Le Britannique Francis Bacon
est né en 1561 et mort en 1626.
La pensée de Bacon a eu une
influence profonde sur le développement de la civilisation occidentale, parce
qu’il a établi ce qui est aujourd’hui connu sous le nom de méthode
scientifique. Toutes les avancées scientifiques de l’Homme jusqu’à
aujourd’hui sont basées – en quelques mots – sur des expérimentations
relatives aux choses du monde naturel (physique), qui visent à parvenir à une
vérité. Bacon a été le premier à souligner les bases de la méthodologie de la
découverte de vérités physiques.
A l’opposé de cette approche
de la réalité, nous avions par exemple l’alchimie, le précurseur de la
chimie. Pour l’alchimiste, il n’existe pas de séparation nette entre les
propriétés physiques et spirituelles de la matière. Ainsi, l’alchimiste était
typiquement fasciné par les possibilités de manipulation des propriétés
spirituelles des métaux, afin de transformer des métaux de très faible valeur
en des métaux de grande valeur – du plomb en or, par exemple. Une telle
découverte serait récompensée par des richesses infinies. Les procédés en
étaient mystérieux, et on les pensait dissimulés dans les codes laissés
derrière eux par les anciens alchimistes. Même le grand physicien, Sir Isaac
Newton (1624-1726), s’intéressait à l’alchimie alors même qu’il poursuivait
ses études en astronomie.
Les logiciens nous disent que
le processus qui permet de parvenir à une réalité au travers de
l’expérimentation est appelé raisonnement inductif, et correspond à la
manière dont l’expérience guide l’esprit. Si vous placez un œuf dans de l’eau
bouillante pour une durée de disons 12 minutes, votre œuf sera dur. Répétez
cette expérience autant de fois que vous le voulez, et vous aurez établi une
loi physique : « un œuf frais bouilli pendant 12 minutes devient un
œuf dur ». C’est ainsi que fonctionne la physique. La vérité exprimée
par la loi ci-dessus est atteinte au travers d’un processus d’induction.
Les énormes succès dont le
monde a pu profiter grâce à la méthode scientifique établie par Francis Bacon
ont généré une surévaluation de la méthode scientifique, et mené à des abus.
Bien que cette méthode soit applicable à l’étude du monde naturel et les
connaissances de ses caractéristiques, aussi bien au niveau subatomique que
de nos connaissances du paysage à la surface de Pluton, il ne s’agit pas de
la seule méthode scientifique capable de mener au savoir.
L’autre méthode d’acquisition
de savoir n’est pas basée sur l’expérimentation, et n’est pas basée sur
l’induction.
Je ne suis pas sûr du nom qui
devrait lui être donné – ce qui est peut-être une indication de sa position
très humble dans notre monde matérialiste.
Il en existe cependant des
exemples, comme par exemple la logique et les mathématiques.
La logique ne naît pas de
l’expérience ou de l’expérimentation. Elle est inhérente à l’humain. Alors
que la méthode scientifique de Bacon révèle une vérité a posteriori,
c’est-à-dire après expérimentation, la logique est a priori – elle est
inhérente à l’Homme, est présente en nous sans expérience préalable. La même
chose est vraie pour les mathématiques : la science des nombres est
indépendante de l’expérience passée.
Les vérités dérivées de la
logique et des mathématiques sont a priori, et toutes les autres vérités qui
naissent de la logique et des mathématiques sont dérivées d’un processus
intellectuel qui est différent de celui appliqué par la méthode scientifique
de Bacon : elles sont issues de la déduction, et non de
l’induction.
Il existe un troisième domaine
qui utilise la déduction pour parvenir au savoir scientifique :
l’économie. L’économie est l’étude de la logique de l’action humaine. Elle
est une science a priori, dont les postulats ont établi un processus de
déduction à partir d’une vérité a priori initiale – une vérité contenue dans
chaque être humain : les Hommes agissent. Nous pouvons en déduire que
les Hommes choisissent, et préfèrent certaines choses à d’autres. Ou encore
en déduire que vous préférez lire cet article plutôt que de faire autre chose
de votre temps. Et ainsi de suite, indéfiniment.
