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Légendes,
faits, suppositions, théories… Tous ont leur place dans l’histoire de ce
célèbre diamant. Aujourd’hui, le diamant Orlov est l’un des plus importants
éléments de l’une des plus grandes collections de gemmes et de bijoux au
monde, le trésor du Fonds des Diamants, qui a récolté de nombreux bijoux
historiques amassés par les dirigeants de Russie avant la révolution de 1917
ainsi que certains diamants extraits au cours de ces trois dernières
décennies, témoins de la position qu’occupe aujourd’hui la Russie dans la
production mondiale de diamants.
Le
diamant Orlov est monté sur le Sceptre Impérial, qui a été créé sous le règne
de Catherine la Grande (1792-96). Son poids est de 189,62 carats, et il
mesure 47,6mm de haut, 31,75mm de large et 34,92mm de long. Sa clarté est
typique des diamants Indiens les plus fins, et sa couleur laisse paraître une
pâle tinte bleu-vert. Le style de taille du diamant a été décrit comme
ressemblant à un œuf de pigeon, et sa surface supérieure est marquée par des
rangées de facettes triangulaires, les quatre facettes leur correspondant
étant visibles sur la partie inférieure. Le diamant possède un total de 180
facettes. Sur l’un de ses côtés, nous pouvons noter une légère dentelure.
La
forme très inhabituelle de l’Orlov, le schéma de ses facettes et la présence
de cette petite erreur suggère étrangement que ce diamant puisse correspondre
à une pierre légendaire depuis longtemps disparue.
Parmi
les premiers Européens qui ont été autorisés à examiner les gemmes des
Empereurs Moguls d’Inde, nous pouvons compter
Jean-Baptiste Tavernier, qui a attaché les illustrations de certaines pierres
qu’il a pu observer dans son œuvre Six
Voyages de Jean-Baptiste Tavernier.
Le
dessin qu’a fait Tavernier du diamant qui fut plus tard connu sous le nom de
Grand Mogul est à la fois très intéressant et
important, parce qu’il est le seul dessin de ce diamant légendaire à avoir
survécu. Selon les sources qui sont disponibles à son sujet, le Grand Mogul aurait été découvert au XVIIe siècle dans les
dépôts diamantaires de Kollur, à proximité de la
rivière Krishna, dans l’Hyperabad. Il ne pesait pas
moins de 787, 5 carats. Il fut rapidement acheminé vers le trésor des Moguls, et fut présenté à Tavernier par Aurangzeb
(1658-1707), troisième fils du Shah Jahan, qui
était parvenu à surpasser ses trois frères et à usurper le trône de son père.
La tâche de la taille du Grand Mogul fut donnée à
un Italien du nom d’Hortensio Borgio,
qui réduit le poids du diamant à seulement 279 et 9/16e carats.
Les efforts du tailleur ne plurent pas à Aurangzeb, qui plutôt que de le
remercier pour ses services, lui imposa une amende de 10.000 roupies – et il
en aurait certainement demandé plus si le pauvre homme avait possédé plus d’argent.
Tavernier a fait référence au Grand Mogul à de
nombreuses reprises, comme vous pouvez le voir dans l’inscription
suivante :
Un dessin du diamant Orlov tiré du
livre Precious Stones, de Max Bauer, publié en 1904.
Le pourtour de la pierre est quelque
peu irrégulier, et ne ressemble pas à l’ovale que mentionnent les
instructions de taille de Tom R. Barbour,
et qui apparaissent dans la Lapidary Journal du début des années 1930.
Le dessin du diamant correspond à celui
d’Ian Balfour, avec ses facettes triangulaires sur le dessus et
des facettes à quatre côtés sur le
dessous.
Le dessous du diamant a trois facettes assez larges, celle du milieu étant
soit courbée soit horizontale,
et celles des côtés en diagonale.
Il
est clair que le Grand Mogul était le Léviathan des
diamants Indiens, et qu’il était perçu comme tel. Mais un mystère reste
entier : quel destin aurait pu garder ce diamant dont toute trace
apparaît comme ayant été perdue ? Certains ont suggéré qu’il ait été
taillé sous forme de multiples gemmes plus petites. D’autres pensent qu’il
existe encore aujourd’hui sous un autre nom, et pourrait notamment correspondre
aux trois diamants suivants : le Darya-I-Nur, le Koh-I-Noor, et l’Orlov.
