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Cours Or & Argent

Praxéologie et économétrie : une critique de l'économie positive

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Extrait des Archives : publié le 05 septembre 2012
5712 mots - Temps de lecture : 14 - 22 minutes
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Rubrique : Fondamental

 

 

 

 

La finalité d'une science positive est la constitution d'une "théorie" ou d'une "hypothèse" qui permette des prédictions valides et signifiantes (c'est-à-dire qui ne soient pas de l'ordre du truisme) concernant des phénomènes non encore observés. [1]

 

Bien qu'écrit il y a un quart de siècle, "La méthodologie de l'économie positive," de Milton Friedman, reste la justification philosophique d'une bonne partie de l'approche contemporaine en recherche économique. Néanmoins, les points généraux soulevés par cet essai n'étaient déjà pas nouveau à l'époque. Ils représentaient une adaptation ingénieuse de certains arguments positivistes des années 1930 et du travail quelque peu révisionniste de Sir Karl Popper [2]. De nos jours, le véritable positivisme bat nettement en retraite, s'il n'est pas déjà vaincu, dans les cercles philosophiques. Mais une de ses variantes demeure assez vivace dans de nombreuses sciences sociales, particulièrement en économie. Le but de cet essai est d'offrir une critique de "l'économie positive" et, enfin, de présenter quelques indications pour une alternative viable.

 

I. Les prédictions en tant que but

 

Du point de vue de l'épistémologie positiviste, la citation de Friedman doit-elle être considérée comme un énoncé a priori ou empirique ?

 

Si c'est un énoncé a priori, alors il concerne la façon dont nous devons utiliser le terme de "science positive" et ne représente qu'une simple stipulation linguistique. Vu comme ça, on aurait tout aussi bien pu lui associer une autre signification.

 

S'il s'agit d'un énoncé empirique (c'est-à-dire un énoncé sur ce que les gens ont, de fait, considéré être la science positive), alors, bien sûr, il n'exprime pas une vérité nécessaire et il pourrait en être autrement. Toutefois, pendant longtemps, la théorie darwinienne de l'évolution n'a pas fourni de prédictions et fut pourtant considérée comme scientifiquement acceptable. [3]

 

De plus, Friedman n'essaie pas du tout d'étudier ce qui a été considéré comme la science économique pour trouver si la "prédiction" a véritablement représenté la caractéristique définissant cette activité. En fait, il existe de nombreux cadres théoriques qui ne génèrent aucune prédiction testable mais qui sont néanmoins considérés comme faisant partie de l'économie. Par exemple, le degré de pertinence de discussions (fournissant des prédictions) sur l'existence et la stabilité d'un équilibre sous de nombreuses hypothèses particulières (dont la pertinence empirique est inconnue) lorsqu'on les applique à un monde qui n'est jamais véritablement en équilibre, est rarement clair. Bien entendu, on pourrait affirmer qu'il s'agit de mauvaise économie et que la ligne de démarcation se situe entre la "bonne" et la "mauvaise" science. Il ne s'agit cependant pas ici d'une échappatoire, car on reste avec une question non résolue : pourquoi l'économie non prédictive est-elle de la mauvaise science ?

 

Une autre porte de sortie possible serait d'affirmer que, si les théories non prédictives pourraient être scientifiques, elles ne font pas partie de la science positive. Nous pouvons alors à bon droit répliquer : "Et alors ?" A quel avantage la science positive peut-elle donc prétendre, hormis le fait que sa finalité soit la prédiction ? Dans ce cas, nous sommes revenus au point de départ : pourquoi prédire doit-il être notre but ?

 

Avoir la prédiction pour but pourrait bien cacher ce qui a en fait été considéré comme un but valable de la science : expliquer et comprendre les liens nécessaires. Une "théorie" donnant des prédictions est à peine plus qu'un moyen mnémotechnique destiné à relier x à y. Mais la nature de cette relation pourrait être inconnue. Les prédictions astronomiques des Babyloniens sont un exemple de "boîte noire" de ce type. [4] Le principe d'explication demeure inconnu au sens où le lien entre les conditions initiales et marginales (x1, x2, x, etc.) et la conséquence (y) n'est pas conçu comme étant nécessaire. La relation est caractérisée par une détermination arbitraire.

 

Mais s'il peut être vrai qu'une prédiction ne peut pas être considérée comme un attribut suffisant pour désigner une théorie comme scientifique, ce pourrait être tout de même une condition nécessaire. Toutefois, nous avons déjà implicitement réfuté cette affirmation en montrant que, au sein d'un cadre épistémologique positiviste, une telle nécessité ne peut découler que d'une stipulation préalable essentiellement arbitraire.

