Imaginez un pompier qui,
après avoir réduit l’arrivée
d’oxygène pour éteindre plus rapidement un incendie, se
met à jeter de l’huile sur le feu. On le prendrait, et à
juste titre, pour un pyromane fou et dangereux.
Or, c’est ce qu’a fait
la Banque centrale européenne (BCE), présidée par
Jean-Claude Trichet, le 7 juillet dernier. Et curieusement, personne
n’a crié au feu.
En effet, face à la
flambée des prix et conformément à son mandat officiel, la
BCE a augmenté son taux directeur de 25 points de base ce
jour-là, le portant de 1,25% à 1,50%. Une telle décision
renchérit le prix des liquidités auquel les banques empruntent,
et vise par la même occasion à resserrer le crédit dans
l’économie de sorte que , toutes choses
égales par ailleurs, la pression sur les prix soit moins forte. Bref, il
s’agit d’une décision timide mais allant néanmoins dans
le sens d’une meilleure maîtrise de « l’incendie »
inflationniste.
En parallèle, la BCE a cependant
décidé le même
jour de donner un nouveau « coup de canif au contrat » qui
limitait son pouvoir de créer de l’inflation.
La BCE a ainsi annoncé qu’elle acceptait désormais de racheter de la
dette portugaise même si la note de celle-ci vient d’être dégradée
par l’agence de notation Moody’s qui la considère comme une
dette à haut risque (dette dite « spéculative »,
à l’image de la dette grecque).
À cet égard, il est
fort à parier que la BCE poursuivra cette politique et acceptera la
dette irlandaise d’aussi piètre qualité que celle du Portugal.
Moody’s a en effet dégradé la note de la dette irlandaise
le 12 juillet dernier, la classant désormais dans la catégorie
des dettes « spéculatives ».
Il faut bien comprendre que cette politique est hautement inflationniste.
Car créer des quantités de monnaie comme le fait la BCE, puis les
distribuer en contrepartie d’une dette hautement risquée –
qui ne vaut rien ou beaucoup moins que la monnaie créée
à cause du risque de défaut de l’Etat émetteur
– revient ni plus ni moins à faire tourner la
« planche à billet ».
La BCE avait déjà pratiqué
une telle politique monétaire dès le mois de mai 2010 suite
à la crise grecque, injectant dans l’économie des centaines
de milliards d’euros fraîchement
« imprimés », ce qui n’est pas
étranger d’ailleurs à l’inflation actuelle dans la
zone euro.
En effet, selon une étude publiée par Open
Europe au début du mois de juin dernier, la BCE détiendrait
ainsi de la dette grecque, irlandaise et portugaise, pour un montant
d’environ 340 milliards d’euros. Si on y ajoute les dettes espagnole
et italienne, ce chiffre grimpe à 444 milliards d’euros, soit un
montant « équivalent aux PIB de la Finlande et de
l’Autriche réunis » !
Figure 1 : Exposition de la BCE à la dette des pays
PIIGS
Source : Open Europe, 2011.
Tel un pompier pyromane, Jean-Claude
Trichet, est en train d’attiser le feu inflationniste en dépit
de la volonté officiellement affichée de la BCE de le
maîtriser grâce à l’augmentation de son taux
directeur. C’est le pouvoir d’achat de l’euro qui
inévitablement continuera d’en pâtir.
Valentin Petkantchin
Institut Economique Molinari
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