Résumé
Le marché des produits
dérivés n’est pas le produit d’un développement
naturel, comme le suggèrent faussement les économistes
conventionnels qui le dépeignent comme un produit du système
immunitaire du marché, combattant les risques de concentration.
En fait, il devrait plutôt
être considéré comme une mesure défensive de la
part des managers du dollar pour perpétuer leur pouvoir
d’émettre des promesses intenables. Ils espèrent, en
créant une demande infinie de Bons du Trésor, pouvoir
prévenir une augmentation des taux d’intérêts et,
par implication, celle des prix. Cependant, ces managers du dollar jouent
avec le feu. Les taux d’intérêts peuvent continuer
à chuter et entrainer les prix avec eux. Cela crée une
déflation et une dépression qui se répandent aux Etats-Unis
et partout dans le monde.
La
Pyramide d’Exter
John Exter, le
« gnome » de six pieds de haut de la Réserve
Fédérale de New York et ancien gardien de l’or
enregistré et enfermé dans le coffre-forteresse de la rue de la
Liberté à Manhattan est surtout connu pour son modèle
d’offre de la monnaie représenté par une pyramide
inversée. Exter appartient à une école de pensée
qui enseigne que l’expérimentation actuelle de monnaie
non-convertible est plus susceptible de conduire à une catastrophe
déflationniste qu’à une catastrophe inflationniste.
La pyramide inversée se balance
délicatement sur une base en or pur. Ses étages
supérieurs sont formés de monnaies de plus en plus prolifiques
telles que les créances de la Banque Fédérale, les Bons
du Trésor, les comptes d’épargne et autres
créances bancaires. Les étages sont notés en fonction de
leur degré de sécurité, en allant du plus sûr,
donc l’or, au moins sûr au sommet, les dollars
électroniques.

Alors qu’elle semble placide,
statique et monolithique, la pyramide revient à la vie de temps en
temps quand une crise monétaire ou bancaire apparait dans le monde. Il
y a alors une grande commotion et une grande agitation manifestées par
une chute brutale des actifs vers des étages plus stables et moins
labiles dans une recherche vers plus de sécurité de la part de
détenteurs de titres, -comme cela a été le cas de plus
en plus fréquemment au vingtième siècle, et en
particulier au court de son dernier quart, après que le gouvernement
des Etats-Unis a dénoncé unilatéralement son obligation
de convertibilité envers les gouvernements étrangers en 1971.
La pyramide est déflationniste
car, bien qu’ayant un taux de croissance à deux chiffres, elle
menace de s’écrouler sur ses niveaux inférieurs en raison
de crises monétaires répétées.
La
révolution des produits dérivés
La pyramide d’Exter jette une ombre
immense qui progresse à une vitesse encore plus grande que la pyramide
elle-même, telle que l’on peut imaginer l’ombre de
n’importe quelle pyramide grandir à la lumière du coucher
de soleil.
Ne vous y trompez pas, le soleil se
couche sur des dollars non-convertibles en or. L’ombre n’est que
celle du marché des produits dérivés et son sommet est
fait de bons du Trésor obligataires du gouvernement américain,
suivis de couches de produits dérivés du taux
d’intérêt dont la qualité dépend de leur
distance au sommet. De manière plus détaillée, on peut
appeler son sommet le premier étage, c’est celui des bons du
Trésor, le second celui des contrats de futures basées sur le
rachat des bonds ci-dessus. Le troisième étage est celui des
futures basées sur le rachat d’obligations appartenant au second
étage. Et etc. Le Nième niveau est constitué de contrats
basés sur le rachat d’obligations du niveau N-1. On voit donc
bien que les bons du Trésors peuvent liquider toutes les
créances. Ainsi on construit une pyramide de créances que
l’on autorise à croître sans aucune limite et pouvant
atteindre n’importe quelle taille, tant que N croit, sur une offre
limitée de bons du Trésor.
Ainsi que Floyd Norris
l’écrivit dans le New York Times du 26 Octobre 2007 (voir
l’article intitulé « Qui va prendre du poids au
niveau financier ? »),
« le transfert du risque était supposé
être la grande avancée apportée au monde par les
ingénieurs financiers qui ont développé un certain
nombre de produits produits dérivés exotiques permettant de réduire
le risque en le saucissonnant de diverses manières. Les risques ont
été transférés dans une nature sauvage de
futures : options, swaps, swaptions et moyens d’investissements
spécialisés, obligations nanties par crédits, conduits
d’intérêts variables, et qui sait quels autres instruments
encore. »
Corner sur les vendeurs à
découvert
Mais la Révolution des produits
dérivés possède aussi une autre face. Le marché
des produits dérivés liés au taux
d’intérêts n’est pas très différent
d’un marché fictif de futures sur le maïs qui permet une
vente sans stock et illimitée de la prochaine récolte quelle
que soit sa taille. Bien sûr, il y a des conséquences et un
risque, le corner sur les vendeurs à découvert, – l’exemple classique du
jeu des chaises musicales.
Tous les joueurs sont heureux de jouer
jusqu’au moment où la musique s’arrête.
L’origine et la croissance de la
pyramide d’ombre représente le grand mystère de la
finance du 21ième siècle. Ses couches sont tout
aussi sujettes au dérapage que les couches de la pyramide d’Exter
en temps de crise, en pire. Ceux qui possèdent une position longue
essaient de l’échanger pour une autre dans des étages
inférieurs, plus proches des « choses
tangibles », les bons du Trésor.
L’ennui est que ces étages
inférieurs ne peuvent pas satisfaire la demande potentielle
simultanément. Mais alors pourquoi cette pyramide d’ombre
croît-elle à la vitesse exponentielle de 40% par an ? A ce
rythme, elle double tous les 2 ans et représente actuellement des dettes
de l’ordre de 750 000 milliards de dollars, une somme qui vous
trotte à l’esprit.