 

II. La possibilité de falsifier comme critère de signification

 

L'accent mis sur la prédiction comme but de la science prend ses racines dans un critère positiviste portant sur la signification d'un énoncé. Pour avoir un sens, dit-on, un énoncé doit être mis sous une forme permettant en principe à tout observateur de le falsifier. [5]

 

Prenons, par exemple, "l'hypothèse selon laquelle un accroissement substantiel de la quantité de monnaie sur une relativement courte période va de pair avec une hausse substantielle des prix." [6] Hormis les problèmes concernant la disponibilité des données et les talents de l'investigateur particulier, cette hypothèse est-elle falsifiable ? Pour l'instant, disons qu'elle l'est. Ainsi, le positiviste affirmerait qu'il s'agit d'un énoncé authentiquement scientifique. En fait, la signification d'une hypothèse est identifiée avec le test pertinent de sa véracité. Comme Moritz Schlick nous le dit, "la signification d'un énoncé ne peut être donnée qu'en indiquant la façon selon laquelle la véracité d'un énoncé doit être testée." [7] Bien sûr, ceci ne peut pas être vrai au sens littéral. Si la signification est identifiée avec le test, alors que teste-t-on ? Cependant, s'il existe une signification indépendante du test, alors le critère positiviste s'effondre de lui-même et des énoncés infalsifiables peuvent avoir un sens. Si nous ne donnons pas un sens littéral à l'énoncé de Schlick, alors il semble difficile de lui trouver une quelconque interprétation cohérente.

 

Mais, bien entendu, le concept même d'un critère unitaire de la signification est assez étrange quand on le considère dans un cadre positiviste. Posons à nouveau la question : la proposition est-elle a priori ou empirique ? Une définition de la "signification" stipulée de telle sorte qu'elle inclut le caractère falsifiable n'est pas en elle-même impressionnante : on aurait pu stipuler différemment. Vu de manière empirique, le critère est immédiatement réfuté par deux mille ans de philosophie occidentale, qui affirme que la métaphysique et l'ontologie sont des quêtes ayant un sens.

 

En dehors de ces questions, le critère de falsifiabilité perd beaucoup de sa plausibilité initiale quand on étudie le contraire d'un énoncé falsifiable. [8] Si nous admettons comme falsifiable le fait que toutes les inflations sont causées par une augmentation de la quantité de monnaie, alors le contraire, [9] qui veut que certaines inflations ne sont pas causées par une augmentation de la quantité de monnaie, n'est pas falsifiable. Si le second énoncé est censé s'appliquer au futur comme au passé, on pourrait toujours affirmer que l'inflation non causée par une augmentation de la quantité monétaire apparaîtra si l'on attend assez longtemps. Aucun exemple d'inflation consécutif à une augmentation de la quantité monétaire ne réfute la proposition et avec un horizon temporel futur, ainsi que passé, on dispose d'un ensemble infini d'inflations parmi lesquelles il convient de chercher l'absence totale d'inflations non monétaires.

 

Par conséquent, le critère de falsifiabilité comprend une transformation majeure de notre système de logique : bien qu'un énoncé puisse avoir une signification (ou être scientifique), la négation de cet énoncé n'en a pas (ou est non scientifique). [10]

 

Il peut sembler que l'on puisse échapper à cet argument en affirmant que si, à proprement parler, l'énoncé selon lequel certaines inflations ne sont pas la conséquence d'une augmentation de la quantité monétaire n'est pas falsifiable, on pourrait accumuler des preuves qui le prendrait plus ou moins "probable." La véracité ou la fausseté d'un argument n'est pas une variable aléatoire que l'on pourrait comparer à un jeu de pile ou face et une interprétation fréquentielle du concept de "probabilité" n'est donc pas possible ici. Ainsi, la signification du terme "probable" ne peut impliquer qu'un degré subjectif de croyance. Ceci se réduit à une transformation radicale de tout le cadre positiviste. Le critère devient dès lors : tout énoncé qui pourrait être rendu plus ou moins "probable" par comparaison avec une preuve empirique possède une signification. Pire encore, quels sont les types d'énoncé que ce critère élimine ? Probablement aucun. Il semblerait que les êtres humains n'ont pas assez d'imagination pour concevoir des propositions qui n'ont aucune relation du tout avec le monde. Ainsi, pour tout énoncé non tautologique (au sens le plus étroit), il est possible de trouver une "preuve" empirique qui ait un certain rapport avec sa véracité ou sa fausseté. Par conséquent, tous les énoncés ont une signification. S'il en est ainsi, le projet originel du critère positiviste s'effondre.

