Les quantités d’or
et d’argent physique disponibles étant restreintes, les
marchés de l’or et de l’argent sont haussiers. Plus
simplement, disons que les obligations sur ces marchés excèdent
les quantités de métal disponibles. Je me souviens d’une
situation similaire, du temps où je pratiquais encore des
opérations boursières. Je me servirai de cet exemple pour
illustrer mes propos.
L’effondrement des prix de
l’immobilier en Grande-Bretagne en 1974 entraînait une chute du
prix des actions de l’ordre de 90%. Une compagnie, cependant,
résista à cet effondrement : London Bridge Securities. Les
actions de LBS demeurèrent stables dans la mesure où les
directeurs et employés de la compagnie les rachetaient. Après
quelques temps, ils se trouvèrent inondés de vendeurs à
découvert, et le prix de l’action LBS chuta soudainement. Les
directeurs de la compagnie réalisèrent finalement que leurs
employés ainsi qu’eux-mêmes possédaient plus de
100% de leur compagnie. Ils en vinrent à le comprendre lorsque les
vendeurs à découverts furent incapables de délivrer
quelque contrat que ce soit, et qu’aucun des actionnaires existants
n’était préparé à leur en vendre. Le
résultat en fut une opération de rachat d’actions par
système d’enchères, durant lesquelles le prix de
l’action fut accru jusqu’à ce que les actionnaires soient
prêts à vendre leurs actions.
La position à découvert fut
fermée aux environs de trois fois le prix de l’action le matin
même. Le corner sur les positions à la baisse n’avait rien
à voir avec la valeur de la compagnie : il s’est produit
parce qu’un gros spéculateur s’est placé dans une
position incroyable qui se devait d’être couverte. C’est
à peu près là qu’en sont aujourd’hui les
marchés de l’or et de l’argent.
Le marché de l’argent est celui qui
présente de plus de similarités avec l’exemple de London
Bridge. Aux Etats-Unis, il existe quelques banques qui possèdent des
positions à découvert sur le marché à terme de
l’argent, et ce en des quantités qui ne peuvent être
couvertes par les stocks physiques. Les obligations en suspens sont bien plus
importantes que les réserves disponibles. La leçon à
tirer de l’exemple de London Bridge est la suivante : des prix,
durant un corner, peuvent grimper bien plus haut que ce que quiconque puisse imaginer.
Les positions à découvert sur l’or sont moins
évidentes, étant tenues principalement par des comptes
non-alloués dans les banques bullion du
LBMA. Mais elles existent, et les obligations des banques bullion
envers leurs clients aux comptes non-alloués sont bien
supérieures aux quantités d’or physiques qu’elles
possèdent réellement.
Mais il existe une différence vitale entre
mon exemple du marché immobilier de 1974 et les marchés actuels
de l’or et de l’argent. L’investisseur à
découvert auprès de London Bridge Securities avait raison,
puisque LBS a fait faillite peu de temps après. Mais pour ce qui sont de l’or et de l’argent, l’inflation
monétaire actuelle en entraîne une augmentation des prix,
rendant la position des investisseurs à découvert de plus en
plus exposée au fil des jours.
Peut-être que la leçon la plus
importante que nous devrions tirer de la situation de LBS – et
étant applicable à la situation actuelle des marchés des
métaux précieux, qui pourraient bientôt devenir les plus
importants corners de l’histoire – est que très peu
d’investisseurs comprennent réellement ce qui se passe.
C’est là quelque chose à garder en mémoire lorsque
quelqu’un tente de vous faire part de son avis quant à investir.
Alasdair
McLeod
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