Le
Trésor d’Iran fut ouvert dans les années 1960 pour inventaire par trois
experts Canadiens, dont V. B. Meen, qui a écrit le
livre The Crown Jewels
of Iran. Leurs recherches ont démontré que le Darya-I-Nur, plus important diamant de la collection, ne
ressemble en rien au Grand Mogul. Le Darya-I-Nur est de couleur
légèrement rosée et de forme plate et oblongue à la mode du diamant Great
Table – figure numéro 3 des dessins de Tavernier.
Le
Koh-I-Noor correspond un
peu plus au Grand Mogul. Lorsqu’il fut apporté en
Angleterre en 1850, les dessins qui en furent faits prouvent que son diamètre
est très proche de celui du grand Mogul. La pierre
est considérablement plus plate que le Grand Mogul,
mais présente des surfaces clairement retaillées. D’autre part, certaines
autorités ont toujours maintenu que le Koh-I-Noor avait été connu bien avant le Grand Mogul, et l’ont identifié comme étant le diamant ayant
appartenu à Babur (1483-1530), premier Empereur de la dynastie Mogul. Babur a régné un siècle et demi avantAurangzeb. Il est très peu probable que quelqu’un
parvienne un jour à connaitre la vérité sur l’histoire du Koh-I-Noor.
Reste
donc l’Orlov. En comparant le dessin du Grand Mogul
fait par Tavernier aux photographies du diamant au Kremlin, il est apparent
qu’il existe entre eux beaucoup de similarités. La première est leur forme.
Rappelez-vous que l’Orlov a été décrit comme ressemblant à un œuf de pigeon.
Tavernier a fait référence au Grand Mogul comme
étant de la forme d’un ‘œuf coupé en deux’. Tout au long de l’Histoire, seuls
très peu de diamants de ce type ont pu être taillés. Deuxièmement, les
facettes des deux pierres ne sont pas très différentes. En plus de cela, la
dentelure mentionnée plus haut peut correspondre à la description de la
‘légère craquelure’ que présente le Grand Mogul.
Comme vous pourrez le voir dans un instant, l’histoire du Grand Mogul n’a pas de fin connue, et personne ne sait d’où
provient le diamant Orlov – ils sont probablement un seul et même diamant.
Il
existe cependant des disparités entre le poids des deux pierres. Après avoir
été taillé par Borgio, le poids du Grand Mogul fut réduit à 280 carats, alors que l’Orlov est dit
peser moins de 200 carats. Nous devons donc noter deux choses. Premièrement,
sachez que Tavernier pourrait ne pas avoir rapporté avec justesse le poids
des nombreuses pierres qu’il a observées. Il est par exemple certain qu’il se
soit trompé en ce qui concerne le poids du Great Table. Deuxièmement, il
n’est pas impossible qu’à un moment donné, le diamant Orlov ait pu être altéré
– ou que les efforts de Borgio aient pu être
améliorés pour donner au Grand Mogul la forme de
l’Orlov d’aujourd’hui.
L’expert
Russe des diamants et gemmes, l’académicien Alexander E. Fersman,
qui a examiné tous les anciens diamants du Trésor Russe, est persuadé que
l’Orlov n’est autre que le Grand Mogul. Je pense
personnellement qu’il s’agit de la même pierre retaillée.
Le Sceptre Impérial vu de devant.
L’Orlov est entouré d’une rangée de diamants taillés à la manière
Old Mine. La parure est relativement
simpliste et pourrait aisément être répliquée.
Il est toutefois malheureux que le GIA
puisse ne jamais avoir la chance de l’examiner.
Selon
une certaine source, le fait le plus ancien que nous sachions de l’Orlov est
qu’il était autrefois monté dans l’œil d’une idole d’un temple sacré du sud
de l’Inde. Ce temple aurait été situé dans un endroit épelé 'Srirangen', 'Sherigan', 'Scheringham', ou encore ' Sheringham'.
L’endroit exact est Srirangam, une ville du
district de Tiruchirapalli, dans le Madras, qui se tient sur une île formée
par le lit de la rivière Cauvery, 3,2km au nord de
la ville de Tiruchirapalli. L’île, de 27km de long et 1,5 voire 2km de large,
était d’une importance stratégique lors des conflits entre les forces
Françaises et Anglaises autour de la question de Trichinopoly au XVIIIe
siècle.
Le
grand temple de Srirangem, construit au XVIIe
siècle, est dédié à Vishnu et considéré comme étant l’un des sanctuaires les
plus sacrés de l’Inde du sud. Il est composé de sept enclos rectangulaires
les uns dans les autres, le périmètre du plus grand mesurant plus de 11,25km.