 

Tout énoncé possédant une probabilité (associée à un degré de croyance) ne rentre pas facilement dans le cadre positiviste. Des énoncés tels que "il est ‘probable' que certaines inflations ne sont pas monétaires" ne sont, bien entendu, par principe ni vérifiables ni falsifiables. Plus grave encore, ils ne possèdent aucun élément de testabilité intersubjective (ce qui était un but tellement important). Stipuler que certains types de preuves seront interprétés comme rendant un énoncé "probable" n'est pas une véritable solution. Ceci revient à rendre le critère de signification (ou la démarcation entre science et non science) purement conventionnel.

 

III. Une critique de l'économétrie [11]

 

Une prédiction ceteris paribus [toutes choses égales par ailleurs] est une prédiction de "faits stylisés" : x implique y si les autres facteurs restent constants. Mais comme, en général, les facteurs varient, nous ne prédisons pas un événement du "monde réel." Nous prédisons plutôt une conséquence hypothétique.

 

Pour soumettre l'hypothèse à une falsification potentielle, nous devons contrôler les autres variables pertinentes. Supposons que nous essayons de le faire en utilisant une analyse de régression multiple. Alors :

 

1. Comment savoir si nous avons convenablement contrôlé les facteurs non économiques ? (Il n'y a pas de garantie a priori qui assure que seuls les facteurs économiques importent dans une situation donnée.) Ceci réclamerait une théorie de l'interaction entre variables économiques et non économiques. Comment faisons-nous pour soumettre ceci à des tests de falsification ?

 

2. Comment tester la théorie qui nous permet de déterminer la liste des autres facteurs économiques devant rester constant afin d'isoler l'effet de x ?

 

Le problème est crucial pour le cadre positiviste. Comment pourrions-nous jamais savoir que l'hypothèse (auxiliaire), c'est-à-dire le fait que tous les autres facteurs pertinents ont été gardés constants, a été falsifiée ? Nous ne pouvons évidemment pas affirmer qu'elle a été réfutée si ne conduit pas à y puisque c'est précisément cette relation que nous sommes en train de soumettre au test. Il est clair qu'à moins de faire des hypothèses additionnelles sur les effets de chaque variable gardée constante sur y, nous ne serons pas capables de soumettre à réfutation la clause cruciale ceteris paribus. De plus, ces hypothèses auxiliaires (ou une seule hypothèse car c'est leur effet total qui nous importe) doivent être indépendantes de l'hypothèse centrale, au sens où la falsification des premières doit être indépendante de la falsification de la dernière. Maintenant, si nous affirmons que nous nous moquons vraiment de savoir si la clause ceteris paribus est "vraie" parce que tout ce qui compte réside dans le caractère prédictif de l'hypothèse centrale, alors nous nous retrouvons dans une nouvelle impasse. Tout d'abord, pourquoi donc avoir une clause ceteris paribus ? Ensuite, que falsifions-nous si, de fait, x n'entraîne pas y ? Certainement pas l'hypothèse telle qu'énoncée. Supposons que les "preuves" n'arrivent pas à réfuter nos hypothèses : qu'avons-nous alors confirmé ? A nouveau, pas l'hypothèse d'origine parce que la cohérence apparente entre les données et le cadre d'étude peut être illusoire, étant entièrement due à une variation "adéquate" des facteurs que nous supposions rester constants. Enfin, le point de vue global rétablit l'approche "boîte noire" envers la science et vicie ainsi l'objectif d'explication rationnelle.

 

Il est certes possible d'affirmer que, bien que l'hypothèse centrale doive être falsifiée afin d'avoir une signification ou afin d'être scientifique, la clause ceteris paribus n'a pas besoin de l'être. Tout ce qui est demandé pour cette dernière - pourrait-on dire - est une forme de verstehen [compréhension] ou de jugement distingué. Quoique ceci puisse être admissible dans d'autres cadres épistémologiques, ce ne peut l'être pour soutenir les prétentions du positivisme. Si nous pouvons dire que "tous les autres facteurs pertinents sont restés constants" sans falsification, pourquoi ne pourrions-nous pas en faire de même avec le cas "x entraîne y," l'hypothèse centrale ? Si nous pouvons le faire (ce qui semble probable étant donnée la concession initiale), alors le critère de la science positive s'écroule encore une fois.

 

IV. La maximisation

 

Sous l'influence de la "révolution marginaliste," l'économie est devenue une discipline dont la plus grande part est consacrée à trouver des maxima et des minima fonctionnels. Le consommateur ou le producteur individuel est supposé maximiser ou minimiser quelque chose et, à partir de ce postulat de comportement, on tire des conclusions testables. Il est important de garder à l'esprit que le comportement de maximisation n'est pas lui-même soumis à la falsification parce qu'il ne se présente pas comme une hypothèse mais comme une superstructure donnant une cohérence rationnelle aux conclusions falsifiables.

