Les banquiers centraux se
nourrissent-ils d’illusions ?
Ce weekend, Benoît Cœuré, membre
du directoire de la BCE, a fait danser sa plume pour défendre les politiques
de la BCE face aux arguments selon lesquels les taux d’intérêt négatifs
nuiraient aux épargnants.
Le premier paragraphe révèle
assez clairement à quel point la BCE est désorientée quant à l’efficacité de
ses politiques.
La BCE est-elle têtue parce qu’elle
adhère à ses politiques monétaires malgré les critiques ? Non. Nous nous
efforçons d’effectuer la tâche qui nous a été confiée. Les traités de l’Union
européenne ont donné à la BCE un mandat assez étroit de stabilité des prix.
En 2003, le conseil de direction de la BCE a expliqué que l’inflation, en
zone euro, devrait demeurer inférieure, mais proche de, 2% sur le moyen
terme.
Si c’est là le mandat donné à la
BCE, elle devrait repenser ses politiques actuelles. Comme nous l’avons noté
ce weekend, ses quatre programmes de taux d’intérêt négatifs et ses
programmes d’assouplissement quantitatif de plus de 600 milliards d’euros ne
sont même pas parvenus à établir une inflation de 0%.
 
Les programmes d’assouplissement
quantitatif et de taux d’intérêt négatifs ont vu le jour en 2013, après la
crise bancaire en Union européenne. En observant le graphique ci-dessus,
pouvez-vous percevoir une hausse significative de l’inflation suite à la mise
en place de ces politiques ?
Le mouvement le plus important
enregistré depuis un creux jusqu’à un sommet du marché s’est produit entre
janvier 2015 et mai 2015, alors que l’inflation passait de -0,6% à 0,3%, soit
une hausse de 0,9%. Il a été enregistré après l’annonce par la BCE de son
premier programme historique d’assouplissement quantitatif.
 
La mise en place d’un programme
d’assouplissement quantitatif d’un trillion d’euros, qui des années durant a
été considéré être un programme nucléaire pour l’Union européenne, a produit
une hausse de 0,9% du taux d’inflation, qui a duré en tout et pour tout cinq
mois.
C’est là le plus grand succès de
l’Union européenne, malgré l’adoption de certaines des politiques monétaires
les plus extraordinaires de l’Histoire… Une hausse de l’inflation de moins d’1%.
Qui a duré moins de la moitié d’une année.
Depuis lors, la BCE a mis en
place quatre programmes de taux d’intérêt négatifs, qui ont certainement eu
des conséquences négatives sur les épargnants. En termes simples, alors même
que la BCE poursuit ses rêves monétaires en se basant sur des hypothèses (des
modèles économiques selon lesquels l’inflation devrait grimper parce que les
taux d’intérêt sont négatifs), elle ignore les réalités économiques.
Quelles sont ces réalités ?
Les taux d’intérêt négatifs
ne sont pas inflationnistes. Au contraire, ils sont fortement
déflationnistes.
Comme M. Couere le note lui-même,
« les gens ne sont pas que des épargnants ». Le problème avec cette
déclaration, c’est que bien qu’il reconnaisse le fait que les gens soient
plus que des unités économiques, il ne parvient pas à comprendre que les gens
réagissent psychologiquement aux politiques de la BCE.
Les taux d’intérêt négatifs sont
aussi bien une taxe sur les revenus en intérêts futurs que sur le capital
actuel. Ils devraient nous faire peut à tous, parce qu’ils sont une garantie
de perte d’argent.
La psychologie humaine
de base révèle que les gens ont plus peur de perdre ce qu’ils ont déjà que de
gagner quelque chose qu’ils ne possèdent pas. Les taux négatifs garantissent
cette dernière option.
Les chances que quelqu’un qui
ait fait l’expérience de taux négatifs croit que la solution est d’accumuler
des actifs à risque (qui représentent des chances plus grandes encore de
perte de capital) sont de moins d’1%.
C’était particulièrement vrai en
2014, alors qu’une majorité des actions européennes ont atteint un plafond suite
à l’adoption de taux négatifs par la BCE.

Les actions européennes ne sont
pas un pari sans risque après la mise en place de taux négatifs. Et pourquoi
un épargnant quelconque souhaiterait-il acheter des obligations souveraines
sont les rendements sont négatifs ? Si vos dépôts souffrent déjà des
taux négatifs, acheter des obligations souveraines qui vont font verser des
intérêts de fait absolument rien si ce n’est augmenter votre volatilité.
Qui pourrait souhaiter se
retrouver dans une telle situation ?
Finalement, la BCE, comme toutes
les autres banques centrales, ne se soucie que d’une chose : la bulle
sur les obligations.
Et parce que la dette de l’Union
européenne représente 90% de son PIB, elle est elle-même en banqueroute.
Quatre épisodes de taux négatifs et un trillion d’euros d’assouplissements
quantitatif n’y feront rien.
 
Tout cela devrait éventuellement
nous mener à une répétition de 2008. Parce que la BCE a échoué à générer une
inflation significative, et parce que la plupart des nations de l’Union
européenne ont vu leur ratio dette : PIB grimper depuis 2012, nous n’en
sommes plus très loin.
La prochaine crise nous attend
au tournant. Et elle donnera à 2012 des airs de plaisanterie.
|