Sans une cohorte
de politiciens stupides, il ne serait sans doute jamais venu à
l'idée d'hommes sensés l'idée de faire pousser du
maïs ou du colza pour faire rouler des voitures: le pétrole est
une ressource bien moins coûteuse pour cet usage, l'hydrogène
devrait l'être également sous une cinquantaine d'années,
et compte tenu des rendements agricoles escomptables à court, moyen et
long terme, les surfaces arables disponibles sont insuffisantes pour
permettre de propulser tout notre parc automobile sans gravement remettre en
cause la disponibilité de surfaces agricoles pour ce qui a toujours
été la première destination des terres cultivées:
nourrir les hommes, directement ou via la nourriture du bétail.
J'ai déjà eu
l'occasion de dire tout le mal que je pensais des
politiques visant à introduire, par la fiscalité et les
subventions, des signaux de prix totalement faussés poussant les
exploitants agricoles à sacrifier des forêts de valeur ou des
terres pour fabriquer des bio-fuels. Comme je l'écrivais à
l'époque,
Soit
le réchauffement climatique d'origine humaine est une erreur
conceptuelle, et utiliser le sol pour produire des biocarburants au lieu de
nourrir les hommes est une complète aberration, soit l'effet de
serre anthropique est une réalité, et utiliser le sol pour
produire des biocarburants au lieu de nourrir les hommes est une
complète aberration.
J'étais
encore au dessous de la réalité. Il apparaît aujourd'hui
que si le CO2 rejeté par les humains est réellement un danger
pour notre planète et son climat (j'en
doute toujours, mais ce n'est pas la question), alors la
politique visant à pomper des surfaces agricoles pour produire des
bio-carburants est véritablement un facteur d'accroissement du danger.
Selon cet
article du New York Times,
The benefits of biofuels have come
under increasing attack in recent months, as scientists took a closer look at
the global environmental cost of their production. These latest studies,
published in the prestigious journal Science, are likely to add to the
controversy.
These studies for the first time take
a detailed, comprehensive look at the emissions effects of the huge amount of
natural land that is being converted to cropland globally to support biofuels
development.
The destruction of natural ecosystems
— whether rain forest in the tropics or grasslands in South America
— not only releases greenhouse gases into the atmosphere when they are
burned and plowed, but also deprives the planet of natural sponges to absorb
carbon emissions. Cropland also absorbs far less carbon than the rain forests
or even scrubland that it replaces.
Together the two studies offer
sweeping conclusions: It does not matter if it is rain forest or scrubland
that is cleared, the greenhouse gas contribution is significant. More
important, they discovered that, taken globally, the production of almost all
biofuels resulted, directly or indirectly, intentionally or not, in new lands
being cleared, either for food or fuel.
“When you take this into
account, most of the biofuel that people are using or planning to use would
probably increase greenhouse gasses substantially,” said Timothy
Searchinger, lead author of one of the studies and a researcher in
environment and economics at Princeton University. “Previously
there’s been an accounting error: land use change has been left out of
prior analysis.”
These plant-based fuels were
originally billed as better than fossil fuels because the carbon released
when they were burned was balanced by the carbon absorbed when the plants
grew. But even that equation proved overly simplistic because the process of
turning plants into fuels causes its own emissions — for refining and
transport, for example.
The clearance of grassland releases 93
times the amount of greenhouse gas that would be saved by the fuel made
annually on that land, said Joseph Fargione, lead author of the second paper,
and a scientist at the Nature Conservancy. “So for the next 93 years
you’re making climate change worse, just at the time when we need
to be bringing down carbon emissions.”
Pour ceux que
l'éducation nationale a durablement fâché avec la langue
de Benny Hill, un rapide résumé:
"des études montrent que non
seulement la destruction de milieux naturels forestiers ou de brousses en vue
de produire des biofuels relâche beaucoup de CO2 dans
l'atmosphère, mais que les terres ainsi occupées absorbent
nettement moins de CO2 que les milieux antérieurs, qui étaient
de véritables éponges à CO2. En outre, comme il faut
bien produire de quoi manger, des forêts supplémentaires, autres
puits de carbone, tendent à être également
détruites. Même la destruction d'aires engazonnées
relâche 93 fois plus de carbone que le CO2 économisé
annuellement par le remplacement des fuels fossiles par des biocarburants. La
comptabilité qui a abouti à faire croire que le bilan CO2 des
biofuels était positif était bien trop simpliste,
négligeant gravement la conséquence des changements
d'affectation du sol et les cycles de production de CO2 engendrés par
les processus de fabrication des biocarburants par eux mêmes. "
Une
pétition est lancée par de nombreux scientifiques pour tenter
de convaincre George W. Bush et Nancy Pelosi, leader de la majorité
démocrate au congrès, de renoncer aux politiques favorisant les
biocarburants.