 

Tout exemple particulier de comportement concret peut être "expliqué" ou rationalisé en termes de maximisation (ou de minimisation) d'une certaine quantité appropriée (par exemple l'utilité, la richesse, etc.). Comme la maximisation est fondamentalement une caractéristique de l'intention (les positivistes n'admettront pas ce point), tout comportement concret peut être considéré comme s'il s'agissait de maximiser quelque chose. Ceci a de sérieuses conséquences.

 

Supposons que nous voulions tester non la possibilité d'appliquer une hypothèse économique spécifique à un domaine donné du comportement humain (disons le mariage), mais, plutôt, la validité du fait de considérer ce genre de comportement comme un exemple d'activité économique ou maximisatrice en soi. En d'autres termes, nous ne nous intéressons pas à savoir si un modèle maximisé particulier est approprié mais nous nous demandons s'il s'agit bel et bien d'un exemple de comportement maximiser.

 

On pourrait affirmer que cette formulation du problème n'a pas de sens. Après tout, nous ne testons jamais l'économie ou le comportement maximisateur en tant que tel, mais uniquement des hypothèses spécifiques. Ceci, bien sûr, manque le point crucial qui est le besoin de décider d'un cadre de recherche avant d'étudier des cas particuliers. L'énoncé "ceci est un exemple de comportement maximisateur" a-t-il une signification ou est-il scientifique ? La réponse est clairement non. Comme l'ensemble des falsifications possibles est vide, tout comportement peut être "expliqué" en termes de maximisation de quelque chose. [12] Mais l'hypothèse "ceci est un exemple de maximisation des ventes" peut être réfuté par un comportement approprié et possède donc une signification. Voilà un curieux paradoxe : l'énoncé sur la maximisation le plus général n'a pas de signification (ou est non scientifique), mais sa version particularisée constitue une hypothèse scientifique positive.

 

Certains auteurs ont essayé d'échapper à ce problème en affirmant que le cadre (maximisateur) peut être réfuté en le comparant à un cadre alternatif empiriquement plus riche et plus général. De fait, Lakatos est allé jusqu'à dire qu'"il n'y a aucune falsification avant l'émergence d'une meilleure théorie." [13] Ceci veut dire, en somme, que si deux hypothèses - l'une maximisatrice et l'autre non maximisatrice - "expliquent" toutes deux aussi bien un cas particulier de comportement économique, alors il faut préférer celle qui fait partie d'une approche plus générale, dont les applications spécifiques ont été vérifiées dans d'autres cas. Cependant, ceci introduit une modification subtile et importante du critère de falsification. Un énoncé n'a plus de signification ou n'est plus scientifique en vertu de son contenu empirique mais plutôt en raison du contenu empirique global des autres énoncés auquel il est associé en un certain sens. Il s'agit plus d'un critère esthétique qu'épistémologique. [14] Néanmoins, en raison d'un raisonnement inexplicable, un énoncé se met à posséder une signification à cause de son lien avec d'autres énoncés similaires qui, ayant été corroborés, possèdent eux-mêmes une signification en vertu de leur relation avec, par exemple, la première hypothèse. (Il y a apparemment une certaine forme d'argumentaire de "détermination simultanée du sens" derrière tout ceci.)

 

Étudions ce problème d'une manière légèrement différente. Le cadre maximisateur "prouve" sa valeur, pourrions-nous dire, en prédisant tout ce qu'un cadre alternatif peut faire, ainsi qu'un petit peu plus. [15] Par conséquent, il permet d'une certaine façon la falsification d'une perspective alternative.

 

Cette formulation ne semble pas très convaincante. Il serait surprenant qu'en économie, au moins, le cadre maximiser puisse prédire tous les faits prédits par les autres cadres. Normalement, je pense, le "meilleur" cadre devrait prédire certains de ce faits, plus d'autres. De plus, des cadres concurrents ne se posent généralement même pas ce genre de questions. Pourquoi, dès lors, devraient-ils être jugés sur le fait qu'ils fournissent les mêmes réponses (avec un petit plus) ?

 

Tout ceci mis de côté, il est difficile de voir pourquoi, du point de vue d'une perspective épistémologique purement positiviste, des considérations sur le succès du cadre d'étude dans d'autres situations devraient affecter la signification d'une hypothèse dans un cas particulier donné.

 

V. Les preuves

 

Jusqu'à maintenant, nous avons implicitement considéré comme allant de soi la réponse à la question : "Qu'est ce qui devrait être accepté comme preuve pour ou contre une hypothèse ?" Comment reconnaître un résultat falsifiant ou corroborant ? La réponse est loin d'être évidente. En fait, cette question pose quelques problèmes cruciaux à l'approche positiviste. Et nous prétendons que cette dernière est incapable de les traiter.

