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Chronique

Les affaires sérieuses commencent pour Macron

Après les élections gagnées, le vrai programme d’Emmanuel Macron va se mettre en place. dans un contexte où la règle d’un déficit à 3 % du PIB s’annonce déjà intenable. Certaines promesses risquent d’en faire les frais.

Par Eric Le Boucher (éditorialiste aux « Echos »)

Publié le 22 juin 2017 à 12:53

La campagne politique est terminée. Menée avec fulgurance en un an, elle a donné le résultat inouï que chacun regarde tantôt avec plaisir tantôt avec rancœur mais toujours avec stupéfaction et certitude que ce renversement général restera dans l’histoire de France. C’est fait, nous entrons maintenant dans le dur. Quelques réformes sont déjà engagées : la moralisation de la vie politique , le terrorisme avec la création d’une Task Force , le code du travail, l’Europe protectrice avec la directive sur le travail détaché . Le discours tenu à Viva Tech sur « l’esprit de conquête » confirme le cap d’Emmanuel Macron de « débloquer les règles devenues obsolètes » pour placer la France à l’avant-poste de ce qu’il nomme « l’hyperinnovation » et la mettre sur « un nouveau modèle de croissance ». S’ouvriront vite cet été les autres « chantiers » de son programme , l’éducation et la culture, la refonte de la formation professionnelle .

Le rendez-vous budgétaire de 2018

Pourtant rien de tout cela n’est fondamentalement neuf, rien n’est sérieusement commencé. Le « vrai » programme du président Macron et son agenda sera discuté, cadré, arrêté dans le budget 2018 et dans la loi d’orientation de 5 ans qui doit l’accompagner. C’est cet acte budgétaire qui va obliger à des choix, à un agenda, et, partant, permettre de lever certaines ambiguïtés que le candidat avait laissées ouvertes. Au terme de cette réflexion estivale, nous saurons mieux ce que veut dire son « en même temps », où il situe le curseur entre la droite et la gauche, le libéral et le social, entre le keynésianisme et le rigorisme, entre la concurrence et l’interventionnisme, entre le marché et l’Etat. Même si le personnage veillera à toujours garder l’esprit libre pour nous réserver en permanence des surprises, n’en doutons pas, une partie du voile va se déchirer dans le budget 2018 sur le « mais qui est vraiment Macron ? ».

Le casse-tête des retraites

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La partie s’annonce complexe. Un exemple a été donné sur les retraites . Le candidat avait pris pour base de réflexion des travaux du COR (Conseil d’Orientation des Retraites) qui, l’an dernier, affirmait que les réformes passées avaient été suffisantes et que l’équilibre allait être trouvé dans les années 2020. Las, erreur, l’immigration est plus faible que calculée et la croissance moins bonne. Résultat : l’équilibre est repoussé aux années 2040. Autrement-dit le président Macron va devoir, lui aussi, repousser l’âge de départ. Il ne pourra pas se contenter de préparer, pour dans dix ans, une belle réforme à la suédoise, d’une retraite par points. Comme on dit au restaurant, la douloureuse arrive dès l’entrée.

Le déficit dérape

En fait, le cas est général. La Cour des Comptes rendra un état des lieux en fin de mois mais on en sait déjà la couleur : les finances publiques sont plus dégradées que le rose Sapin ne le disait. Le déficit serait cette année autour de 3,8% et non de 3,4%, avec de surcroît une tendance mauvaise. Heureusement, la croissance apporte de son côté des bonnes nouvelles, le PIB va croitre de 1,6% dit l’Insee, les recettes s’en porteront d’autant mieux. Mais cela ne suffira sans doute pas. Le programme du candidat n’était pas irréaliste mais il passait « tout juste » pour suivre la ligne stratégique fixée de respecter nos engagements européens et redescendre à 3% dès cette année. La Cour des Comptes, en réintégrant des dépenses mises sous le tapis et en assumant les promesses faites par François Hollande (dégel du point des fonctionnaires…) va montrer que l’équation est en vérité insoluble .

Est-il possible de plaider auprès des Allemands un débord de déficit ? La tentation sera grande, Mme Merkel fait en ce moment beaucoup de pas vers la France concernant l’Europ e (elle accepte un ministre européen des finances et un budget), il ne s’agirait que d’un pas de plus. Le rigoriste ministre Wolfgang Schaüble pourrait avoir à abandonner son poste après les élections. La question est de savoir ce que penseront le premier ministre et le ministre des finances. Mais à l’heure qu’il est, je parie que le président ne va pas dévier de sa ligne européenne, socle de sa crédibilité à l’extérieur. Et c’est très sûrement, au regard de l’histoire cette fois européenne, ce qu’il faut faire.

Cibler la réduction des dépenses

Mais cela signifie un renvoi de certaines promesses . La transformation du CICE en baisse des charges ou la suppression de la taxe d’habitation ? Qui privilégier ? Les entreprises ou les ménages ? La tentation sera de faire comme hier, finasser et rogner. J’espère que le président qui a annoncé « faire des choix », « cibler et sélectionner » les dépenses n’y succombera pas et va forcer son gouvernement à trancher net. Edouard Philippe va affronter une pluie d’ennuis.

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