Pour comparaison, le PIB des USA ne
représente que 14 000 milliards de dollars et le PIB du monde
entier un peu plus de 60 000 milliards seulement. Quelle peut être
alors la signification de la taille inouïe et du taux de croissance de
la pyramide ?
Réacteur nucléaire de
produits dérivés
Il a été
suggéré que moins de 10 personnes dans le monde comprennent
véritablement la pyramide d’ombre et sa dynamique. On
suggère aussi que 750 000 milliards de dollars ne seraient
qu’une valeur « notionnelle ». Ne vous
laissez pas berner par la sémantique. Chacun des dollars des trois
quats d’un million de milliards de dollars est une véritable dette.
L’emprunteur ne peut pas se soustraire à son obligation de
remboursement, pas plus qu’un émetteur d’obligation
ne le peut, sauf par cessation de paiement. La pyramide d’ombre est une
cachette idéale pour de mauvais crédits. L’or
n’existe pas en quantités suffisantes pour liquider la pyramide
d’Exter, de même, il n’y a pas suffisamment de bons du
Trésor pour liquider leur ombre.
Pourquoi est-ce que les managers
d’une monnaie non-convertible permettent la prolifération de
dettes qui excèdent grandement les moyens de remboursements ?
Comment une construction si malsaine peut-elle naître, continuer
à prospérer, s’accélérer et menacer le
monde entier par une avalanche de cessations de paiements ? La question
est taboue par ordre du gouvernement, que les économistes pusillanimes
ne sont que trop inquiets d’observer. Mais la science monétaire
a une réponse. L’Université de l’Etalon-or est
fière de violer le tabou.
La futilité du contrôle des
prix
Le dollar non-convertible n’est pas
un standard monétaire stable. Comme toutes les monnaies
non-convertibles de l’histoire, le dollar fait face à des
ruées périodiques qui se terminent de façon ultime par
une perte totale de sa valeur. Le pouvoir d’achat du dollar est
miné par les augmentations incessantes des prix. Tant que
l’augmentation moyenne des prix peut être contenue, les gens ne
se préoccupent pas trop de la dévaluation de leur monnaie. Ils
sont bernés, car on leur dit que ce qui monte finira par redescendre.
Le problème se résume donc à savoir si le gouvernement
peut contenir l’augmentation des prix disons, aux alentours de 3% par an.
Limiter les prix administrativement par
un contrôle des prix n’est pas une alternative viable. Des
marchés noirs feraient leur apparition et les gens
considèreraient les prix du marché noir comme les prix
« réels » au détriment de ceux du
marché contrôlé dont l’approvisionnement serait,
soit restreint soit de qualité inférieure.
Le gouvernement doit recourir à
d’autres méthodes plus sophistiquées. Alors, il
tente de prendre contrôle des prix en prenant avantage d’un
soi-disant « lien » (le paradoxe de Gibson), entre les
prix et les taux d’intérêt, phénomène bien
observé mais mal compris. Aucun des deux paramètres n’est
vraiment libre de se mouvoir indépendamment de l’autre en particulier,
l’un ne peut pas s’enfuir et laisser le second perdu loin
derrière, sauf le temps d’un chassé croisé.
La tâche que le gouvernement doit
mener à bien est malgré tout dissuasive. Dans un
scénario inflationniste, il n’est pas suffisant de
contrôler les taux d’intérêts à court terme.
Pourtant, c’est la seule chose que la banque centrale a les moyens de
faire : elle est assez démunie pour agir sur les taux à
long terme. Alors, le gouvernement a recours à un trucage: il essaie
d’enrôler les spéculateurs d’obligations pour
l’aider à maintenir les taux d’intérêts bas
en les laissant enchérir sur les prix des bons du Trésor.
Rendre la spéculation sur les
obligations sans risque
Mais comment le gouvernement parvient-il
à persuader les spéculateurs d’obligations,
peut-être les plus fins financiers, à enchérir? Eh bien,
c’est justement cela le truc. Le gouvernement doit rendre la
spéculation à la hausse sur les obligations sans risque. C'est
beaucoup demander. Comment déclencher l’impulsion de
départ ?
Voici comment. Les spéculateurs
sont encouragés à emmagasiner de larges stocks de bonds du
Trésor et à « couvrir » leur position sur
le marché des futures. Voici la partie intéressante. En effet,
une couverture simple ne suffit pas. Les couvertures doivent être
couvertes aussi.
En
fait, le gouvernement légalise les ventes illimitées à
terme de bons du Trésor sans couverture et crée ainsi une
demande illimitée de ceux-ci. Les demandes en bons du Trésor
sont censées tirer les taux d’intérêt
à long terme à la baisse. Pour éviter le danger
d’une baisse des taux d’intérêts se
répercutant sur les prix, la banque centrale se tient prête
à arroser le déclin des prix avec de la liquidité.
L’incendiaire se déguise en pompier.
En l’absence d’une vente
illimitée sans couverture, la valeur des obligations libellées
en dollars devrait être dévastée bien avant le dollar
lui-même. Mais comme la récente crise des subprimes l’a
démontré, ce n’est pas ce qui arrive. Il y a un effet de
ricochet à peine tangible sur le marché obligataire même
après l’ébranlement de la valeur du dollar. La couverture
des obligations fonctionne. La valeur des obligations peut être
isolée des vicissitudes du dollar grâce à la structure
stratifiée de la pyramide de l’ombre.
A suivre…
Antal E. Fekete
Professor, Intermountain Institute of Science
and Applied Mathematics, Missoula, MT 59806, U.S.A.
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