 

Une hypothèse relie une variable x à une variable y, ceteris paribus. Supposons que la clause ceteris paribus ait été corroborée de manière adéquate. A quoi revient la falsification de l’hypothèse ? Pour parler plus précisément, faisons l'hypothèse "qu'un accroissement substantiel de la quantité de monnaie [...] aille de pair avec une hausse substantielle des prix." [16] Afin de tester cet énoncé, nous devons avoir un critère qui nous permet d'associer les termes théoriques de "monnaie" et de "prix" à des contreparties empiriques. Ceci est le nœud du problème. [17]

 

Quelque chose doit autoriser le passage de la théorie vers les "faits" pertinents. Nous avons besoin de ce qu'il faut appeler "des énoncés de référence." Dans notre cas, des exemples de tels énoncés de référence pourraient être : "La contrepartie empirique du terme théorique de "monnaie est M1 ." ; ou : "par ‘prix', il faut comprendre l'indice des prix à la consommation." Le besoin d'énoncés de référence en économie appliquée n'est pas restreint à la variante positiviste de la science. Ce qui est particulier à l'économie positiviste, toutefois, est le problème survenant du statut épistémologique de tels énoncés. S'ils sont considérés a priori, alors (du point de vue positiviste) nous parlons tout simplement de l'utilisation des mots, et nous n'avons établi aucun lien entre des constructions théoriques et la "réalité empirique." Il faut alors l'établir par des hypothèses falsifiables. C'est cependant impossible. (Des énoncés de référence ne font aucune prédiction : ils ne disent pas, par exemple, qu'une augmentation de x conduit à une augmentation de y. Par conséquent, aucune prédiction ne peut être falsifiée.)

 

Il est alors possible de reformuler les énoncés de référence d'une façon qui les rende réfutables : "Si les critères d'application de la construction théorique de ‘monnaie' sont, de fait, appliqués, alors M1 se révèlera être la contrepartie empirique appropriée." Il est clair que ça ne marche pas parce que cela demanderait de connaître les critères avant la procédure de test qui est censée les établir (ou au moins les corroborer).

 

Tester les énoncés de référence est impossible à moins de connaître les critères d'application des termes théoriques. Si nous les connaissons déjà (d'une manière ayant une signification quelconque), alors le test est superflu. Mais, dans une perspective positiviste, il est clairement impossible de posséder une connaissance quelconque, donnée a priori et ayant une signification concernant le monde réel.

 

On pourrait essayer d'éliminer ces difficultés en choisissant des variables empiriques pour présenter l'hypothèse particulière sous son meilleur jour. (Choisir une définition de la quantité de monnaie de telle sorte qu'elle prédise au mieux le PNB est un exemple de ce genre.) A moins que l'on essaie d'éliminer la réfutation d'une hypothèse, il ne semble y avoir aucune raison de procéder ainsi. Si les variables empiriques étaient choisies pour présenter l'hypothèse sous son plus mauvais jour, et qu'elle restait non réfutée, ne l'aurait-on pas encore mieux corroborée ? En tout état de cause, le résultat d'un test potentiel ne devrait pas être le facteur déterminant pour le mener.

 

VI. La caractéristique logique de la praxéologie

 

Le statut épistémologique de la praxéologie (qui est identique à l'économie conçue dans un sens très large) est l'objet d'une grande confusion et de nombreuses erreurs de compréhension. Au sein d'un cadre positiviste, les affirmations de la praxéologie n'ont aucun sens. La connaissance est soit a priori et certaine mais n'a aucun rapport avec la "réalité," où est empirique et incertaine mais fait clairement partie du monde "réel." Un examen de la caractéristique logique de la praxéologie révèle que ces catégories ne sont pas du tout appropriées. La praxéologie affirme offrir une connaissance qui est à la fois absolument certaine et empirique. C'est le paradoxe que nous devons expliquer.

 

Les théorèmes ou déductions praxéologiques sont fondés sur l'axiome fondamental évident qui est que l'homme agit ou, ce qui revient au même, qu'il a un comportement ayant un but. La question est alors : dans quel sens précis cet axiome est-il "évident" et que dit-il à propos du monde ?

