Nick Gillespie est
l'éditeur de Reason.com et Reason.tv et il a été le
rédacteur en chef de Reason Magazine
de 2000 à 2008, un journal libertarien vendu
en kiosque aux États-Unis. Il vient d’écrire avec Matt Welch un livre dont le titre rappelle Thomas Jefferson et
la Déclaration d’indépendance : The Declaration
of Independents: How Libertarian
Politics Can Fix What's Wrong With America.
Dans sa
conférence à la FreedomFest, il a
invité chacun à déclarer son indépendance, non
pas vis-à-vis d'un pays ou d’un gouvernement, mais
vis-à-vis des grands partis politiques qui se partagent le
« butin » depuis trop longtemps.
Un constat amer
Dans
un monde où les gains mutuels réalisés grâce aux
échanges commerciaux des cinq dernières années ont
permis à un demi-milliard de personnes de sortir de la
pauvreté, Gillespie rappelle que la politique est au contraire un
« jeu à somme nulle », où les politiciens
élus dépensent l'argent des autres dans le seul but de
préparer leur réélection.
Une
majorité croissante d’électeurs a répondu à
ce spectacle dégradant en faisant un choix rationnel : ils ignorent
délibérément la politique la plupart du temps et ils
préfèrent se divertir, à la recherche de leur propre
bonheur.
Il
n’est plus possible d’ignorer aujourd’hui la force
destructrice de la politique car nous nous rapprochons d’une possible
faillite des États providence. La dette nationale américaine a
ainsi passé la barre des 14 000 milliards de dollars, soit
environ ce que produit l’économie américaine chaque
année. Au moins 48 des 50 États américains enregistrent
des déficits, beaucoup d'entre eux sont abyssaux.
L’aube des
indépendants : les libertariens et le
mouvement Tea Party
Selon
Gillespie, le seul grand groupe politique américain qui a
montré une croissance constante au cours des quatre dernières
décennies est le bloc qui n'achète plus ce que vend la
politique professionnelle : c’est le bloc des indépendants.
L'indépendance
politique a des vertus individuelles. Penser par soi-même
nécessite beaucoup plus de travail que de se laisser guider par le
comportement et l’opinion des autres.
Les
électeurs libres de toute affiliation à un parti sont plus
enclins à considérer les revendications politiques des
élus ou des candidats avec le scepticisme qu'elles méritent.
Parmi
les indépendants, on trouve les libertariens.
Ils sont fiscalement conservateurs et socialement libéraux. Gillespie
se réfère au Pew Research Center for the People & the Press Depuis 1987, ce centre publie une typologie des
principaux groupes de pensée au sein du corps électoral. Il
vient d’en créer un nouveau en mai 2011 représentant 9%
de l’électorat, sous le nom de « libertariens
»
Pew caractérise les libertariens comme ceci : « Ils sont
très critiques à l’égard du gouvernement. Ils
désapprouvent les programmes sociaux. Ils sont pro-business et
s'opposent fermement à la réglementation. Ils acceptent
l'homosexualité. Ils ont des vues modérées au sujet des
immigrants par rapport aux autres groupes. »
Nick
Gillespie cite aussi le mouvement Tea Party comme
le dernier exemple en date d'un réseau décentralisé de
citoyens utilisant la technologie pour contester l’agenda politique de
la classe dirigeante.
Pour
Gillespie et Reason Magazine, les loyalistes du Tea Party sont trop enclins à souhaiter une
intervention militaire, une lutte anti-charia paranoïaque et des
amendements constitutionnels visant à interdire les activités
qu'ils n'aiment pas. Mais le mouvement reste puissant en grande partie parce
qu'il a généralement refusé de se laisser prendre au
piège de la division sur les questions de politique sociale et
étrangère, se concentrant plutôt avec une
ténacité admirable sur la crise financière
provoquée par les dépenses publiques
inconsidérées. Il suffit de lire le message contenu dans le
document du Tea Party, appelé « Contract
From America » et datant de 2010 :
1.
Protéger la Constitution
2.
Rejeter Cap & Trade (réglementations sur les émissions de
Co2)
3.
Exiger un budget équilibré
4.
Adopter une réforme fiscale en profondeur
5.
Restaurer la responsabilité budgétaire et le gouvernement
limité constitutionnellement
6.
Fin des dépenses du gouvernement
7.
Abrogation et remplacement des soins de santé gérés par
le gouvernement
8.
Donner la priorité à la politique énergétique
9.
Abolir la Fed (Réserve fédérale américaine)
10.
Stopper la hausse des impôts
On
peut s’opposer à certains de ces articles. Mais selon Gillespie,
il n'y a aucun doute sur la philosophie générale qui s’en
dégage : le problème, ce n’est pas le marché,
c’est le gaspillage des dépenses de l’État.
En
conclusion, le message de Gillespie est simple. Être indépendant
ce n’est pas refuser la politique mais c’est refuser le statu quo
imposé par les partis politiques. Les grands partis agissent
fondamentalement de la même manière : la majorité,
souvent très mince, acquiert le droit de contrôler la vie et les
biens de la minorité. Elle crée de plus en plus de
dépenses publiques et de contrôles sur les individus. Pourtant,
ajoute Gillespie, « supposer que les pauvres vont mourir de faim
ou que les ignorants vont rester incultes, si l’on diminue les
dépenses publiques en pourcentage du PIB, est aussi erroné que
de supposer que les gens n’iront plus à l'église en
l'absence d'une religion d'État »
Chroniques
de la Freedom Fest à Las Vegas
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