Je l’avais ratée, celle là. Au
1er Janvier 2016, la nouvelle mouture du code de l’urbanisme est entrée
en vigueur. Et il sera encore modifié au 1er janvier 2017. Concrètement, à
part un changement de numérotation des articles, le nouveau code sera encore
plus malthusien, et restreindra encore plus l’accès à la constructibilité du
foncier que les précédents. Selon
“la vie immobilière”,
“De nouvelles règles d'urbanisme obligent les mairies à réduire l'espace
constructible, quitte à déclasser certains terrains à bâtir qui passeront
dans la catégorie "simples champs". Au grand dam de leurs
propriétaires, qui voient la valeur de leur bien réduite comme peau de
chagrin.”
“Permis de voler” accordé aux élus politiques
Les règles jusqu’ici applicables rendaient difficiles la création de foncier
constructible. Désormais, elles rendront aléatoire le maintien de la
constructibilité précédemment accordée !
Avant d’évoquer les inconvénients “utilitaires” de ces lois (économiques et
autres), regardons en l’aspect moral. Rappelons que limiter l’usage qu’un
propriétaire peut faire de son terrain est bien une “expropriation”, de
nature réglementaire et partielle, mais expropriation quand même. Elle
devrait donc faire l’objet d’une indemnisation. Mais le nouveau code a
reconduit le tristement célèbre article L160-5, hérité d’une loi de… 1943
(Vichy…), désormais
sous le nom de L105-1, article qui s’assure que de telles indemnisations
ne seront que rarement versées, et que les tribunaux interprètent de surcroît
de façon très restrictive. Citons une fois de plus “la vie immobilière”,
exposant la mésaventure de propriétaires dont les terrains ont été déclassés
suivant la nouvelle procédure, et dont la perte financière est parfois
importante:
"les propriétaires dont les terrains ont été déclassés n’ont droit à
aucune contrepartie financière (...) En d'autres termes, ce déclassement
n'ouvre droit à aucune indemnité, comme le précisel'article
L105-1 du Code de l'urbanisme. Évidemment des recours sont
possibles, mais dans la plupart des cas ils sont voués à l’échec."
Si ce n’est pas du vol légal, dites moi ce que c’est…
Je ne puis que conseiller à ceux qui possèdent un terrain constructible
plutôt en périphérie de ville ou village, mais ne peuvent financer un projet
d’habitation dans l’immédiat, de le revendre avant qu’une malencontreuse
révision de PLU ne vous spolie… Encore faudra-t-il trouver un acheteur peu
avisé !
Le prétexte de la “lutte contre l’étalement urbain”, une fumisterie
mortifère
A l’origine de ce délirant renforcement du droit de prédation publique sur
votre propriété, deux lois. Tout d’abord, la loi dite Grenelle 2 a renforcé
l’obligation de “protéger” les terres agricoles de l’urbanisation, notamment
par la mise en place de périmètres de protections des espaces agricoles et
naturelles (alias PEAN, en France, tout se finit par une abréviation).
Ensuite, la loi ALUR, de la décidément calamiteuse Cécile Duflot, a rendu
"exceptionnelle" la possibilité d’accorder des permis de construire
pour des habitations dans des zones qui sont “normalement” vouées à
l’agriculture. Ce sont bien sûr des bureaucrates qui n’ont jamais planté une
betterave qui décident ce qu’est une terre “normalement vouée à
l’agriculture”, dans une vision figée de ce que doit être une société d’où
toute évolution non décidée par une administration serait bannie.
La justification des pouvoirs publics est toujours la même: “il faut lutter
contre l’étalement urbain”. Celui ci est accusé, je résume, de menacer
l’espace naturel et agricole, et d’augmenter le coût de développement des
services urbains.
Ces deux prétextes sont deux pures fumisteries que j’ai déjà eu l’occasion de
démolir longuement dans plusieurs articles (“arrêtons de
diaboliser l’étalement urbain”, et “les
mensonges de la lutte contre l’étalement urbain” notamment). En voici les
arguments, résumés:
$1- Même si la population urbaine se
mettait à vivre en consommant autant d’espace que la population en habitat de
petite commune rurale (hypothèse d’école totalement irréaliste), même si la
population totale de la France passait de 63 à 75 millions, alors la part
artificialisée de l’espace français passerait d’environ 7-8% aujourd’hui à
13%: pas vraiment de quoi paniquer.
$1- Les chiffres catastrophistes cités
par les médias, selon lesquels “un département est artificialisé tous les 10
ans”, sont faux. La réalité correctement observée par les satellites est
plutôt de l’ordre d’un département tous les 30 ans, sachant que
l’urbanisation actuelle est équivalente à 8 départements: il y a de quoi voir
venir...
