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Les
années se suivent et se ressemblent. Comme d'accoutumée, la
présentation du projet de loi de finance donne lieu à une
surenchère de créativité pour masquer la situation difficile
dans laquelle nous sommes. En
parallèle, le débat sur l'austérité reprend. Un
débat en trompe l'œil puisque là où certains fustigent
une austérité budgétaire, c’est dans les faits une
austérité fiscale que nous subissons. Celle-ci prend des
proportions d’autant plus importantes qu’au-delà de la
crise, nous avons à assumer des décennies de dérapages
des finances publiques.
Contrairement
à une idée reçue, l'austérité
française n'est pas liée à une hypothétique
baisse des dépenses publiques dans un contexte de retour à la
normale suite à la crise de 2008. Les dépenses françaises
continuent, en effet, d’augmenter chaque année de 21 milliards d’euros
par an depuis 2009. Même si l’augmentation annuelle est moindre
que sur les 40 dernières années, marquées par une hausse
de 28 milliards d’euros par an, l’on ne constate pas de
réduction des dépenses publiques d’un point de vue
comptable depuis la crise. Les dépenses publiques continuent aussi d'augmenter
par rapport au PIB, de l'ordre de 0,1% par an. Certes elles augmentent moins
vite que durant les 40 dernières années, caractérisées
par une hausse de 0,4% par an en moyenne, mais cette hausse détonne
par rapport aux autres pays de l’union européenne. Nos
dépenses publiques ont augmenté de 0,4% du PIB depuis 2009,
pour atteindre 57,1% du PIB en 2013, tandis que l’Union à 28 a
diminué ses dépenses de 1,9%, pour revenir à 49,1% du
PIB. Nous sommes donc clairement à contre-courant, ce qui rend les
discours fustigeant les effets contreproductifs des baisses de
dépenses publiques inadaptés à la situation française.
L'austérité,
bien ressentie par les français, ne s’explique pas par la baisse
des dépenses publiques, véritable arlésienne. Elle
résulte avant tout de la hausse de la pression fiscale, d’autant
plus douloureuse qu’elle se fait dans un contexte de faible croissance.
Les recettes publiques françaises croissent en effet à un
rythme de plus en plus soutenu. Depuis 2009, elles ont augmenté de 32
milliards d’euros par an. C’est plus que dans les 40
dernières années, caractérisées par une hausse moyenne
des recettes publiques de 26 milliards d’euros par an. Ramenées
au PIB, l’effet est encore plus saisissant avec des recettes publiques en
hausse de 0,7% par an dans les 4 dernières années, contre 0,3%
du PIB par an en moyenne durant les 40 dernières années. Contrairement
à une idée reçue, les impôts et charges rentrent
donc bien. Les recettes des administrations publiques n’ont d'ailleurs jamais
été aussi importantes, elles représentent 52,8% du PIB
l'an passé, un record historique. Cela explique très bien le
sentiment de « ras le bol fiscal ». Là encore,
nous nous distinguons par rapport à nos voisins. Selon Eurostat, depuis
2009 les recettes des administrations publiques ont augmenté deux fois
plus vite chez nous que dans l'Union européenne, où elles
représentaient 45,7% du PIB en 2013.
Face aux
effets délétères de cette austérité
fiscale, certains s’inquiètent de l’impact de cette
politique qui risque de mettre l’économie à
l’arrêt. D'où la tentation de laisser dériver les
déficits. Après tout trop de rigueur risque de nuire à
la croissance. Pourtant l'équation française est bien plus
complexe. D'une part, les déséquilibres restent significatifs,
en dépit des hausses massives de charges et d'impôts. En 2013
les administrations publiques ont dépensé 87 milliards d'euros
de plus que leurs recettes, soit l'équivalent de 4,2% du PIB, nous
sommes donc bien loin de l'équilibre. D'autre part, ce dérapage
n'est pas conjoncturel, puisque cela fait en effet 39 ans que les pouvoirs
publics français n'équilibrent plus leurs comptes. Nous nous en
sommes sortis car la France était initialement peu endettée, mais
la situation devient de plus en plus critique d'année en année.
En quarante ans, la dette a été multipliée par 5
rapporté au PIB. Si elle représente aujourd'hui une facture
supportable, en raison de l'exceptionnelle faiblesse des taux,
l'expérience de plusieurs voisins européens montre que de tels
niveaux
d'endettement
ne sont pas sans risques. Si la confiance dans la crédibilité
des finances publiques française venait à se
détériorer, nous serions très rapidement dans une
situation incontrôlable. Un minimum de prudence devrait nous conduire
à remettre à plat notre modèle de finances publiques,
basé sur un développement non soutenable des dépenses, de fiscalité et des
déficits.
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