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Depuis la fin des années 1980,
les retraites par répartition ont été
réformées à plusieurs reprises afin de limiter
l’ampleur des déficits et de ralentir la progression des
dépenses. Avec l’ensemble des modifications intervenues
jusqu’à présent, la part des pensions
représenterait entre 12 et 15% du PIB en 2060 selon les derniers
chiffrages de l’INSEE, soit un niveau proche d’aujourd’hui.
Ces réformes sont loin
d’être anecdotiques. En effet, si l’on avait
conservé l’intégralité des règles en
vigueur au milieu des années 1980, les retraites par
répartition auraient représenté plus de 20% PIB en 2060.
Cette relative stabilité du
poids des retraites dans le PIB s’explique, pour partie, par trois
mesures fortement médiatisées. Il s’agit de
l’augmentation du nombre d’années prises en compte pour le
calcul du salaire de référence (25 suite à la
réforme de 1993), de l’augmentation de la durée de
cotisation requise pour atteindre le « taux plein »
(réformes de 1993, 2003 et 2014) et du relèvement de
l’âge minimal d’ouverture des droits à retraite
(réforme de 2010). C’est sur ces mesures, dont l’effet est
relativement simple à appréhender par tout un chacun, que
s’est focalisée l’attention. Pourtant elles ne constituent
que la partie émergée de l’iceberg, l’essentiel des
économies étant ailleurs.
Une étude récente de
l’INSEE montre en effet que c’est avant tout le changement des
règles de revalorisation de la répartition, initié
dès la fin des années 1980, qui explique la relative stabilité
des dépenses de retraite. Le choix de l’indexation sur les prix,
étendu depuis aux retraites de la fonction publique en 2003, a un
impact majeur. En 2010, il aurait permis de réduire les
dépenses de retraite de 1,2% du PIB, alors que les autres modifications
opérées depuis 1993 représenteraient une économie
équivalente à 0,8% du PIB. Les projections de l’INSEE
montrent que cet écart va subsister dans le temps. L’indexation
sur les prix permettrait d’économiser entre 4 et 6% du PIB en
2060, soit plus que toutes les économies résultant des
modifications des autres paramètres.
Lecture : en 2010 les dépenses liées aux retraites par
répartition représentaient 14% du PIB. S’il n’y
avait pas eu de réformes, il aurait fallu consacrer 16% du PIB pour
servir les prestations prévues. Les 2% d’économies se
décomposent en 1,2% au titre de l’indexation sur les prix et
0,8% au titre des autres évolutions intervenues depuis 1993. Sources : Contribution à
l’histoire financière de la Sécurité sociale, sous
la direction de M. Laroque, DREES et projections INSEE
Cette modification des règles
d’indexation, plus difficile à appréhender,
pénalise à deux niveaux le pouvoir d’achat des
retraités. D’une part leur première pension est
calculée à partir des cotisations versées,
réévaluées en fonction de l’évolution des
prix. Cela donne un résultat moins favorable qu’à
l’époque où les cotisations étaient
réévaluées selon la progression des salaires.
D’autre part les pensions distribuées sont
réévaluées, elles aussi, en fonction de l’indice
des prix. Cela explique l’appauvrissement relatif des retraités
par rapport aux actifs, ces derniers bénéficiant
d’augmentations de salaires supérieures à la progression
des prix.
Cette évolution est loin
d’être neutre. En 2060, la pension moyenne représenterait
entre 48 et 57% du salaire moyen, contre 66% aujourd’hui. Et attention
à ceux qui pensent qu’un retour de la croissance
améliorerait la donne. En effet, les chiffres de l’INSEE
montrent que plus la croissance serait forte, plus l’écart entre
retraités et salariés se creuserait, les salaires progressant
sensiblement plus vite que les retraites à venir ou déjà
liquidées.
Fort heureusement il existe un moyen
d’amortir ce choc, en se constituant un patrimoine. On constate
d’ailleurs que les ménages retraités accumulent en
moyenne plus de patrimoine que les actifs. Pour autant, comme le souligne l’INSEE,
le patrimoine accumulé à ce stade ne permet pas de compenser la
baisse des retraites par répartition. Le pouvoir d’achat des
retraites continuera donc de se réduire très significativement
par rapport aux actifs, même en faisant l’hypothèse
d’une stabilité à long terme des revenus du patrimoine.
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