 

L'axiome de l'action est empirique au sens qu'il découle de l'expérience intérieure ou de l'introspection directe. Il est scientifiquement empirique parce qu'il passe le test de l'intersubjectivité : l'expérience est universelle et donc, par principe, peut être acceptée de la même façon par les observateurs et les observés. Par conséquent, le fait que l'axiome soit basé sur l'introspection ne permet pas d'accuser la praxéologie du fait que ses déductions soient purement personnelles et de caractère non scientifique. Nous disposons ici d'une "expérience intérieure universelle." [18]

 

Une tentative de nier l'axiome d'action implique une auto-contradiction flagrante. La négation consiste à utiliser des moyens (des arguments) pour aboutir à des fins (une conclusion) et donc à avoir un comportement ayant un but. De plus, la supposition selon laquelle les hommes agissent est un préalable nécessaire à l'existence d'une communauté scientifique. Les arguments, les tentatives faites pour convaincre les autres chercheurs ayant un autre point de vue, etc., sont tous fondamentalement basés sur une conception des scientifiques eux-mêmes comme s'engageant dans un processus ayant un but. Mettre à part les scientifiques, et dire qu'alors que les observateurs agissent, les observés n'agissent pas, semblerait être artificiel et aucun soutien ne peut être apporté à cette attitude.

 

Bien que l'axiome d'action soit empirique et allant de soi, il est en un certain sens également a priori. [19] Le fait que l'homme agisse est un préalable logique à toute manifestation concrète de l'action. En fait, on doit avoir un concept de l'action avant même de reconnaître une action dans le monde appelé réel. L'axiome d'action découle de l'expérience intérieure absolument certaine mais est a priori pour les phénomènes historiques. L'Histoire, comme ensemble de comportements humains, s'analyse et s'interprète grâce aux théorèmes praxéologiques qui, à leur tour, découlent de l'expérience relativement simple.

 

La praxéologie concerne la forme de l'action en tant qu'action. Le fait qu'elle ne s'intéresse pas à une action particulière ou à une autre, ne signifie pas qu'elle ne s'occupe que de mots. La catégorie de l'action concerne toute action qui a eu ou va avoir lieu, sans faire référence à son contenu spécifique. En tant que telle, elle ne se consacre pas moins à la "réalité" que tout énoncé empirique généralement reconnu. Tous les énoncés sur le monde comportent un certain degré d'abstraction et ce n'est donc pas l'abstraction des déductions praxéologiques qui est n’en cause. Ce qui peut avoir un rapport est le fait qu'elle soit incapable d'être falsifiée. Par principe, l'énoncé "l'homme agit" ne peut pas être falsifié car il est impossible de concevoir le contraire. Ce n'est pas parce que nous traitons simplement d'une définition arbitraire de "l'homme" comme être agissant. C'est plutôt parce que notre connaissance de l'homme empirique en tant qu'être agissant est à la fois si intime et si nécessaire qu'un être purement réactif ne serait pas humain dans le seul sens que nous pouvons concevoir. Les concepts d'homme et de comportement tourné vers un but sont aussi fortement liés non en raison d'une définition arbitraire mais parce qu'ils sont nécessairement liés dans la réalité empirique. Notre langage reflète quelque chose de réel et nécessaire.

 

La praxéologie appliquée à l'Histoire (considérée au sens large pour inclure l'Histoire actuelle) ne dépend pas seulement des déductions faites à partie de l'axiome d'action. Elle réclame des hypothèses subsidiaires déduites empiriquement afin de réduire le domaine d'étude du système praxéologique. [20] Par exemple, nous ne voulons pas développer de théorie monétaire dans un monde sans monnaie. Les hypothèses empiriques supplémentaires ne sont pas évidentes ou nécessairement vraies comme l'est l'axiome d'action. On pourrait en concevoir d'autres, bien qu'elles puissent être virtuellement certaines (par exemple, l'existence de l'échange indirect). Comme elles ne sont pas certaines, il en est de même de l'application des énoncés praxéologiques qui en découlent.

 

Pour accroître le caractère quantitatif des relations de la praxéologie appliquée (l'histoire économique), nous avons besoin d'hypothèses supplémentaires de plus en plus spécifiques : ces hypothèses doivent devenir à la fois plus nombreuses et plus précises. Bien entendu, ceci conduit à des conclusions qui ne sont plus apodictiquement certaines. Dans notre terminologie, nous nous référons à la praxéologie appliquée comme à des hypothèses (pour indiquer leur nature hésitante). Ainsi, alors que la théorie économique est immuable et nécessaire, les hypothèses économiques peuvent changer et pourraient être différentes. La vision de la théorie économique comme ensemble d'énoncés hypothétiques sur le monde (qui pourraient être réfutés) est implicitement la position selon laquelle la connaissance de la réalité sociale se réduit uniquement à la connaissance historique.

 

VII. Le rôle de l'économétrie

 

Bien qu'il puisse sembler que l'économétrie n'ait aucun rôle dans le progrès de la théorie économique (définie comme déductions tirées de l'axiome d'action), ceci n'est pas tout à fait exact (bien qu'il puisse s'agir d'une approximation de la vérité valable au premier ordre). Des régularités statistiques peuvent être le point de départ de recherches purement théoriques, pour autant qu'elles soulèvent des questions qui concernent le praxéologue lui-même. Mais le lien est ici plus suggestif que logique.