Bref, non
seulement la destruction massive de forêts pour produire des
bio-carburants est un désastre écologique pour la
biodiversité par elle même (de nombreuses études,
notamment allemandes, ont montré que les grandes aires
dédiées aux monocultures intensives étaient bien moins
favorables à la biodiversité que les forêts naturelles -
On s'en serait un peu douté...), non seulement la production de
biocarburants déséquilibre gravement les marchés
mondiaux des céréales, ce qui affecte en priorité les
populations des pays les moins riches, mais en plus, elle va à l'encontre
de l'objectif recherché de réduction des émissions de
CO2, que ce soit pertinent ou pas.
Non seulement il serait temps d'abandonner toute politique d'encouragement
des biocarburants, mais à la lumière d'échecs aussi
flagrants de décisions politiques fondées sur une science aussi
douteuse, il serait plus qu'approprié de décréter une
pause dans toutes les politiques de "lutte contre le
réchauffement climatique" décidées à la
va-vite par des gouvernements soucieux de coller aux idées à la
mode sans aucune préoccupation de vérifier la qualité de
la science derrière ces décisions. Il faut prendre le temps
d'en mesurer avec rigueur toutes les conséquences, car lenteur des
phénomènes dont il est question nous permet de consacrer
sans crainte la dizaine d'années qui vient à améliorer
en priorité notre connaissance du climat et des conséquences de
ses variations, naturelles ou provoquées, et rend inutile, voire
nuisible, toute précipitation.
Malheureusement,
tant la production de biocarburants que l'érection d'éoliennes
géantes, autre stupidité sur laquelle je prendrai prochainement
le temps de m'étendre, sont l'objet de subventions massives,
lesquelles ont durablement orienté des pans entiers de l'industrie
vers ces secteurs soutenus artificiellement. Il y a d'ailleurs actuellement
une véritable bulle spéculative qui est en train de se former
autour des actions de l'industrie éolienne, qui ne demande qu'à
éclater. Non seulement ces subventions sont en train de faire beaucoup
de mal à la planète qu'elle prétendent contribuer
à "sauver", mais les lobbys qui en bénéficient
feront tout pour en empêcher l'abandon, ce qui devrait rendre
très difficile un retour à une situation "normale", où
l'état ne se mêle pas de diriger l'argent des contribuables vers
sa lubie du moment.
Loin des bonnes
intentions qu'elle affiche, l'écologie sectaire
doit être considérée comme un crime contre la
planète et ses habitants.
Vincent
Bénard
Objectif Liberte.fr
Egalement par Vincent Bénard
Vincent Bénard, ingénieur
et auteur, est Président de l’institut Hayek (Bruxelles, www.fahayek.org) et Senior Fellow de Turgot (Paris, www.turgot.org), deux thinks tanks francophones
dédiés à la diffusion de la pensée
libérale. Spécialiste d'aménagement du territoire, Il
est l'auteur d'une analyse iconoclaste des politiques du logement en France,
"Logement,
crise publique, remèdes privés", ouvrage publié
fin 2007 et qui conserve toute son acuité (amazon), où il
montre que non seulement l'état déverse des milliards sur le
logement en pure perte, mais que de mauvais choix publics sont directement
à l'origine de la crise. Au pays de l'état tout puissant, il
ose proposer des remèdes fondés sur les mécanismes de
marché pour y remédier.
Il est l'auteur du blog "Objectif
Liberté" www.objectifliberte.fr
Publications :
"Logement: crise publique,
remèdes privés", dec 2007, Editions Romillat
Avec Pierre de la Coste : "Hyper-république,
bâtir l'administration en réseau autour du citoyen", 2003, La
doc française, avec Pierre de la Coste
Publié avec
l’aimable autorisation de Vincent Bénard – Tous droits
réservés par Vincent Bénard.
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