Reuters s’est récemment penché sur le rapport concernant le programme de
couverture d’or publié par Société Générale/GFMS, qui stipule que « bien
que les sociétés minières restent prudentes quant à leur couverture… celles
qui favorisent cette stratégie se penchent en majorité sur les options ».
L’ampleur du programme de couverture est passée d’un record à la baisse de 91
tonnes au dernier trimestre de 2013 à 193 au premier trimestre de cette
année, mais reste bien inférieure à son niveau record de 3.230 tonnes atteint
en 1999 (voir le graphique ci-dessous).
Après le pic du prix de
l’or en 2011, les médias et l’industrie ont parlé du grand retour des
sociétés minières vers les programmes de couverture. En avril 2012, Paul Walker,
de chez GMFS, a appelé les sociétés minières à redonner priorité à la
couverture. Comme je l’ai noté à l’époque, « un empressement des minières à
sécuriser des couvertures déboucherait sur une boucle de rétroaction
négative, à leur propre détriment », puisque non seulement le prix de l’or
s’en trouverait abaissé, et les spéculateurs seraient également encouragés de
vendre de l’or à découvert dans l’anticipation d’un retour en masse des
sociétés minières vers des programmes de couverture.
Le sujet des programmes
de couverture est apparu dans les médias entre 2013 et 2014, alors que le
prix de l’or continuait de baisser. Au vu du graphique ci-dessus, il est
clair que jusqu’à présent, les sociétés minières ont cherché à ne pas répéter
les évènements de la fin des années 1990, alors qu’elles se couvraient en
période de baisse de prix, et partagent sans aucun doute l’opinion du PDG de
Barrick, Jamie Solasky, qui a dit ne pas être intéressé par la couverture « parce
que les investisseurs cherchent à capturer les hausses du prix de l’or ».
Avec un peu de recul,
nous pourrions dire que les sociétés minières auraient dû se couvrir en 2011
et 2012, mais il peut être tentant pour les directeurs miniers de chercher à
spéculer dans le cadre de leurs programmes de couverture, ce qui peut leur
être fatal. Une récente étude académique s’est penchée sur cette pratique de « couverture
sélective », qui voit les directeurs miniers « spéculer dans le
contexte de leurs programmes de couverture en variant l’ampleur et l’échéance
de leurs transactions en produits dérivés en fonction de leur opinion du
marché ».
L’étude s’est penchée
sur 92 sociétés minières nord-américaines entre 1989 et 1999, à l’époque ou
le plus gros des programmes de couverture étaient mis en place. La faille
principale du graphique ci-dessus est qu’il ne représente que les couvertures
totales, ce qui peut nous donner un aperçu incorrect de l’étendue des couvertures.
L’étude se penche quant à elle sur le ratio de couverture des minières, qui « représente
la fraction couverte de la production d’or prévue pour ces trois prochaines
années ».
Ce que je trouve
principalement intéressant dans ce graphique est que le ratio de couverture
est resté relativement stable jusque dans les années 1990, puis a commencé à
augmenter alors que le prix de l’or entamait une baisse. La chute du prix de l’or
aurait pu mettre certaines sociétés minières en difficulté financière, ou les
tenter d’accroître la performance de leurs couvertures. Il n’est donc pas
surprenant que l’étude ait conclu que « les plus petites sociétés et les
sociétés en difficulté financière sont aussi celles qui sont le plus enclines
à s’adonner à une couverture sélective ».
Une récente étude menée
par Metal Focus a conclu hier que « sur une base de coût de soutien, la
proportion des mines qui enregistrent des pertes à 1.100 dollars passe à 24% ».
Selon Metal Focus, cela ne signifie pas qu’elles fermeront leurs portes,
puisque « la fermeture de mines est également une entreprise très
coûteuse », c’est pourquoi les sociétés minières ont tendance à opérer à
perte sur le court terme dans l’espoir que le prix de la ressource qu’elles
produisent remonte ».
Pour les mines qui
opèrent à perte, il peut sembler sensé de considérer des programmes de
couverture, même aux prix actuels, parce que ces derniers les protègent
contre une baisse supplémentaire du prix de l’or – et leurs permettent de
poursuivre leurs opérations plus longtemps et de survivre jusqu’à une reprise
du prix. Bien que ce soit une approche sensée pour les sociétés
individuelles, que toutes les sociétés l’adoptent n’aurait aucun sens.
Espérons que les minières ont tiré des leçons des années 1990.