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La Turquie au risque d'une asphyxie financière

+VIDEO. Le scénario d'un « sudden stop », un arrêt brutal des financements étrangers, se met en place en Turquie. Personne n'a à y gagner, mais c'est peut-être déjà trop tard.

Fabien Clairefond pour Les Echos
Fabien Clairefond pour Les Echos

Par Jean-Marc Vittori

Publié le 14 août 2018 à 19:08Mis à jour le 16 août 2018 à 07:51

Ce n'est peut-être qu'une question d'heures. Si la Turquie n'arrive pas à enrayer la chute de sa devise, elle risque de manquer brutalement d'air. Son économie serait alors gravement endommagée. Ses 83 millions d'habitants seraient condamnés à vivre une douloureuse chute de revenus.

Balance courante déficitaire

L'arrêt brutal, le « sudden stop », est un phénomène bien connu. Un pays prometteur attire les capitaux étrangers. Avec cet argent frais, les entreprises investissent allègrement. Souvent, les consommateurs empruntent aussi pour dépenser davantage. La balance courante, qui mesure l'écart entre les entrées et les sorties d'argent du pays, devient de plus en plus déficitaire.

Jusqu'au jour où un événement parfois mineur amène les investisseurs à réviser leurs choix. Ils arrêtent soudainement d'apporter des fonds, voire retirent leurs avoirs. Les banques nationales partent dans le décor. Le pays n'a plus d'autre choix que de rééquilibrer brutalement ses comptes. Il doit donc beaucoup moins dépenser, ce qui provoque une sévère récession.

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VIDEO. Turquie : une économie en danger de 'sudden stop'

Risque de contagion

Si le « sudden stop » est bien connu, c'est qu'il s'est produit à maintes reprises ces dernières décennies. Au Mexique en 1994, en Asie en 1997-1998, en Grèce puis en Espagne au début des années 2010. Le scénario semble hélas se reproduire en Turquie. Avec une croissance de plus de 7 %, le pays a attiré les capitaux en quête de rendements. La brouille entre Washington et Ankara à propos d'un pasteur évangélique américain moisissant dans une geôle turque a joué le rôle de signal d'alarme du côté des acteurs des marchés. La livre turque dévisse. Les entreprises endettées en dollars doivent décaisser deux fois plus de livres qu'il y a un an pour honorer leurs engagements. C'est intenable. Les investisseurs commencent à regarder les autres pays financièrement fragiles, comme l'Argentine et l'Afrique du sud. La contagion menace.

Le président turc Recep Erdogan parle de complot. Mais il a en réalité activement contribué à la crise. D'abord en relâchant la discipline budgétaire. Ensuite en mettant la main sur la banque centrale. Enfin en s'arrogeant des pouvoirs sans précédent dans une grande démocratie. Ces décisions ont logiquement inquiété les créanciers du pays.

Eviter le pire

Il ne reste plus beaucoup de temps pour empêcher une déstabilisation dont tout le monde souffrirait : la Turquie où la population comme les gouvernants ont beaucoup à perdre, l'Europe qui a largement réglé sa crise migratoire par un accord avec Ankara, les pays émergents menacés par la contagion, et même les Etats-Unis pour qui la Turquie est un allié précieux. Seul Recep Erdogan a peut-être encore les moyens d'éviter le pire. Ce n'est pas forcément rassurant.

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