 

Le rôle central de l'économétrie se trouve dans l'application de la théorie économique aux phénomènes complexes de l'Histoire (actuelle ou passée). Il y a deux questions auxquelles l'économétrie peut apporter un éclairage :

 

1. Jusqu'à quel point peut-on expliquer un exemple donné (historique) du comportement humain en fonction d'une activité ayant un but, c'est-à-dire combien de choses l'hypothèse praxéologique peut-elle expliquer ?

 

2. Quelle est l'amplitude de l'effet de x sur le phénomène complexe dans son ensemble, y, à un moment donné ?

 

En ce qui concerne la première question, il est important de comprendre que si l'homme agit nécessairement, il ne s'ensuit pas qu'il agisse toujours, c'est-à-dire qu'il n'est jamais capable de réponse automatique à un stimulus ou de tout autre comportement sans but. Jusqu'à quel point un phénomène historique donné est-il le résultat d'une émotion aveugle sans aucun but ? La réponse ne peut pas être donnée a priori. [21]

 

En ce qui concerne la seconde question, il est important de garder à l'esprit le fait que le raisonnement praxéologique ne peut pas donner par lui-même de relations quantitatives (ni même de relations qualitatives si des forces antagonistes sont en présence) en histoire économique. Pour ce faire, les recherches statistiques sont notre seul recours. Cependant, il est important de ne pas interpréter les relations économétriques comme de grandes constantes universelles, valables pour toutes les situations et à toutes les époques. Ces relations ne sont pas théoriques mais simplement historiques. Extrapoler ces dernières aux premières réclame un saut inductif auquel nous ne sommes préparés.

 

En répondant à ces questions, les preuves économétriques ne peuvent pas, bien sûr, nous donner la même certitude que le raisonnement praxéologique. Les réponses de l'histoire économiques seront toujours incertaines. Néanmoins, il ne s'agit pas de l'incertitude de la théorie économique : il s'agit plutôt d'une incertitude inhérente à l'application d'une structure (incluant la forme de l'action) à des actions historico-temporelles possédant un contenu particulier. L'application de la théorie à l'Histoire n'est pas un exercice de déduction : elle nécessite l'usage du jugement ou de la compréhension (verstehen) pour définir les variables pertinentes et les moyens appropriés de les mesurer.

 

Un avertissement est cependant nécessaire. L'économétrie devrait uniquement être un outil pour appréhender les phénomènes historiques. Il est clair que les questions intéressantes ne sont pas toutes quantifiables. Si nous essayons d'expliquer des phénomènes complexes avec pour seule référence les variables quantifiables, alors nous éliminons probablement certaines informations que nous possédons. Un autre danger est de commencer à identifier la réalité avec les données statistiques alors qu'en fait il ne s'agit que d'un aspect de la réalité, d'une transformation particulière d'une expérience plus élémentaire. Il n'y a pas de raison pour laquelle une façon de concevoir l'Histoire devrait être identifiée avec l'Histoire elle-même ou, ce qui est encore pire, avec toute la réalité sociale.

 

VIII. Conclusions et questions non résolues

 

Le but de cet article est tout d'abord de présenter une analyse critique de "l'économie positive" et ensuite d'étudier l'alternative praxéologique. C'est dans ce dernier domaine qu'une grande somme de travail convient d'être faite. A ce stade un certain nombre de conclusions peuvent néanmoins être tirées :

 

1. Une véritable approche positiviste ne peut pas être poursuivie avec logique. Le cadre positiviste crée certains problèmes qui se révèlent insolubles au sein de ce cadre.

 

2. Bien que la praxéologie concentre son attention sur l'action en tant qu'action, c'est-à-dire séparée de l'Histoire et vidée de son contenu spécifique, elle porte tout de même sur la réalité. La forme de l'action n'est pas moins réelle que toute autre abstraction nécessaire pour porter des jugements empiriques généralement reconnus.

 

3. Un problème crucial de la praxéologie est la nature épistémologique de la praxéologie appliquée (l'histoire économique). Comment faire la transition entre constructions théoriques et contreparties empiriques ? Verstehen [comprendre] est une réponse trop vague.

 

4. Le praxéologue étudie-t-il l'histoire économique d'une façon différente d'un économiste positiviste ? Si oui, comment ?

 

En discutant certaines des questions les plus philosophiques de l'économie, nous avons voulu montrer que les questions au jour le jour sur l'explication, la construction d'hypothèses et les tests ne nous conduisent pas vers un vide philosophique. Nous n'avons pas de choix s'il s'agit de prendre des décisions méthodologiques. Notre choix est plutôt entre (a) les prendre explicitement, en examinant les diverses implications et subtilités de sens, et (b) les prendre implicitement, en restant aveugles à tout sauf à la technique.

