Voilà un sujet passionnant qui agite la “toile”, c’est-à-dire Internet,
chacun y allant de sa théorie et nous prédisant cataclysme et fin du monde à
chaque nouvelle information.
Ceux qui me lisent régulièrement savent à quel point je ne suis pas
véritablement un “optimiste béat” sur l’état de notre monde en général et de
notre économie en particulier.
Oui les choses vont plutôt mal, oui nous dansons sur plein de volcans, et
nos déséquilibres financiers sont majeurs. Ils laissent présager d’autres
phases de crise qui seront des phases paroxystiques, mais, mais, mais mes
amis, personne, pour le moment et c’est valable depuis ce que l’on nomme la
crise des subprimes de 2007, soit 10 ans maintenant, personne n’a intérêt à
ce que notre monde s’effondre.
Des horizons de temps différents, comme plusieurs portées
musicales
C’est un peu comme la musique. Vous avez plusieurs portées. En politique,
dans les relations internationales ou encore en économie, vous avez plusieurs
horizons de temps qui peuvent évoluer parfois en donnant l’impression de le
faire dans des directions contradictoires.
Néanmoins, lorsque l’on prend un peu de recul et que l’on essaie
d’apercevoir le tableau d’ensemble, l’image globale, elle, est souvent d’une
netteté et d’une logique surprenante.
Samedi soir, lors d’un dîner en ville, on me demandait pourquoi l’Europe
voulait inciter la Catalogne à l’indépendance alors que cela pouvait menacer
la zone euro et créer de grosses difficultés aux banques espagnoles et donc à
l’ensemble du système bancaire européen.
Si en façade cela peut sembler incohérent ou contradictoire, il n’en est
rien en réalité, car il y a deux horizons de temps qui s’affrontent. À long
terme, pour créer une belle Europe fédérale loin des États-nations qui
l’empêchent, il faut casser et éradiquer ces “pays”, ces souverainetés, et
ces nationalismes d’autrefois.
À court terme, tout le monde sait bien qu’un tel processus va provoquer
quelques conséquences désagréables comme des remous sur les marchés, des
chocs financiers ou bancaires, ou encore quelques petites crisounettes
économico-politiques. Mais tout cela n’est rien face aux enjeux de long
terme. C’est également des menus problèmes sur l’échelle de temps
“géologique” de la construction européenne ou à l’échelle historique.
Il n’y aura rien d’insurmontable à la crise catalane pour l’Europe. La BCE
imprimera à la fin des billets en nombre suffisant. Les banques espagnoles
seront vite sauvées, et pour sauver la face, elles ouvrent toutes en urgence
un siège à Madrid ou ailleurs en Espagne qui restera dans la zone euro, et
déjà les appels se multiplient pour que l’Europe fasse preuve de
“pragmatisme”. Entendez par là que l’Europe n’applique pas les règles et
trouve des solutions du genre négocier en même temps l’adhésion de la
Catalogne à l’Union européenne et sa sortie de l’Espagne… Bref, l’Europe
évidemment y avait déjà largement pensé et les solutions existent déjà dans
l’esprit de nos europathes qui savent très bien comment ils agiront et les
deux horizons de temps se réuniront, en formant la partition de la belle
symphonie européenne dont ils rêvent.
C’est la même chose pour le pétroyuan
Si on s’arrête à une première lecture, on va se dire, bien, ça alors ! La
Chine va payer son pétrole en or, ce qui est stupide quand on est le plus
gros importateur de pétrole de la planète, cela veut dire que l’on est sûr de
s’appauvrir de son or tous les mois !! De la même façon, si la Chine provoque
l’effondrement du dollar alors qu’elle en est le premier détenteur, ce serait
comme se tirer une balle dans le pied de ses 3 500 milliards de dollars de
réserve de change.
Alors que faut-il comprendre ?
En substance, et c’est ce que je vous explique longuement dans cette
vidéo, la Chine veut utiliser l’or non pas directement mais “comptablement”,
pour ne plus avoir à utiliser le dollar dans ses transactions commerciales
avec les pays sous embargo ou sanctions américaines, pour ne pas que ses
entreprises risquent des amendes records comme celles qui furent imposées aux
entreprises européennes et françaises dont notamment la BNP et sa pénalité
record de 9 milliards de dollars.
La Chine ne va pas provoquer d’effondrement du dollar qui serait
totalement contre-productif pour elle. Elle vise une politique réelle de
souveraineté et d’anticipation en ayant retenu les leçons de ce que les USA
peuvent faire à l’Europe, leçon que les Européens, eux, ne retiennent pas.
Pour nous, les marchés se ferment.
La Chine, elle, ne veut ni devoir se soumettre aux amendes américaines ni
se fermer certains marchés parce qu’elle en a aussi un besoin vital en terme
d’accès à l’énergie.
La Chine commercera donc avec une nouvelle monnaie qui n’a rien à voir
avec le dollar uniquement pour éviter des sanctions et ne l’utilisera qu’avec
certains pays pour éviter de déstabiliser tout le système monétaire.
La “dédollarisation” du monde et la “désaméricanisation” de l’économie
mondiale sont des réalités profondes, mais nous avons affaire à un processus
de long terme. Cela se fera de façon très progressive car il n’est de
l’intérêt de personne d’effondrer l’ensemble des équilibres précaires qui
rendent ce monde à peu près vivable et supportable pour la plus grande
majorité, malgré toutes ses imperfections.
Il est déjà trop tard, mais tout n’est pas perdu. Préparez-vous !