La situation
socio-économique actuelle de la France est en train d’atteindre
un point critique. Face à la crise financière et à un
monde qui change, le gouvernement ne voit d’autre solution que le
renforcement d’un modèle basé sur l’imposition et
l’interventionnisme. Or, ce modèle a pratiquement atteint son
paroxysme, au point que toutes les factions politiques de droite comme de gauche
montrent leur désaccord explicite. Même les membres du parti socialiste
et ceux du gouvernement ont du mal à cacher les dissensions internes
face à la débâcle de la politique actuellement en place.
Plus
surprenantes sont les preuves de l’attachement historique du peuple
français à la propriété privée et à
la liberté d’entreprendre. Le temps des vraies réformes
et non des simulacres réformistes, est sans doute enfin arrivé.
Néanmoins,
celui qui pense qu’un ensemble de réformes profondes et
complexes pourrait être immédiatement mis en place se trompe
énormément. Car si les Français convergent vers un refus
de la fiscalité et de l’interventionnisme, ils ne convergent pas
encore visiblement sur la question des dépenses publiques à
l’origine de cette fiscalité et de l’interventionnisme en
général. La population n’a pas encore fait le lien entre
les deux choses. Même les plus radicaux qui souhaitent la
répudiation pure et simple de la dette publique oublient souvent
qu’il ne sert à rien de la répudier si les circonstances
de son avènement restent présentes. Il ne suffit pas de
répudier la dette, il faut répudier les déficits de tout
type dès le départ.
Autre facteur susceptible
d’empêcher un mouvement réformiste est le fait que la crise sociale
n’a probablement pas encore atteint son point critique. Par
conséquent, tout projet de réforme de grande ampleur sera
confronté au blocage imposé par des groupes
d’intérêt minoritaires, assez puissants pour montrer leur
« détresse » et faire appel au sentimentalisme
du peuple. En effet, tant que la majorité de la population ne se
trouve pas menacée elle-même par la crise, elle restera émue
par le chagrin des groupes bénéficiaires des rentes publiques affectés
par les réformes.
Ce point doit
attirer notre attention sur cette dichotomie
liberté-sécurité. Aujourd’hui, le désir de
réformes concerne essentiellement la liberté fiscale, la
liberté d’entreprendre, la liberté de travailler.
Cependant, recouvrer ces libertés suppose forcément de restreindre
la liberté de ceux qui profitent justement du manque de liberté
de la majorité de la population et bénéficient
d’une rente. Car ce qui limite les libertés de travailler,
d’entreprendre et de bénéficier des fruits de son travail
sont évidemment le poids de l’État, ses dépenses,
son train de vie.
Ceux qui auraient
tendance à se focaliser sur les fonctionnaires se tromperaient de
cible. Car s’il est vrai que le nombre des fonctionnaires est un aspect
frappant de la lourdeur étatique, il est dépendant d’autres
éléments plus importants.
D’un
côté, nous avons des élus qui cumulent les postes et les responsabilités.
Le problème n’est pas tant le cumul en soi, mais les structures
administratives mises en place dans le seul but de le justifier. Ces
structures tendent à employer le fonctionnariat à des
tâches dont l’utilité sociale reste ambigüe. En
effet, des postes et des dépenses sont créés dans le
seul but de justifier une administration et ses mandats. Rien d’étonnant à
ce que le poids des administrations territoriales représente ainsi une
bonne partie de la lourdeur étatique actuelle puisqu’elles
servent justement à justifier ces cumuls.
De
l’autre, nous avons les entreprises et les associations qui
n’existent qu’en vertu de la demande étatique pour leurs
produits. Il s’agit là d’organisations qui ne participent
pas vraiment au jeu du marché car elles n’offrent rien au grand
public. Leur seul demandeur est l’État. Ceux qui pensent que
leur intégration dans le marché est assuré par
l’utilisation des ressources présentes dans le marché se
trompent. En fait, ces ressources sont détournées d’un
usage plus socialement utile. Elles auraient pu rester disponibles aux
organisations et individus qui produisent pour d’autres organisations
et individus en dehors de l’État.
Soulignons
aussi que les fonctionnaires compétents et potentiellement efficients
auraient tout à gagner d’une réforme de l’État.
Les réformes obligeraient ce dernier à gagner en
efficacité et à faire usage des capacités
aujourd’hui gaspillées dans une bureaucratie qui n’a
aucune raison d’être. Malheureusement, ces fonctionnaires
compétents sont souvent amalgamés aux incompétents.
Pire, les compétents eux-mêmes ne voient pas qu’il
n’y a aucune fatalité à ce que leur destin soit le même
que celui de personnes qui s’autorisent à rester incompétentes.
La population quant
à elle a tendance à amplifier les risques de ceux qui profitent
de la restriction de ses libertés. Pourtant, la perte de leur
sécurité étatique n’implique pas la perte totale
de sécurité. Aujourd’hui, ils se trouvent assignés
à des tâches qui souvent ne leur permettent pas d’exprimer
leur réelle compétence. Dans un monde
où les capitaux des riches et des pauvres seraient plus abondamment
disponibles, où les entreprises pourraient se former et
s’épanouir plus facilement, et où les travailleurs pourraient
offrir leurs services sans crainte d’un manque des postes, leur
sécurité serait toujours assurée.
C’est
seulement quand la population arrêtera de penser que leur
liberté est dépendante de la perte de sécurité
des autres qu’elle sera prête aux réformes. C’est
seulement quand les citoyens se rendront compte que leur propre
sécurité est en jeu par manque de liberté, que les
réformes seront enfin les bienvenues.
D’où
la question du timing des
réformes. Le timing des réformes dépendra des
circonstances. Si l’idéal est bel et bien de réformer globalement
et immédiatement, un tel projet implique que la situation se soit tellement
dégradée que la population ne voit d’autre solution au
maintien de sa sécurité que celui des réformes. Nous ne
sommes pas encore là. Par conséquent, les réformes devront
être graduelles et ordonnées, sauf à accepter un
délitement social plus profond.
À
suivre
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