Immobilier : la conjuration de la pierre
2017 qui s'achève aura enregistré des records de ventes dans le logement, accompagnés de fortes hausses de prix.
Par François Vidal
Prix, nombre de transactions, volumes de prêts,… en 2017, l'immobilier a pulvérisé tous ses records ! Et si Paris a joué à plein son rôle traditionnel de locomotive, avec une hausse stratosphérique du prix au mètre carré de près de 6 % sur les douze derniers mois, c'est bien l'ensemble du pays, à quelques rares exceptions près, qui a été saisi d'une frénésie pour la pierre. Un phénomène sans équivalent dans le reste de l'Europe.
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Cette effervescence doit pourtant beaucoup à la Banque centrale européenne. En faisant entrer la zone euro dans l'ère de l'argent facile et bon marché, elle a dopé le pouvoir d'achat de tous les emprunteurs et donc aussi celui des candidats à l'acquisition d'un logement. Mais si l'étincelle allumée par Mario Draghi a mis le feu à l'immobilier hexagonal, c'est que nulle part ailleurs elle n'a rencontré un terrain aussi favorable. Il faut dire qu'il existe dans notre pays une véritable conjuration en faveur de l'immobilier. L'alliance objective de trois acteurs clefs de notre économie, dont l'intérêt convergent est d'assurer coûte que coûte la bonne santé du secteur.
Le zèle des banquiers
Les banquiers constituent le premier pilier de cette entente. Dans un marché bancaire mature, ils ont fait du crédit immobilier leur principal instrument de conquête, l'arme fatale pour arracher des clients à leurs concurrents. Du coup, c'est avec beaucoup de zèle qu'ils ont répercuté la chute des taux d'intérêt et favorisé les demandes de prêts des ménages en allongeant leur durée. Un soutien décisif, puisqu'acheter un appartement ou une maison reste avant tout un montage financier à fort effet de levier.
Les épargnants, ensuite, qui ont investi près des deux tiers de leur patrimoine dans la pierre. Avec un certain succès. A Paris, par exemple, le prix du mètre carré a quasiment doublé au cours des douze dernières années ! Dès les premiers signes d'un rebond du marché courant 2016, les ménages se sont donc rués sur la pierre.
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La poule aux oeufs d'or
L'Etat et les collectivités locales, enfin, pour lesquels le marché du logement est une poule aux oeufs d'or. C'est notamment l'une des seules politiques publiques, dont le bilan financier est largement positif. Car si chaque année, plus de 40 milliards d'aides y sont injectées, les recettes fiscales du secteur dépassent les 60 milliards d'euros. Ce qui a conduit ces deux dernières décennies les gouvernements successifs à empiler les dispositifs d'accession à la propriété, démultipliant ainsi l'appétit des acheteurs au moindre frémissement du secteur.
L'exécutif actuel semble décidé à rompre avec cette tradition. Et c'est tant mieux. Il a déjà fait bouger quelques curseurs en recentrant l'ISF sur l'immobilier ou en s'attaquant aux aides au logement. Mais il faudra faire bien plus pour guérir notre économie de sa préférence pour l'immobilier.
François Vidal