Mes chères contrariennes, mes chers contrariens !
Les banques centrales ne disposent que d’un seul outil dit « conventionnel
», c’est-à-dire d’utilisation normale… les taux d’intérêt. L’économie, chose
très complexe semble-t-il, se résume pour ainsi dire à un bouton « on/off »
utilisé à intervalle régulier par les banquiers centraux dont le travail se
réduit soit à monter les taux pendant que tout va bien jusqu’à ce que cela
aille moins bien (il faut freiner la croissance), soit à baisser les taux
quand tout va mal… jusqu’à ce que cela aille moins mal (relancer la
croissance).
Le problème du taux d’intérêt dit « directeur » c’est qu’il est unique et
concerne toute l’économie. Je vous donne un exemple. Pendant ces dernières
années, l’argent n’était pas cher. Du coup, tout plein de gens à travers
toute la planète ont emprunté tout plein de sous pas cher pour acheter de
l’immobilier qui, il y a 15 ans, n’était pas cher mais vu que la demande
était en hausse… eh bien les prix ont monté. Logique. Et plus les prix
montent, plus ils deviennent cher (je sais, là je ne vous apprends rien)…
mais comme pour tout, il y a une limite… Bon, bref, face à cette augmentation
des prix immobiliers, la FED, la Banque centrale américaine, a augmenté ses
taux pendant 12 mois tout plein de fois jusqu’à ce que le prix de l’argent
fasse baisser le prix de l’immobilier… Et vous savez quoi ? Cela a super bien
marché puisqu’en 2007 le marché immobilier américain s’est retourné,
provoquant la crise dite des « subprimes ».
Du coup, comme cela allait beaucoup moins bien, la FED, qui avait augmenté
les taux, a décidé de les rebaisser… pour que les gens rachètent de
l’immobilier en 2008 alors qu’il ne fallait pas qu’ils le fassent en 2007… Je
vous l’ai dit, l’économie c’est très complexe et la politique d’une banque
centrale n’est évidemment pas à votre portée…
Petite idée de débat et de réflexion que je soumets à notre petite
communauté de lecteur. Il n’y a qu’un seul taux. Le taux directeur. Du coup,
quand il y a une bulle immobilière par exemple, pour la contrer le banquier
central est obligé d’augmenter le taux directeur qui donne la direction à
tous les secteurs de l’économie. Ainsi, les crédits immobiliers deviendront
plus cher mais ceux pour les voitures aussi et ceux pour les entreprises
également.
Rien, strictement rien n’empêcherait les banques centrales d’avoir «
plusieurs taux directeur » en fonction de la grande catégorie de financement.
Un taux pour le financement des entreprises, de la spéculation à découvert
sur les marchés financiers, pour l’immobilier, pour l’achat de bagnole ou
encore évidemment pour les entreprises.
Vous l’aurez compris, cela permettrait de lutter par exemple contre une
bulle spéculative immobilière sans avoir à monter les taux pour tous les
secteurs économiques. (Mais bon, c’est de l’économie 3.0 et ce n’est pas dans
les manuels des économistes de la révolution industrielle donc ça ne peut pas
être ni imaginé ni encore moins mis en place.)
Tout va moins bien mais Yellen veut vraiment monter les taux, le
raisonnement est génial !
Là, maintenant, il faut vous accrocher mes chers camarades lecteurs, et
citoyens. Attention, hein, là on se situe niveau doctorat d’économie et nous
allons nous envoler vers les sommets de l’économie conceptuelle. Prêts ? Allez,
je vous emmène !
On apprend par cet article des Échos la pensée profonde de
Yellen, la mamamouchie de la banque centrale américaine, je cite : « La FED
estime qu’agir trop précipitamment sur les taux est encore plus dangereux que
temporiser sur les resserrements monétaires. En effet, si la croissance et
l’inflation venaient à baisser de nouveau, la FED aurait peu de moyens
d’agir. »
Houaaa, génial. Non, je sais, vous ne pouvez pas comprendre. Vous êtes des
mougeons et comme je vous le disais, là on est au sommet de l’économie
conceptuelle mais je suis tellement fort que je vais tenter de simplifier les
choses pour que vous puissiez les piger.
D’abord, la FED pense que si une augmentation des taux c’est dangereux,
c’est encore plus dangereux de ne rien faire parce que si les choses allaient
moins bien avec des taux à zéro, la FED ne pourrait pas les baisser à
nouveaux donc elle ne pourrait rien faire… Houlalalalala.
Allons encore plus loin dans le décryptage. Comme la situation est
mauvaise et qu’elle risque de devenir moins bonne, il faudrait augmenter les
taux, ce qui va ralentir l’économie, pour avoir le plaisir de les rebaisser
dès qu’il apparaîtra que les avoir augmenté pose trop de problèmes… Avouez,
c’est quand même génial ce type de raisonnement hein ?
Si vous poussez le vice un peu plus loin, vous ne pouvez en arriver qu’à
la conclusion que les banques centrales créent elles-mêmes les cycles
d’expansion en baissant les taux, et les cycles de récession… en les
augmentant.
Désormais, l’idée géniale de la FED c’est de créer une superbe nouvelle
crise économique en augmentant les taux car augmenter les taux cela crée des
crises économiques. Surtout que actuellement, nous avons quelques problèmes
comme par exemple un QE en Europe avec des taux négatifs… Alors si les taux
remontent aux États-Unis, vous pensez qu’il va se passer quoi ? Eh bien
logiquement, les gens vont préférer acheter du dollar qui va monter et
percevoir des taux d’intérêt positifs et en hausse sur un placement en dollar
qui monte plutôt que de payer son banquier européen pour avoir le droit de
conserver des euros qui baissent…
Résultat : baisse de l’euro, hausse du dollar et fuite des capitaux (qui a
déjà commencé) de l’Europe vers les USA. D’où la ruine probable de l’Europe
qui serait obligée, le QE à peine lancé, d’augmenter aussi ses taux…
Si les USA augmentent les taux (autrement que symboliquement), je peux
vous assurer que l’on va bien rigoler.
Enfin eux, parce que nous, comme d’habitude, on va pas se marrer.
Sinon je maintiens le fait que je pense que la FED ne réussira pas à
augmenter ses taux autrement que symboliquement et que si elle le faisait,
alors cela viendrait faire exploser toutes les bulles spéculatives actuelles
à commencer par la bulle la plus monstrueuse et la plus dangereuse de tous
les temps… la bulle obligataire mondiale… Et là, rien ni personne ne pourra
survivre à son explosion. Je persiste à penser (au risque évident d’avoir
tort) que jamais la FED n’ira jusqu’à faire exploser cette bulle obligataire…
ou alors ce sera un acte volontaire de suicide économique collectif.
Il est déjà trop tard, préparez-vous.
Charles SANNAT
« À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les
révolutions violentes » (JFK)