Selon le financier américain George Soros, la décision des
Britanniques de se retirer de l’UE préfigure “une désintégration pratiquement
irréversible de l’UE”. Et il semblerait en effet que la brèche ouverte par le
Royaume-Uni dans le bloc européen ait donné des ailes à bien d’autres nations
qui réclament à leur tour d’exprimer par voie référendaire leur décision de
rester ou non dans l’Union Européenne. Parmi ces pays, l’Italie… et la France
!
Au total, ce sont désormais plus d’une dizaine de pays européens
qui pourraient être amenés à suivre l’exemple des Anglais à plus ou moins
brève échéance, dans ce que certains observateurs étrangers qualifient déjà
de véritable cascade de dominos à l’échelle du continent.
De plus en plus de nations veulent leur référendum
En première ligne des pays qui pourraient à leur tour connaître un futur
référendum sur le maintien dans l’Union Européenne, on trouve coude à coude l’Italie
et la France, dans lesquels un récent sondage Ipsos Mori a montré que la majorité des
personnes interrogées (entre 55 et 60%) souhaiteraient qu’on les consulte
rapidement sur la question. Suivent ensuite les Suédois, les Belges et les
Polonais qui seraient plus de 40% à vouloir eux-aussi un référendum pour
décider du maintien de leur pays dans l’Union.
Plus perturbant, l’Allemagne elle-même connaîtrait un mouvement de
plus en plus fort de défiance anti-européenne au sein de sa population,
laquelle a le sentiment qu’elle doit payer pour toutes les autres nation
incapables de suivre le rythme imposé par leur pays. Et avec 40% des
Allemands souhaitant un référendum, Angela Merkel se retrouve avec une
proportion de mécontents similaire à ce qu’on retrouve en Espagne ou en
Hongrie.
Enfin, même si le nombre de personnes réclamant un référendum se révèle
plus faible en Slovaquie, au Portugal, en Autriche ou encore aux Pays-Bas
(entre 10 et 20% en moyenne), il ne cesse de progresser sous la pression
de mouvements politiques nationalistes récemment renforcés par la crise des
migrants.
Le Brexit : d’abord une victoire du populisme
Car, si le Brexit est bien une victoire du populisme au Royaume-Uni, il
reflète parfaitement la montée des partis nationalistes un peu
partout en Europe, en réponse non seulement à une hégémonie
politique de Bruxelles de moins en moins bien acceptée, mais aussi à
l’explosion quasiment incontrôlée d’une immigration où se mêlent aide
humanitaire et revendications idéologiques. En France, par exemple, profitant
largement de l’impopularité du président François Hollande
(que les meilleurs sondages créditent d’à peine 11% d’opinions favorable), le
Front National compte bien sauter sur l’occasion du Brexit pour promettre à
son tour l’organisation d’un référendum pour sortir de l’UE
en cas d’élection en 2017. Objectif de Marine Le Pen : transformer l’Union
Européenne en Europe des Nations afin de redonner au peuple
français la maîtrise des quatre leviers essentiels de sa souveraineté :
territoriale, économique, monétaire et législative.
Même son de cloche en Slovaquie ou le Parti Populaire a lancé une pétition
pour demander la tenue d’un référendum, estimant qu’il était temps pour le
pays de “quitter le Titanic européen“, tandis qu’au
Portugal, le Parti Socialiste pourtant pro-UE prévient que la moindre
sanction de l’Union à l’égard du pays sera considérée comme … une
déclaration de guerre ! Et il ne faudra pas attendre davantage de
soutien de la part de ceux qui grattent à la porte de l’Europe depuis des
années (pour des raisons pas toujours très louables), car même la Turquie qui
essaie de persuader tout le monde qu’elle ne cède pas aux vieux démons des
guerres idéologiques d’un autre âge a commenté le départ du Royaume-Uni comme
la preuve que “l’Union des Croisés tombe en morceaux“.
L’économie européenne menacée
Indépendamment des aspirations politiques des mouvements populistes, les
conséquences économiques du Brexit pourraient également inciter de
plus en plus de citoyens européens à demander une révision de leur
appartenance à l’Union. Car, une fois le départ du Royaume-Uni définitivement
entériné (ce qui devrait prendre entre quelques mois et deux ans), il faudra
bien que les autres pays se répartissent la charge qui lui incombait au titre
de sa contribution au budget européen. Par exemple, pour
l’Allemagne, cela représenterait une augmentation de 3 milliards
d’euros par an, suffisamment pour inciter Angela Merkel a vouloir à
tout prix négocier des conditions de sortie “constructives”, sous-entendu qui
préserveraient un partenariat minimum obligeant la
Grande-Bretagne à poursuivre ses versements au budget communautaire.
Et c’est d’ailleurs sur cette question en particulier que les Français
risquent de grincer des dents car, que ce soit pour le Ministre des Affaire
Étrangères comme pour le gouverneur de la Banque de France, il est
hors de question que le Royaume-Uni continue d’avoir quelque influence que ce
soit sur les décisions à venir au niveau européen, et, en gros, plus
tôt on signera la fin de toute relation avec la Grande-Bretagne et mieux on
se portera. Sauf qu’il faudrait peut-être rappeler à nos chers énarques que
l’exclusion totale du Royaume-Uni des instances européennes menace non
seulement la stabilité financière des banques britanniques mais également de
toutes celles des autres pays de l’Union. D’ailleurs, nombreux sont ceux qui
mettent en garde les eurocrates contre une possible crise de
confiance généralisée, non seulement à l’égard de l’économie
européenne au sens large, mais aussi et surtout vis-à-vis de la Zone
Euro qui risque bien de ne pas se relever d’un nouveau retournement
des marchés en sa défaveur.
Finalement, que les motivations soient politiques ou économiques, de plus
en plus de gens envisagent sérieusement de remettre en question le modèle
européen tel qu’il est aujourd’hui, car pour beaucoup de citoyens européens,
ce qui était à l’origine un beau projet destiné à éradiquer les conflits sur
le continent est devenu une énorme machine à fabriquer des inégalités
sur fond de manipulations monétaires et de politiques arbitraires niant toute
spécificité nationale.