L’une de ses caractéristiques les plus remarquables et son Entrée aux Mille
Colonnes, avec sa colonnade de chevaux.
Un
soldat Français qui avait déserté et trouvé du travail aux alentours de Srirangem aurait appri que le
temple contenait l’idole d’un dieu hindou dont les yeux étaient formés par
deux gros diamants d’une valeur inestimable. Il se mit en tête de les
dérober, un projet qui demanda des années plutôt que des mois de préparation,
puisqu’aucun Chrétien n’était jamais autorisé au-delà du quatrième des sept
enclos. Afin de mener à bien son plan diabolique, le soldat embrassa la
croyance hindoue et trouva du travail au sein des murs les plus reculés du
temple. Alors qu’il gagna confiance des Brahims, il
fut autorisé à devenir un visiteur fréquent du sanctuaire central en raison
de son attachement apparent à cette divinité particulière. Il devint
finalement gardien du sanctuaire central, où il put mettre la main sur
l’objet de tous ses désirs.
Vint
alors le moment tant attendu : une nuit de tempête qui plongeait l’idole
dans les ténèbres. L’homme posa ses mains profanes sur l’idole placée sous sa
surveillance, et dénicha le gros diamant de son socle. Il perdit ensuite tout
son courage et s’enfuit sans même voler l’autre diamant. Il escalada les murs
du temple, traversa la rivière à la nage et se cacha dans la jungle
environnante, à l’abri des troupes Anglaises dont le campement se trouvait à
Trichinopoly. Il atteint finalement Madras, où il vendit le diamant pour 2000
livres à un capitaine de navire Anglais, qui l’apporta avec lui à Londres
pour le vendre à un marchand Juif pour la somme de 12.000 livres. Le marchand
l’aurait à son tour vendu à un Arménien du nom de Khojeh
Raphael, qui a quitté la Perse alors qu’il était encore très jeune pour
naviguer jusqu’à Surat puis voyager par la mer jusqu’à l’Angleterre puis la
Russie, en passant par Amsterdam. Ses voyages l’auraient transporté au
travers de tous les pays Européens avant qu’il ne décide de s’installer en
tant que marchand dans le port Italien de Leghorn. Selon les dires d’un
voyageur Perse, Khojeh était un parfait scélérat
qui avait vu assez de ce monde pour parler plusieurs langues.
Cette
histoire ne peut pas être considérée comme ayant autorité en ce qui concerne
le passé de l’Orlov. Quel diamant aurait pu être monté dans l’autre œil de
l’idole ? les candidats sont peu nombreux. Le Koh-I-Noor pourrait être l’un d’entre eux, mais nous savons
qu’il a été transporté hors de Delhi en 1739 par le Shah Perse Nadir.
Peut-être l’autre œil de l’idole contenait-il une autre pierre précieuse, ou
peut-être l’idole a-t-elle souffert le même destin que Nelson à Calvi ?
Une
autre version de l’origine de l’Orlov est encore plus tirée par les cheveux.
Selon celle-ci, le diamant aurait appartenu aux Empereurs Moguls
et aurait été sorti de Delhi par les Perses sous le Shah Nadir. Peu de temps
après l’assassinat de ce dernier en 1747, un soldat Afghan autrefois à son
service apparut à Bassorah, une grande ville du Shatt-el-Arab, à 112km au nord
du Golfe Persique. La ville de Bassorah es Mille et une nuits a été fondée par le
Calife Omar I en 636 après JC, à 13km au nord de la ville de Basra, qui était
un important port pour l’exportation de produits Orientaux.
En
plus du diamant, l’Afghan aurait apporté avec lui de nombreux autres bijoux,
qu’il offrit à un marchand Arménien du nom de Grigori Safras,
qui résidait alors à Bassorah avec ses deux frères.
Safrah se serait trouvé étonné de voir tant de
richesses entre les mains d’un pauvre soldat qui en ignorait la valeur. Il
fut obligé de reporter sa chance de faire affaires avec lui afin de dénicher
des fonds suffisants. Entre temps, l’Afghan commença à soupçonner le marchand
de manigancer quelque chose, et, persuadé qu’un piège allait se refermer sur
lui, il disparut de la ville aussi mystérieusement qu’il y était entré.
