La diplomatie du coup de force
Kim Jong-un et Donald Trump ont-ils enterré la hache de guerre? Trump se targue en tout cas du succès de sa méthode forte.
Kim Jong-un a marqué un point en rappelant un principe clef de la dissuasion : l'arme atomique est un égalisateur de puissance, du faible au fort. Le dictateur nord-coréen a obtenu ce que ni son grand-père, le fondateur de la dynastie des Kim, ni son père n'étaient parvenus à obtenir: une promesse d'une rencontre avec le président de la première puissance mondiale. Un sommet Kim-Trump n'est encore que du domaine du possible tant il reste de conditions à remplir. Mais Donald Trump, en acceptant précipitamment une telle perspective, s'est flatté de la réussite de son attitude agressive à l'égard de Pyongyang qui, à ses yeux, l'a fait plier. Ce n'est pas le seul avantage qu'il pourra mettre en avant. En acceptant la main tendue de Kim, il court-circuite la Chine de Xi Jinping, seul maître du jeu jusqu'à présent vis-à-vis de son protégé nord-coréen. La perspective d'une guerre nucléaire ou conventionnelle est aussi pour Pékin une immense menace. Ce qui sans nul doute l'a contraint à mettre la pression sur Pyongyang en appliquant plus fermement les sanctions internationales. Il n'y a pas qu'en Asie de l'Est où Trump a utilisé la diplomatie du coup de force. Il l'a joué vis-à-vis du Pakistan en suspendant l'aide à ce pays accusé d'attiser la guerre en Afghanistan où des soldats américains continuent à perdre la vie. Même politique du coup d'éclat en reconnaissant Jérusalem comme capitale d'Israël ou encore en Syrie en ordonnant des frappes contre le régime de Bachar al-Assad. Mais si cette attitude permet d'afficher une rupture avec les années plus consensuelles de Barack Obama, elle n'est pas la garantie du succès. La guerre en Afghanistan n'est pas terminée, en Syrie non plus. Le plan de paix américain au Proche Orient est introuvable. Et Kim Jong-un pourrait bien se servir d'un répit pour poursuivre, en secret, son programme nucléaire. La Corée du Nord l'avait déjà fait dans le passé sous la présidence de Bill Clinton. Le coup de force ne fonctionne pas toujours sauf de permettre à Trump de faire preuve de vanité.
Jacques Hubert-Rodier (Editorialiste de politique internationale)