 

Mario J. Rizzo

 

Références

 

[1]. Milton Friedman, "The Methodology of Positive Economics," Essays in Positive Economics (Chicago, 1953), p. 7. [Traduction par Guy Millière dans la collection LIBERALIA : "La méthodologie de l'économie positive' dans Essais d'économie positive (Litec, 1995), p. 6. NdT]

 

[2]. Voir en particulier Karl Popper, Logik der Forshung (Vienne, 1935). La traduction anglaise est intitulée The Logic of Scientific Discovery (Londres, 1962). D'autres travaux sur les questions sont Rudolf Carnap, Philosophy and Logical Syntax(Londres, 1935) et A.J. Mayer, Language, Truth and Logic, 2ème édition (Londres, 1946).

 

[3]. Stephen Toulmin, Foresight and Understanding: An Inquiry into the Aims of Science (Bloomington, IN, 1961), p. 28.

 

[4]. Op. cit., p. 28.

 

[5]. Certains philosophes, comme Popper, en font le critère de la science, et non de la signification. Cependant, une telle modification n'a pas d'influence sur notre argument principal car nous devons alors revenir à la question de savoir pourquoi nous définissons la "science" de cette façon. Voir la partie I ci-dessus.

 

[6]. Friedman, p. 11 [p.9 de l'édition française. NdT]

 

[7]. Moritz Schlick, Gesammelte Aufsätze, 1926-1936 (Vienne, 1938), p. 179 cité par Brand Blanshard, Reason and Analysis (LaSalle, IL, 1964), p. 224.

 

[8]. Blanshard, p. 229.

 

[9]. Le mot "contraire" est utilisé ici dans sons sens technique. Par conséquent l'énoncé "aucune inflation ne résulte d'une augmentation de la quantité de monnaie" n'est pas le contraire de l'énoncé du texte. Il en est ainsi parce que si "aucune inflation ne résulte d'une augmentation de la quantité de monnaie" est fausse, alors soit "certaines inflations ne résultent (pas)..." est vrai, soit "toutes les inflations résultent..." est vrai. "A et O sont des contraires ou négations mutuelles : A est vrai si et seulement si O est faux." A ce sujet, voir W.V. Quine, Methods of Logic, 3ème édition (New York, 1972), p. 84.

 

[10]. Blanshard, p. 229.

 

[11]. La conception générale de cette partie et de la suivante est tirée de Martin Hollis et Edward Nell, Rational Economic Man (Cambridge, Angleterre, 1975), passim. Toutefois, dans plusieurs cas, le raisonnement est différent (le lecteur doit se garder d'en déduire que les mêmes remarques sont faites) alors que dans d'autres cas l'argument est étendu.

 

[12]. Dans un contexte assez différent, Friedman dit : "Si une hypothèse est conforme aux données disponibles, il existe toujours un nombre infini d'autres hypothèses qui le sont aussi." Friedman, p. 9 [p. 8 de l'édition française, NdT].

 

[13]. Imre Lakatos, "Falsification and the Methodology of Scientific Research Programmes," Criticism and the Growth of Knowledge, Imre Lakatos et Alan Musgrave, eds. (Cambridge, Angleterre, 1970), p. 119.

 

[14]. Friedman pp. 10, 20.

 

[15]. Lakatos, p. 118.

 

[16]. Frideman, p. 11.

 

[17]. La plupart de ce qui suit dans cette partie provient de Hollis et Nell, chapitre 4. Cependant, le lecteur doit noter que nos énoncés de référence ne sont pas des "énoncés de critère" [criterial statements] de Hollis et Nell.

 

[18]. Murray N. Rothbard, "In Defense of ‘Extreme Apriorism'," Southern Economic Journal (janvier 1957), p. 318 [traduit par François Guillaumat dans la collection Laissez Faire : L'"apriorisme extrême" (chapitre 3), Économistes et charlatans(Les Belles Lettres, 1991), NdT].

 

[19]. Ludwig von Mises, Human Action, 3ème édition (Chicago, 1966) chapitre 11.

 

[20]. Op. cit. pp. 64-66

 

[21]. Pour quelques observations préliminaires sur ces questions, voir Murray N. Rothbard, "Praxeoloy: Reply to Mr. Schuller," American Economic Review (décembre 1951), p. 945.

 

Traduction :  Hervé de Quengo

 

 

New Directions in Austrian Economics,

 

édité par Louis M. Spadaro (Kansas City: Sheed Andrews and McMeel, Inc., 1976)

 

repris dans Austrian Economics: A Reader, édité par Richard M. Ebeling

 

(The Ludwig von Mises Lectures Series, volume 18, Hillsdale College Press)

 

 

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