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"Monnaie euro", prix et taux
d'intérêt.
La "monnaie euro" cache des variations de prix en monnaie qui
auraient dû se faire (cf. par exemple ce billet du 5 juillet 2008), qui ne se
sont pas faites, mais dont la réalisation potentielle ne peut
être mise de côté et la nécessaire exclue.
Ces variations de prix ne sont pas à confondre avec celles à
quoi elle a déjà donné lieu (cf. par exemple, ce billet de juillet 2009).
1.A. Blocage des taux de change.
La "monnaie euro", c'est en effet d'abord le choix d'un blocage de
prix, celui des taux de change des monnaies nationales concernées au
niveau qu'ils avaient en mai 1998.
En ce qui concerne la France :
1 € = 6,55957 FF
Ce choix a été effectué contractuellement par les hommes
de l'Etat des Etats futurs membres, le représentant français
était le ministre de l'économie et des finances de
l'époque, M. Strauss Kahn :
Rien ne saurait justifier les taux de change convenus - et a fortiori la
pérennité qu'ils cachent -, sauf, peut-être, l'aune des
règles budgétaires, elles aussi convenues, mais l'année
précédente (cf. par exemple, ce billet du 14 février 2010).
Mais ces dernières ne seront pas respectées!
1.B. Fixation des taux
d'intérêt aléatoire.
La "monnaie euro", c'est aussi la politique de fixation des taux
d'intérêt à court terme par son grand chambellan,
à savoir la Banque centrale européenne.
Mais là encore, rien ne saurait justifier les niveaux des taux
d'intérêt qui ont été pratiqués sinon la
capacité que la Banque avait de les fixer à sa main et qui
tenait à son privilège de monopole d'émission de la
"monnaie euro", monnaie elle-même d'utilisation obligatoire
pour les gens effectuant des échanges dans les limites de son
territoire de juridiction.
Malgré ce que certains veulent faire croire, il n'y a pas de
règle établie en la matière.
De plus, en quoi cette expérience de monopole réglementaire
supplémentaire serait-elle le facteur de stabilité que certains
s'époumonent à déclamer ?
Il s'agirait de l'expliquer, ce qu'ils auraient grande peine à
faire...
La politique de fixation des taux d'intérêt aléatoire n'a
fait qu(e s)'ajouter au
blocage des taux de change.
Quoiqu'elle, au moins, ne soit pas cachée et donc oubliable, ses
effets n'ont pu qu'être déstabilisants comme ceux de son
homologue.
2. Toujours la
rhétorique au mauvais sens du mot.
Les expressions "chocs macroéconomiques exogènes" ou
"risques systémiques" sont à la mode depuis au moins
"les augmentations du prix du pétrole" dans la
décennie 1970, présentées comme telles.
Depuis lors, les politiques et autres commentateurs n'hésitent pas
à les employer dans leurs discours ou articles pour expliquer tel ou
tel phénomène économique, monétaire ou autre,
voire d'éventuels effets de celui-ci, au moins le croient-ils ou
espèrent-ils le faire croire.
Avec cette façon de s'exprimer, ils excluent "par
construction" de donner les causes de ce dont ils parlent, d'où
les dénominations.
Effet "collatéral" - nouvel adjectif à la mode -, ces
expressions doivent-elles contribuer à convaincre qu'on vit dans un
monde économique mécanique et magique ?
On peut le penser d'autant qu'en définitive, les effets ne sont pas
eux-mêmes, trop évoqués ou que l'explication qui en est
donnée ne convainc personne, à la longue.
Et puis, il peut s'agir d'effets une fois pour toutes ou d'effets
récurrents, d'effets à court terme ou à long terme pour
rester dans le fil de la même rhétorique.
Et les effets à court terme inattendus qui se produisent peuvent
être pris pour donner lieu à d'autres effets qui,
rétrospectivement, s'avèreront à moyen ou long terme et
renforceront les effets à long terme, eux-mêmes inattendus.
3. La
réalité.
Il n'en reste pas moins que ces expressions recouvrent une double
réalité:
- l'une, sur quoi ils insistent implicitement, tient à un trouble, une
perturbation, une inégalité inattendue de l'offre et de la
demande sur tel ou tel marché ou bien un déséquilibre
inattendu jugé "conjoncturel" ou "structurel" qui
doivent se résorber, et
- l'autre, dont ils ne parlent pas, se trouve dans la nouvelle
réglementation de plus, en marge des règles de droit, qui
alimente à la fois le stock des réglementations et
l'insécurité juridique.
Le fait est que les trouble, inégalité
ou déséquilibre se résorbent à terme plus ou
moins éloigné par variation de prix ou de taux
d'intérêt, comme l'explique la théorie économique,
même si nos politiques ou commentateurs pensent le contraire.
Il est aussi que ces derniers croient que les politiques monétaire ou
budgétaire de l'Etat peuvent y suppléer et qu'ils les mettent
en oeuvre malgré les résultats qu'on
sait et supporte.