L’économie est l’étude du
comportement humain conscient.
Telle est la prédominance de
la méthode scientifique de Bacon sur l’étude du monde naturel que les
économistes ont de nos jours pour habitude d’étudier les évènements humains
au travers de la méthodologie de l’induction, qui est par nature basée sur
l’expérimentation. C’est malheureux, parce que l’induction au travers de l’expérimentation
n’est pas logiquement applicable au domaine des évènements humains. Les
expérimentations contrôlées, qui sont la fondation même de la méthode
scientifique de Bacon, ne sont pas applicables au comportement humain. Les
atomes n’ont pas de choix, ils vont toujours se comporter de la même
manière dans des conditions similaires. Les planètes n’ont pas de choix,
elles suivent leur orbite. Mais le choix humain, qu’il soit individuel ou
collectif, varie à chaque instant. Vous, lecteur, avez le choix de continuer
de lire, par exemple.
L’économie véritable est basée
sur un fait indéniable : l’action humaine ; elle-même dérivée d’un
autre fait indéniable : les Hommes choisissent. L’économie véritable
applique une méthodologie différente - celle de la déduction – à l’étude des
affaires humaines. Cette méthodologie est radicalement différente de la
méthodologie appropriée pour l’étude du monde naturel.
Tous les maux actuels -
l’incertitude, la spéculation injustifiée, l’enrichissement de quelques-uns
au détriment de nations entières, la folie des taux d’intérêt à zéro pourcent
ou négatifs, l’interdiction imminente de l’argent liquide - toutes les
anomalies qui affectent notre monde sont liées à la méthodologie erronée
appliquée à l’économie grand public.
Les grands gourous de la Fed
et de la BCE, de la Banque populaire de Chine, de la banque centrale de
Russie et du reste du monde, ne font rien de plus qu’expérimenter avec
l’humanité. Ils sont les apprentis sorciers du monde, qui appliquent une
théorie après l’autre dans l’espoir que leur expérience les mènera au succès
attendu. Ils ont les yeux rivés sur des nombres, des graphiques, des
pourcentages, des tendances, des résultats d’expérimentations passées, et
tentent d’en dériver un savoir. Mais ces informations a posteriori n’ont
aucune importance – elles ne peuvent que démontrer ce qui s’est passé
auparavant, et non ce qui est nécessaire aujourd’hui : une certitude
scientifique de ce qu’ils doivent faire pour parvenir à leurs fins.
L’économie grand public fonctionne
sur la base d’une méthode inappropriée. La méthode inductive ne peut pas
s’appliquer au monde des affaires humaines, où chaque situation, individuelle
ou collective, est unique et ne peut être répétée. Peu importe les bonnes
intentions de l’économie grand public, cette méthodologie ne peut qu’échouer
à parvenir aux fins recherchées.
Afin de détrôner ces
imposteurs, il serait nécessaire de mettre fin à leurs airs présomptueux et
leur expliquer qu’ils ne savent pas ce qu’ils font, parce qu’ils adoptent
leurs politiques dépendamment de méthodologies non-applicables. Cet argument
attaque les fondations même du grand château de l’économie grand public.
Les universités les plus
prestigieuses du monde, Stanford, Princeton, Yale, Harvard, MIT, London School
of Economics, enseignent aux économistes du futur la mauvaise méthodologie.
La méthode scientifique est applicable au monde naturel et relève de
l’induction au travers de l’expérimentation qui est, en revanche, inutile et
contre-productive lorsqu’appliquée au comportement humain qui favorise un
savoir a priori, comme le veut l’école autrichienne d’économie. Nous pouvons
nous attendre de ces jeunes hommes et femmes qu’ils deviennent des
économistes accrédités qui continueront de promouvoir toujours plus de chaos
et de désordre, poursuivront la destruction de la prospérité et complèteront
l’appauvrissement de l’humanité.