Ne trouvez-vous pas la grande transhumance de la monnaie (ou devrais-je dire de la liquidité) par la Réserve Fédérale sur les marchés des actions à s’en rouler par terre ? Laissez-moi vous dire une chose : si cet argent émane d’obligations porteuses d’intérêts à taux zéro, alors cette tentative de forcer des investissements sur le marché des actions ne parviendra qu’à ravager le marché des obligations et, par extension, la crédibilité du dollar, du cartel bancaire Américain et du système financier mondial dans son ensemble.
Si ceux qui abandonnent leurs obligations se jettent sur des actions, alors qui restera-t-il pour venir acheter des obligations à rendement zéro ? Les Etats-Unis ne pourront pas continuer sur leur lancée s’ils cessent de vendre des obligations. Quelqu’un aura forcément à les leur acheter. La Réserve Fédérale achète actuellement 70% des obligations émises par les Etats-Unis – par le biais du marché secondaire et de banques too-big-to-fail qui touchent un premium en jouant le rôle d’entremetteuses – un racket tout propre… Si les 30% restants ne peuvent pas trouver d’acheteurs, alors leurs taux d’intérêts devront grimper. Et si leurs taux d’intérêts grimpent, les intérêts payés par le gouvernement des Etats-Unis pour ces obligations augmenteront de manière catastrophique parce que sa dette sur le court terme sera colossale, et que les taux d’intérêts devront être réévalués toutes les 13 semaines à mesure que les obligations changeront de mains. Les Etats-Unis ne seront alors plus dans la capacité de prétendre pouvoir s’acquitter de leur dette. Et tout le monde s’en rendra compte – ce qui ne fera certainement qu’accentuer le nombre de personnes qui se débarrasseront de leurs obligations. La question à se poser est la suivante : combien de temps la dette sera encore appelée ‘dette’ avant d’être reconnue pour ce qu’elle est vraiment : un défaut - ou, si la création monétaire se poursuit : une hyperinflation ? Une chose est sûre, vous vous retrouverez sur la paille.
Cette grande transhumance n'est autre qu'un jeu politique. Le bétail ne fait qu'être amené à l’abattoir. C’est un suicide financier stratégique. Le marché des actions est influencé à la hausse pour des raisons cosmétiques et pour laisser penser que l’économie se redresse dans l’espoir de voir se développer une frénésie financière capable de s’auto-renforcer grâce à une ruée vers les ‘capitaux’. Au passage, au cas où vous me trouveriez quelque peu didactique aujourd’hui, je fais de mon mieux pour définir les termes que j’utilise à mesure que j’écris, parce qu’un certain nombre d’écrivains financiers semblent penser que les gens ordinaires comprennent leur jargon, ce dont je doute fort.
Mais pour en revenir à notre sujet... la Fed et ses auditeurs de Wall Street et du gouvernement manipulent le marché des actions dans l’espoir de réveiller ce qu’ils appellent l’esprit animal, ou comme les psychologistes financiers le disent, de soutenir la propagande d’une économie vibrante – ce qui bien entendu n’a aucun sens aux yeux de toute personne capable de percevoir l’épave économique qui nous entoure. De toutes les manières, puisque le marché des actions est aujourd’hui dominé par des programmes de négoce à haute fréquence qui fonctionnent grâce à des algorithmes, d’où pourrait bien naître cet esprit ‘animal’ ? Et l’absence d’esprit animal justifie également l’absence de son homologue qu’est l’instinct de survie, duquel dépend l’intelligence humaine. Quelles bonnes choses pourraient bien ressortir de l’éveil de l’esprit animal de robots ? Rien de plus qu’un naufrage.
Voici la question à laquelle j’aimerais que vous répondiez : à une époque où les marchés financiers du monde sont liés, instables, victimes des conséquences inattendues des retombées de la technologie et parés au naufrage, est-il justifié de s’amuser avec ce genre d’opérations financières psychologiques ?
Il existe un autre facteur, en dehors de la sphère purement financière, qui nous promet que l’économie des Etats-Unis ne se redressera pas (j’entends ici le type d’activité économique que nous qualifions de normal, c’est-à-dire la construction de zones urbaines, les paiements par carte…) : le prix du pétrole, qui se dirige vers la barre des 100 dollars le baril. Il semblerait que toutes ces histoires d’indépendance énergétique dont nous entendons parler ne sont pas parvenues à permettre aux Etats-Unis de faire des longueurs dans une piscine de pétrole peu cher. Il est très certainement justifié de dire qu’un prix du pétrole de plus de 80 dollars suffira à écraser l’économie. Il entraînera une hausse de toute la structure de prix, tout particulièrement pour ce qui concerne le carburant et la nourriture.
Il est assez ironique – pour en revenir aux opérations psychologiques financières – que l’un des principaux motifs qui pousse la Fed à maintenir les taux d’intérêts proches de zéro (en dehors du fait qu’elle veuille soutenir l’irresponsabilité fiscale du gouvernement) est la promotion du secteur immobilier – et par immobilier, j’entends notre habitude à construire plus de zones suburbaines. Est-il justifié de construire toujours plus de banlieues à une heure où le pétrole peu cher n’existe plus ?
C’est ce genre de stupidités qui poussent les Etats-Unis vers l’effondrement systémique.
Petite note en passant :
Avez-vous remarqué la violence et la psychose de la publicité de cette année pour le Superbowl ? Une pub Oreo qui présente une foule de geeks détruisant une bibliothèque… Pardon ? La pub Doritos dans laquelle un papa et ses amis se travestissent. La bande annonce de Fast and Furious 6 qui met en scène la destruction de toutes les voitures jamais construites et d’une poignée de bâtiments de bureaux. Voilà qui nous montre en images ce qui est le point de se passer dans nos exceptionnels Etats-Unis d’Amérique. Voici venu le moment de faire la fête, mes amis !