Le
soldat a ensuite pris la route pour Bagdad, où il a rencontré un négociant
Juif à qui il a vendu ses trésors pour 65.000 piastres (500 livres) et deux
chevaux Arabes. Mais plutôt que de retourner chez lui, il décida de dilapider
sa nouvelle richesse. Malheureusement, il finit par rencontrer Safras une nouvelle fois, Safras
qui n’était pas déterminé à le laisser filer à nouveau. Attristé d’apprendre
que l’Afghan avait vendu ses trésors, il parvint à apprendre où résidait le
négociant et lui rendit visite. Il lui offrit deux fois le montant qu’il
avait payé pour le diamant, mais le négociant refusa de s’en séparer. Safras contacta donc ses deux frères qui lui
rendirent visite à Bagdad. Ils décidèrent ensemble de s’emparer du diamant. Ayant
accompli cette tâche avec succès, il devint évident que l’Afghan devait
également disparaître, parce que son témoignage aurait suffi à incriminer les
frères. Tirant avantage de son amour pour la révolte, Safras
lui proposa donc de se joindre le lendemain à lui et ses frères pour un verre
ou deux, grâce auxquels il lui administèrent un
poison. Les corps du négociant Juif et de l’Afghan furent placés dans des
sacs et jetés de nuit dans le Tigre.
Mais
la boucherie ne s’arrêta pas là. Le cours des évènements avait jusque là joué en la faveur des meurtriers, mais
lorsqu’il en vint à la distribution du trésor, les trois frères réclamèrent
la possession du diamant. Comme il était impossible de diviser la gemme en
trois parts égales et qu’aucun de ses frères n’était prêt
à lâcher prise, notre Safras leur réserva un destin
similaire à celui de ses autres victimes. Il commit donc un double
fratricide, et un autre gros sac fut jeté dans le Tigre. Après tant
d’assassinats, l’Arménien décida de prendre la route pour Constatinople
avant de traverser la Hongrie puis la Silésie et enfin arriver à Amsterdam.
Il s’y installa en tant que revendeur de pierres précieuses. Peut-être la
proéminence de la ville dans ce domaine l’avait-elle attiré, plus que sa
localisation.
Selon
le livre d’Edwin Streeter, intitulé The Great Diamonds
of the World, cette deuxième version de l’histoire de l’Orlov ne fait
absolument pas référence au Orlov mais à un diamant différent portant le nom
de Moon of the Mountains, une pierre d’un poids de
120 carats. En revanche, aucune trace d’un tel diamant n’existe aujourd’hui,
encore moins dans le Fonds de Diamants de Russie. En plus de cela, les
autorités Russes ont révélé des documents qui indiquent qu’en 1768, leur très
cher diamant passa entre les mains d’un dénommé Safras.
La ville d’Astrakhan est cependant citée dans leur version de l’histoire de
l’Orlov, une référence possiblement expliquée par Streeter.
Il
explique qu’après s’être installé à Amsterdam, Safras
attira l’attention de certains dirigeants Européens, dont Catherine la
Grande. L’Impératrice était aparemment très
intéressée par le fameux diamant de Safras, et
invita ce dernier dans sa capitale, Saint Petersbourg,
où elle le présenta au bijoutier de la couronne, I. L. Lazarev.
De longues négociations eurent lieu, le prix demandé par Safras
ayant été considéré exorbitant. En revanche, le conte Panin,
ministre favori de l’Impératrice, eut finalement raison de Safras. La demande de ce dernier ne fut ni rejetée ni
acceptée. Il se laissa emporter dans une vie qu’il ne pouvait pas se
permettre, et s’endetta lourdement. Lorsqu’il n’eut plus aucun moyen
financier, Panin mit fin aux négociations et lui interdisit de quitter la Russie, ou même Saint Petersbourg, jusque que sa dette ait été remboursée. Safras était à la merci du ministre. Déterminé à ne pas
perdre son diamant, Safras finit par récolter assez
d’argent pour rembourser sa dette en vendant ses autres gemmes à la
communauté Arménienne de Saint Petersbourg. Il
quitta ensuite la capitale.
Quelques
années plus tard, la cour de Russie apprit que Safras
s’était installé à Astrakhan, et les négociations reprirent pour l’achat du
diamant, duquel il aurait aparemment dû se séparer
en respect des termes du contrat original. A ce moment-là, l’histoire du
diamant se complique encore plus. Tout le monde croyait jusqu’alors qu’un
voyageur avait acheté le diamant à Amsterdam, des articles furent même
publiés à Londres à ce sujet. La conclusion à en tirer est donc que les
négociations ne menèrent nulle part à Astrakhan – le conte Orlov dut voyager
jusqu’à Amsterdam pour finaliser l’arrangement. Lorsqu’il arriva, le diamant
était déjà connu sous le nom d’Amsterdam.