On laissera de côté la fameuse phrase toute faite "ce
serait pis si la politique n'avait pas été suivie...", des
billets précédents en ont montré l'inanité.
Quid de la
nouvelle réglementation de plus?
Aucune réglementation n'est perpétuelle.
Il arrive toujours un jour où ses effets néfastes sont
observables sans discussion possible, sont reconnus car vécus, et
où elle est abrogée (la réglementation dite "des trente cinq heures" a, certes, la "peau
dure"...).
Les effets en question peuvent, bien sûr, être à court
terme ou à long terme.
Toute la difficulté est d'arriver à mettre le doigt sur la
réglementation, étant donnés les effets observables ou
supportés.
4. Un effet à long
terme de réglementations passées.
Jamais aujourd'hui, par exemple, il n'est question de considérer que
la situation économique actuelle et la "monnaie euro" soient
l'effet de telle ou telle réglementations édictées dans
le passé.
A contrario, mais
cela revient au même, jamais il n'est question des effets à long terme de
réglementations comme, par exemple, les interdictions de la
convertibilité des substituts de monnaies nationales (billets et
dépôts bancaires) en monnaie or qui ont fleuri, nationalement,
dans la décennie 1930 et, internationalement, depuis 1971-73 (cf. ce billet de juillet 2011).
Je pose la question : "pourquoi ?"
Est-ce à dire que ces réglementations n'ont pas eu d'effet ? Ou
bien seulement des effets à court terme, sans lendemain?
Dans ce cas, il s'agirait au moins de le montrer.
A l'opposé, serait-ce parce qu'une réponse pourrait être
que tous les maux actuels ne sont jamais que les effets à long terme
de ces réglementations ?
Serait-ce parce qu'ils sont même des effets accrus à cause de
l'entêtement, conscient ou non, des politiques dans la destruction des
monnaies nationales sorties de la "cuisse de l'histoire" et dans la
construction, à la place, de "substituts de rien" bancaires
dénommés encore aujourd'hui, contre toute connaissance,
"monnaies"?
La "monnaie euro" n'en est-elle pas un parangon?
Les questions bouillonnent!
5. Vie ou mort du
parangon.
Une chose est certaine : le problème de l'existence ou de la
"mort" de la "monnaie euro" ne saurait être
traité à partir des modèles macroéconomiques en
circulation pour la raison que ces modèles excluent l'alternative et
se moquent des règles de droit. Y faire référence
est nul et non avenu.
Les modèles font intervenir seulement la variable "quantité
de 'monnaie euro'".
Or il y a un précipice méthodologique infranchissable entre une
quantité de "monnaie", fût-elle égale à
zéro..., et une monnaie qui n'existe pas ou plus.
Des artifices rhétoriques ne sauraient le faire franchir.
La "monnaie euro" et sa quantité font deux, ce que
(néo)keynésiens et (néo)monétaristes refuseront
d'admettre malgré l'impasse où ils se trouvent.
Bref, à partir de la macroéconomie, on ne saurait envisager la
"mort" de la "monnaie euro".
Seule la logique est d'une aide certaine.
L'important est donc la "monnaie euro".
Et celle-ci est blocage de taux de change, fixation de taux
d'intérêt à court terme aléatoire et effet
à long terme d'interdictions antérieures écarté,
consciemment ou non.
Sur les conséquences à attendre du paquet de ces
éléments, aucun "officiel" n'a aventuré sa
réflexion ou n'en a fait mention.
Mais nous les voyons désormais "se déballer" sous nos
yeux les unes après les autres...
Et elles enrichissent, chaque jour qui passe, ce qu'il faut entendre par
"monnaie euro".
Elles rappellent en particulier que la monnaie n'est pas un bien, sauf
à prendre ce mot au sens moral.
La monnaie est un processus de diminution du coût de l'échange
que personne ne saurait accaparer et maîtriser, même s'il en
donne l'impression et s'efforce de trouver les moyens d'y parvenir.
Pour le comprendre, il faut bien évidemment raisonner en termes de
droit, d'actions humaines et de coûts des actions humaines, autant de
considérations exclues par les modèles macroéconomiques.
Faut-il s'en satisfaire ? A chacun ses goûts...
A coup sûr, les hommes de l'Etat des Etats membres n'en sont pas
satisfaits.
Et fidèles à leur démarche aveugle initiale, ils ont
fait le choix d'abonder les éléments de base avec d'autres
réglementations (par exemple, la facilité européenne de
stabilité financière - F.E.S.F. -).
Paquet de réglementations au départ, la monnaie euro" tend
à devenir un "château de ...
réglementations"...
Georges Lane
Principes
de science économique
Georges
Lane enseigne
l’économie à l’Université de Paris-Dauphine.
Il a collaboré avec Jacques Rueff, est un membre du séminaire
J. B. Say que dirige Pascal Salin, et figure parmi les très
rares intellectuels libéraux authentiques en France.
Publié
avec l’aimable autorisation de Georges Lane. Tous droits
réservés par l’auteur
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