du London Gold Pool. Les divers rapatriements de ces
dernières années des lingots appartenant à nombreux pays européens sont un
autre signe indiquant que nous atteignons le terme de 4 décennies de calme
monétaire. Nous pourrions ainsi assister à un changement monétaire le plus
important depuis la fin de la convertibilité du dollar en or
décidé en 1971 par Nixon.
Les États-Unis souhaitent maintenir le statut du dollar le
plus longtemps possible. Ils ont tout intérêt à éviter une ruée vers l’or
comme celle que l’on a connue dans les années 70. Depuis, les banquiers
centraux ont tenté de contrôler les prix des métaux précieux. Cette guerre
contre l’or a démarré il y a presque 100 ans. Mais elle s’est accélérée dans
les années 60 avec la formation du London Gold Pool, une
réserve d’or commune alimentée par les États-Unis, le Royaume-Uni, les
Pays-Bas, l’Allemagne, la France, l’Italie, la Belgique et la Suisse.
Après des réunions des banquiers centraux de ces pays à la BRI, les 8
nations participantes se mirent d’accord pour créer une réserve commune d’or
d’une valeur de 270 millions de dollars. L’objectif était d’empêcher le métal
de dépasser les 35 $ l’once, soit le taux de change fixe mis
en place à l’occasion des accords de Bretton-Woods. Dès que le prix dépassait
ce niveau, de l’or de ces pays était vendu sur les marchés afin d’en faire
baisser le cours.
Cependant, en mars 1968 le London Gold Pool pris fin lorsque la France
signala qu’elle refusait désormais de coopérer. Ce fut ensuite le
début d’un marché haussier long de 13 ans qui permit à l’or de dépasser les 800
$ en 1980.
Aujourd’hui, Washington pourrait envisager de faire à nouveau appel à l’or
pour soutenir la valeur du dollar. Certains initiés américains en appellent
ouvertement au retour du standard or. Le néoconservateur Robert Zoellick,
ancien président de la banque mondiale, a ainsi écrit une lettre ouverte dans
le final atteint en 2010 intitulé « Réintroduisez le standard or ».
Une étude de 2012 a suggéré que le métal jaune pourrait être ajouté au
panier de devises des droits de tirage spéciaux du FMI. L’un
des membres groupe de travail derrière le rapport était Lord Meghnad Desai,
président de l’OMFIF. À l’occasion d’une conférence à Dubaï, il a déclaré :
« Nous pourrions demander à ce que l’or soit intégré aux DTS. Je
pense qu’une telle éventualité est probable. Ce sera plus facile si la Chine
augmente ses réserves officielles d’or. »
La Chine souhaite augmenter ses réserves d’or jusqu’à au moins 8000
tonnes, et ce le plus vite possible. Sur base de son PIB, cela la mettrait
d’égal à égal avec les États-Unis et l’Union européenne. Cela permettrait, en
cas de besoin, d’effectuer une réévaluation de l’or
conjointe USA-UE-Chine afin de soutenir le système financier.
Pékin doit comprendre que les États-Unis pourraient surprendre la planète
entière en décidant d’une réévaluation unilatérale de l’or. WikiLeaks a notamment
révélé un câble envoyé au début de l’année 2010 par Washington à l’ambassade
américaine à Pékin, qui citait un article chinois concernant une telle
dévaluation du dollar : « Si nous utilisons toutes nos réserves en
devises pour acheter des obligations américaines puis qu’un jour la Fed
annonce soudainement que ces 10 $ valent désormais un dollar et que ce dollar
est désormais arrimé à l’or, nous serions alors sidérés ».
Ces dernières années, de nombreux éléments ont montré que la Chine
comprend les « forces obscures » qui font baisser le cours de l’or
à Wall Street. Zhou Xiaochuan, alors gouverneur de la banque de Chine, a
révélé dans un article de 2009 que les Chinois reconnaissent l’hypocrisie
américaine concernant l’or : « Après la désintégration du système
Bretton-Woods dans les années 70, le standard or, qui fut alors en vigueur
pendant un siècle, s’effondra. Sous l’influence de l’hégémonie du dollar,
l’effet stabilisateur de l’or fut alors largement remis en question. La
discussion autour du thème « l’or est inutile » commença à se
disséminer partout dans le monde. Aujourd’hui, de plus en plus de personnes
reconnaissent que la thèse « l’or est inutile » comporte de
nombreux mensonges. L’or est aujourd’hui victime d’un écran de fumée qui fut
mis en place par les États-Unis (qui stocke 74 % des réserves d’or
officielles mondiales) afin de tenir en respect les autres monnaies et de
maintenir l’hégémonie du dollar. » Depuis, la Chine et la Russie
ont arrêté d’acheter des obligations américaines pour augmenter leurs
réserves de lingots.
Clairement, l’or est en train de faire un come-back remarquable dans le
système financier. Un nouveau standard or est en train de se
mettre en place, sans aucune décision formelle. C’est en tout cas ce que
pense Ambrose Evans-Pritchard, un journaliste économique influent du
Telegraph, lorsqu’il décrit les efforts des nations en ce qui concerne l’or.
« Petit à petit, le monde se dirige vers un standard or de facto,
sans aucune réunion du G20 pour l’annoncer. »
Article de Willem Middelkoop (source)