Le
conte Grigorievich Orlov (1723-83) était un noble
Russe et un officier de l’armée très respecté. Il a été blessé pas moins de
trois fois au cours des diverses campagnes de la guerre de sept ans. Il
aurait une fois escorté un officier Prusse en tant que prisonnier de guerre
jusqu’à Saint Petersbourg, où il fut présenté en
1759 au Grand-Duc Pierre et à Catherine. Alors qu’il menait une vie
séditieuse dans la capitale, il devint l’amant de la Grande-Duchesse. Après
la montée au pouvoir du mari de Catherine, Pierre III, Orlov et son jeune
frère, le conte Aleksei Grigorievich,
organisèrent le coup de juillet 1762, après lequel Pierre III fut détrôné à
la fevur de Catherine, puis assassiné.
Portrait de la grande Catherine par Alexei Petrovich Antropov
Catherine
fit de son amant son adjudant général, directeur général et général en chef,
mais le conte Panin, qui était son mentor
politique, se trouva frustré par l’intention de l’Impératrice d’épouser
Orlov. Orlov continua de servir Catherine jusqu’à ce qu’elle prenne
Aleksander Vassilchikov, alors Grigori Potemkin, comme amant. Il quitta la Russie en 1775.
Deux
ans plus tôt, Orlov visita Amsterdam, où il apprit l’existence du diamant de Safras. Il l’acheta pour la somme de 1.400.000 florins,
soit l’équivalent de 400.000 roubles. Un tel achat aurait sans doute rappelé
à Catherine le rôle qu’Orlov avait joué dans son ascension au pouvoir, ce qui
aurait pu jouer en sa faveur. C’est ce qu’Orlov espérait. Catherine elle-même
avait refusé d’acheter le diamant de Safras au prix
qu’il demandait. Elle accepta le diamant, et le fit monter sur le Sceptre
Impérial, créé par Troitnoki, juste sous l’aigle
d’or. L’Impératrice offrit à Orlov un palais de marbre à Saint Petersbourg, mais ne fit plus jamais de lui son favori.
En 1777, le conte Orlov épousa sa cousine, mais après la mort de cette
dernière à Lausanne en 1782, il perdit la tête et mourut en Russie l’année
suivante.
Il
existerait un document signé par Orlov et Lazarev,
bijoutier de la cour à Saint Petersbourg, qui
présenterait l’achat du diamant sous un jour entièrement différent. L’auteur
Russe suggère que le rôle d’Orlov n’aurait pu consister en rien de plus que
d’aller chercher le diamant, que Catherine aurait elle-même acheté.
L’Impératrice employait des intermédiaires pour deux raisons :
premièrement, elle désirait plus que tout contraster sa ‘frugalité toute Allemande’
(elle est née une princesse Allemande) et les habitudes d’achat de ses
prédécesseurs, et deuxièmement, elle considérait qu’il n’était pas le rôle
d’un monarque de marchander quoi que ce soit – ce qu’Orlov était en mesure de
faire. Ce serait donc pour lui avoir rendu ce service que Catherine aurait
baptisé le diamant Orlov.
Il
existe une légende au sujet de ce diamant, qui remonterait à l’époque de
Napoléon. Alors que les troupes de l’Empereur de France approchaient de
Moscou lors de la campagne de 1812, l’Orlov fut mis à l’abri dans la tombe
d’un prêtre au Kremlin. Lorsque Napoléon entra à Moscou, accompagné de sa
garde personnelle, il se dirigea vers le Kremlin pour mettre la main sur le
diamant. La tombe fut ouverte pour révéler la magnifique pierre. L’un des
gardes tenta de s’en emparer, mais avant qu’il ne le touche, le fantôme du
prêtre se leva et jeta une malédiction sur les envahisseurs. Napoléon et ses
hommes se seraient enfuis les mains vides du Kremlin. Cette histoire peut
n’être rien de plus qu’une légende, il n’en est pas moins qu’elle ajoute au
passé déjà coloré du diamant Orlov.
Sources: Ryan
Thompson, Famous Diamonds par Ian Balfour, The Nature of Diamonds
by George E. Harlow, Precious Stones par Max Bauer, Diamonds -
Myth, Magic, and Reality par Ronne Peltsman,
Neil Grant et 22 autres auteurs contributeurs.
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