$1- Depuis la fin de la seconde guerre
mondiale, la surface agricole utilisée a diminué 3 fois plus vite que la part
des sols artificialisée par l’urbanisation, la grande gagnante de cette
équation étant la forêt, dont la surface a augmenté de la différence. Il est
donc clair que ce n’est pas l’artificialisation du sol qui “grignote”
l’agriculture, mais celle ci qui se contracte car elle a besoin de moins
d’hectares pour satisfaire sa clientèle.
$1- La pénurie de foncier constructible
organisée par l’état a provoqué une bulle immobilière d’origine foncière de
dimensions dantesques (source,
établie à partir des données INSEE), réduisant considérablement le
pouvoir d’achat “logement” des ménages, et plongeant de nombreuses familles
modestes en situation de précarité ou de détresse. Cette bulle se dégonfle
aujourd’hui dans les campagnes et certaines villes moyennes, mais reste
vivace dans les grandes métropoles françaises, là où les difficultés pour se
loger à un coût abordable sont les plus importantes.
$1- Cette hausse des prix a forcé l’exil
de familles modestes en campagne, là où l’habitat utilise plus d’espace, et a
provoqué un “étoilement urbain” qui a paradoxalement augmenté la surface de
contact entre urbanisation et agriculture, et donc les zones de conflit entre
ces deux usages du sol. On ne saurait mieux dire qu’une fois de plus,
une loi étatique a produit l’exact inverse du résultat recherché !
$1- L’enjeu financier de la
constructibilité d’un terrain est telle que, selon de nombreux témoignages, la
corruption liée à l’urbanisme est non négligeable en France, voire, dans
certaines régions (ensoleillées…) endémique, des élus ou de hauts
fonctionnaires locaux n’hésitant pas à monnayer leur pouvoir de choisir
l’endroit “où passe la ligne”.
Les deux lois Grenelle 2 et ALUR auront pour résultat de rendre encore plus
difficile, pour les familles ne pouvant plus se loger en grande ville, de
trouver du logement finançable (“finançable”, et non “bon marché”) en zone
rurale.
A qui profite le crime législatif ?
Les idéologues qui pondent ce genre de monstruosité législative estiment que
l’état doit compenser ces inconvénients en produisant toujours plus de
logement social. Mais il ne peut plus le financer, d’où l’obligation née des
lois SRU (Gayssot) et renforcées par Duflot 1 (avant ALUR) pour les communes
“tendues” de disposer d’au moins 25% de logement social, avec lourdes amendes
à la clé. Résultat, les communes demandent aux promoteurs privés d’inclure
dans toute opération 25% et plus de logements sociaux, vendus à perte au
profit de la mafia du logement social. Perte qui est reportée sur les
logements privés… qui voient donc leurs prix encore augmenter ! Et de toute
façon, l’économie du logement social est viciée à la base, le
logement social est structurellement condamné à la pénurie et au clientélisme.
A la base de ces lois dont on peine à dénombrer les effets prevers de façon
exhaustive, la conjonction d’intérêt de plusieurs lobbies:
$1- Les agriculteurs locataires de leur
terre (Environ 75% de l’agriculture en France) veulent empêcher les
propriétaires-bailleurs de leurs terrains de faire le choix de l’urbanisation
lorsqu’il peut être plus rémunérateur, ce qui est le cas en périphérie
urbaine.
$1- Les fonctionnaires et assimilés, et
bureaux d’études spécialisés, tirant parti de la planification urbaine,
représentent en France environ 50 000 personnes dont beaucoup tiennent des
postes clé de la politique et de l’administration. Et je ne compte pas les
milliers de salariés dans le domaine du logement social…
$1- Les politiciens écolo-marxistes se
donnent une image verte anti-construction et poussent insidieusement à la
collectivisation croissante du logement via sa socialisation.
Conclusion: il faut changer de paradigme urbain et libérer le foncier
en rendant au propriétaire ses prérogatives
Sur la base de prémisses scientifiquement fausses, et pour satisfaire ces
lobbies, les politiciens reconduisent et renforcent depuis les années
70 une vision malthusienne et politisée de la gestion foncière qui n’en finit
plus de montrer ses échecs. Car si les inconvénients ci avant cités sont
réels, aucun des avantages attendus de la réglementation n’est observable:
villes gangrenées de 1300 quartiers sensibles, congestion urbaine toujours
intense, coût de développement des équipements publics hors de contrôle,
maîtrise de l’esthétique des nouvelles constructions plus que discutable,
quartiers anciens en voie de délabrement, etc…
Si la planification du sol par la bureaucratie a pour objectif affiché de
rendre les villes plus agréables, cet objectif n’est manifestement pas
atteint. Il est plus que temps de changer notre paradigme de la gestion
foncière et du développement urbain en acceptant d’accompagner l’étalement
notamment en périphérie des villes grandes et moyennes, plutôt qu’en le
combattant, et en rétablissant le propriétaire foncier dans son plein droit
de propriété. En matière d’urbanisme comme partout ailleurs, la liberté
peut faire bien mieux que la planification !