Il y a 6 ans presque jour pour jour, le gouvernement espagnol
demandait une aide d’urgence de 100 milliards d’euros à la troïka afin de
sauver ses banques à la dérive, qui ont ensuite fusionné pour former des
ensembles plus importants. Plus de 40 milliards de cette ligne de crédit ont
été utilisés, la plupart des montants n’ont pas été remboursés. Pourtant, le
système bancaire espagnol pourrait connaître une toute nouvelle crise. Elle
ne concernerait pas des banques secondaires cette fois, mais les institutions
principales du pays, qui sont fortement exposées aux émergents comme
l’Argentine, la Turquie et bien d’autres nations.
En ce qui concerne le système financier de la Turquie, les banques
espagnoles sont exposées à hauteur de 82,3 milliards de dollars (chiffres du
T1 2018), d’après la BRI. Il s’agit d’un montant supérieur à l’exposition
cumulée des 3 autres pays les plus impliqués, à savoir la France, les
États-Unis et le Royaume-Uni (75 milliards en tout).
D’après les statistiques de la BRI, l’exposition des banques espagnoles à
l’économie turque a presque quadruplé entre 2015 et 2018. La raison
principale s’explique par le rachat par la seconde banque espagnole, BBVA, de
la moitié de la 3e banque turque, Turkiye Garanti Bankasi. Depuis le rachat
de la première tranche en 2010, BBVA a perdu plus de 75 % de son
investissement en raison de la chute des actions de la banque et du plongeon
de la lire turque.
Mais la plus grande crainte, qui a été exprimée le 10 août dernier par la
BCE, est que les emprunteurs turcs n’aient pas pris des mesures pour se
protéger de la baisse de la lire et commencent à faire défaut en masse. Les
crédits en devises étrangères représentent 40 % de la dette du système
financier turc. Si cela devait avoir lieu, les banques les plus exposées à la
dette turque seront touchées de plein fouet. Aucune banque n’est plus exposée
que BBVA, même si elle affirme avoir pris les mesures nécessaires de
protection et que l’entité turque est indépendante du reste de la banque.
En Argentine, dont la devise continue de chuter et dont l’économie part en
vrille malgré l’intervention du FMI, les investissements espagnols au T1
s’élevaient à 28 milliards de dollars. Soit 1/3 de l’exposition cumulée des
autres nations. Les États-Unis, second pays le plus exposé, ont environ 10
milliards investis en Argentine.
Les grandes banques espagnoles sont fortement présentes en Amérique
latine. Après la crise immobilière, lorsque les opportunités en Espagne
n’étaient que trop rares, la croissance rapide des économies d’Amérique
latine représentait une aubaine pour ces institutions financières. (…) En cas
de revers de fortune, l’Espagne joue gros. Et le moins que l’on puisse dire,
c’est que l’avenir de pays comme le Brésil et le Mexique est incertain, alors
que l’Espagne accapare un peu plus de 40 % de l’exposition internationale à
ces nations émergentes en difficulté. (…)
Afin de se diversifier et d’échapper à la crise espagnole, les banques ont
misé sur les émergents. Mais c’est à leur tour de glisser dans la crise.
Source : WolfStreet.com