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« La
solution à la crise, c’est le sérieux budgétaire,
pas l’austérité », a déclaré
François Hollande, Président de la République, lors du
Forum Nouveau Monde le 18 avril 2013 à Paris. Ce sérieux se
traduit-il aussi par un excès d’optimisme ? Car les prévisions
de croissance affichées par le gouvernement de François
Hollande sont très optimistes : « le gouvernement prévoit
une croissance du produit intérieur brut (PIB) de 0,1 % en 2013, puis
de 1,2 % en 2014 et de 2 % par an à compter de 2015. »
Or ces prévisions
sont très importantes. Le 17 avril, Pierre Moscovici, ministre de
l’économie, et Bernard Cazeneuve,
ministre du budget, ont présenté le programme de
stabilité 2013 - 2017 au Conseil des ministres. Toutes les mesures qui
y sont inscrites reposent sur les prévisions de croissance
annoncées plus haut. Autant dire que celles-ci sont
déterminantes car elles constituent la base des politiques de
réduction des déficits publics menées par
François Hollande et son gouvernement. De la justesse de ces
prévisions dépend l’efficacité des politiques
publiques. Du réalisme de ces projections dépend la
crédibilité de l’exécutif français. La
stabilité de la politique économique en dépend tout
simplement.
Justesse et
réalisme : deux notions difficiles à atteindre d’ordinaire
surtout en matière de prévisions économiques et
financières. Ceux qui se sont essayé aux « business forecasts » savent combien il est délicat de
faire certains choix et surtout d’estimer la croissance potentielle
d’un business. Alors à l’échelle d’une
nation, soumise à des aléas intérieurs et
extérieurs sur les plans économiques mais aussi sociaux et
politiques, l’exercice relève parfois de la mission impossible.
Ce qu’il
y a d’inquiétant dans les prévisions du gouvernement est
qu’elles sont unanimement retoquées. Le Haut Conseil des
finances publiques (HCFP) présidé par Didier Migaud, Président de la Cour des comptes, et
ancien député socialiste aux côtés de
François Hollande, les accuse de pécher par optimisme, l’Observatoire
français des conjonctures économiques (OFCE) et le Fonds
monétaire international (FMI) ne sont pas d’accord non plus.
La
récession est unanimement annoncée pour 2013, sauf par le
gouvernement français. Dans cette perspective, le HCPF doute des choix
économiques de François Hollande. L’OFCE prévoit
un recul de 0,2% du PIB. Le FMI considère qu’après la
croissance zéro de 2012, la France continuera son plongeon avec un
nouveau recul de 0,1%.
Pour 2014, la
possibilité d’une reprise de la croissance est admise, elle est
même espérée, c’est dans
l’intérêt de tous. Cependant face au 1,2% de croissance
annoncé par le gouvernement, le HCPF pense que la croissance sera
nettement inférieure à cette prévision. L’OFCE est
sur la même ligne puisqu’il annonce une croissance de 0,6%, moitié
moins que celle sur laquelle mise le gouvernement. Le FMI, de son
côté, prévoit un prudent 0,9% dont on sent qu’il
serait prêt à le revoir à la baisse, mais certainement
pas à la hausse.
Quant à
2015, 2016, 2017, le gouvernement estime que la croissance atteindra 2% pour
chacune de ces années. Silence radio du côté du FMI, de
l’OFCE et du HCPF. Ce dernier parle d’un « biais optimiste
», ce qui implique un rejet de cette prévision. En effet,
prévoir à si long terme est spécieux. Le contexte
économique de la France est trop incertain, à la fois à
l’intérieur du fait d’une activité
économique qui ralentit dangereusement à cause d’un tissu
entrepreneurial qui se délite, et à l’extérieur du
fait d’un contexte européen fragilisé par les crises
bancaires et la rumeur que l’Allemagne pourrait perdre son triple A.
En somme, les
prévisions du gouvernement français sont trop hautes, pas assez
réalistes. C’est bien pour cela que le HCPF demande à
Pierre Moscovici de revoir sa copie et de la revoir avant que le programme de
stabilité 2013 – 2017 ne soit entériné. Et de
revoir du même coup tous les choix économiques puisque leur base est faussée.
En fait, tout ce que l’on demande au gouvernement et à
François Hollande, ce n’est pas d’être optimiste, ni
austère, ni rigoureux : c’est tout simplement d’être
réaliste. Sinon le programme de stabilité risque de devenir un
programme d’instabilité.
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