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Bruxelles dénonce la TVA réduite des FAI français

La Commission européenne reproche à la France d'autoriser les opérateurs à facturer la moitié de l'abonnement à un taux de 5,5%. Les fournisseurs d'accès redoutent une «catastrophe pour les abonnés».

L'astuce, initiée par Free, a rapidement conquis tous les opérateurs Internet français. Chaque mois, sur les factures, une moitié des abonnements «triple play» est taxée à un taux réduit de 5,5%, au lieu de 19,6%. Accordée par la France en échange d'autres contributions des FAI, cette largesse fiscale déclenche aujourd'hui le courroux de la Commission européenne, qui encadre sévèrement les services éligibles aux taux réduits. «Une mise en demeure a été envoyée aux autorités françaises en mars», a déclaré lundi la porte-parole de la Commission chargée des questions de fiscalité, Emer Traynor, confirmant des informations de La Tribune.

Ce double régime de TVA pour les fournisseurs d'accès à Internet n'a pourtant rien de nouveau. Il remonte à la fin 2003, lors du lancement des premières offres de télévision par ADSL. A l'époque, les FAI ont obtenu que leurs nouveaux bouquets de chaînes puissent être taxés au même taux réduit que les services de télévision traditionnels, considérés comme des biens culturels. En se fondant sur le volume des données échangées sur les réseaux ADSL, l'administration fiscale a alors fixé à 56% la part de la télévision dans l'abonnement «triple play». Ramené par la suite à 50%, ce taux a permis aux opérateurs d'échapper à 200 millions d'euros de taxes tous les ans.

Selon le courrier de Bruxelles adressé à la France, ce montage serait pourtant illégal et violerait sept articles de la directive européenne sur la TVA. Le taux réduit, par exemple, n'est pas censé s'appliquer «aux services fournis par voie électronique» et ne peut pas toucher invariablement la moitié de la facture. En effet, certains clients n'utilisent pas forcément les services de télévision, tandis que d'autres, non dégroupés, n'y ont même pas techniquement accès. La France dispose d'un délai de deux mois pour défendre ses vues ou se mettre en règle, à défaut de quoi Bruxelles pourra lui envoyer un «avis motivé», puis saisir la Cour européenne de justice.

«Plusieurs euros de plus pour les clients»

Chez les opérateurs, on se dit déjà inquiet. Et on agite le spectre d'une hausse de l'abonnement pour compenser la perte de cet avantage. «Si jamais la TVA à taux réduit était supprimée, cela serait une véritable catastrophe pour les abonnés qui bénéficient aujourd'hui d'un prix très, très compétitif en Europe», a réagi Yves Le Mouël, directeur général de la Fédération française des télécoms. Pour le client, «cela représentera plusieurs euros» supplémentaires, a-t-il estimé, en précisant que «cela dépendra de chaque opérateur». Xavier Niel, président d'Iliad (Free), avait déjà laissé entendre que les prix de l'ADSL pourraient augmenter d'ici à la fin de l'année, face à la multiplication des taxes.

Car la remise en cause de Bruxelles intervient alors que le gouvernement avait progressivement compensé l'avantage accordé aux opérateurs sur le versement de la TVA par d'autres prélèvements. Depuis 2008, les fournisseurs d'accès à Internet sont éligibles au compte de soutien à l'industrie des programmes (Cosip), pour lequel ils versent environ 100 millions d'euros tous les ans. L'Elysée envisageait également d'augmenter de 50 à 55% la part du chiffre d'affaires taxé à 19,6%, afin de financer la carte musique jeunes, destinée à soutenir le téléchargement légal sur Internet. Un éventuel réajustement de la TVA s'annonce déjà comme un casse-tête pour équilibrer les comptes.

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