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Cours Or & Argent en

La Suisse et le vote sur l’initiative sur l’or

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Publié le 20 novembre 2014
2240 mots - Temps de lecture : 5 - 8 minutes
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Rubrique : Editorial du Jour

Le 30 novembre prochain et sur l’initiative de « Sauvez l’or de la Suisse », les Suisses voteront pour déterminer si la constitution de leur pays devra oui ou non être réformée. L’initiative sur l’or semble être très largement mal comprise, que ce soit en Suisse comme à l’étranger. Dans cet article, nous nous pencherons sur ses implications sur l’or, le franc suisse et la Suisse en général.

Les motivations derrière cette initiative

Les initiateurs de l’initiative sur l’or en appellent à la volonté des Suisses de ne pas vendre « l’argent de famille ». A la fin des années 1990, la Banque nationale suisse possédait 2.590 tonnes d’or. Depuis lors, 1.550 tonnes ont été vendues à des prix bien inférieurs aux prix actuels. Bien que les Suisses puissent apprécier leur or, ils restent fièrement indépendants. C’est un point à retenir, parce qu’en imposant un plafond au franc suisse face à l’euro, la Banque nationale suisse a de facto imposé l’euro à son pays et fait un pas de plus vers l’adoption de l’euro – chose à quoi s’opposent de nombreux Suisses. Plus important encore, de nombreux suisses pensent qu’il est inapproprié pour un organisme apolitique comme leur banque centrale que d’imposer des mesures aux ramifications politiques majeures.

Il n’est pas surprenant que le gouvernement suisse – qui s’oppose à l’initiative – ne présente pas les choses sous cet angle, et mette l’accent sur la flexibilité que souhaite la Banque Nationale Suisse pour mettre en œuvre sa politique monétaire. Il soulève également la question des « pertes » enregistrées par la Banque en 2013 suite à la baisse du prix de l’or.

Penchons-nous de plus près sur cette initiative. Elle vise à réformer la constitution Suisse de manière à ce que :

• Les réserves d’or de la Banque Nationale Suisse ne puissent plus être vendues ;
• Les réserves d’or de la Banque Nationale  Suisse doivent être conservées en Suisse ;
• Les réserves d’or de la Banque Nationale Suisse devront doivent représenter un minimum de 20% du total des réserves de devises de la Banque nationale.

Voici les mesures transitionnelles proposées :

• La Suisse aura deux ans pour rapatrier son or ;
• La Suisse aura cinq ans pour atteindre le taux minimum de réserve de 20%.

L’indépendance de la banque centrale

Le gouvernement suisse affirme que l’indépendance de la Banque nationale suisse serait mise en danger si l’initiative était votée. L’ancien directeur de la Réserve fédérale des Etats-Unis, Alan Greenspan, a eu son mot à dire concernant l’indépendance des banques centrales : « Je n’ai jamais laissé sous-entendre que les banques centrales sont indépendantes ». Il n’a pas non plus dit que le gouvernement dictait à la Fed les politiques à suivre au jour le jour, mais a clairement exprimé le fait que le gouvernement établissait les règles. Il a répondu aux accusations selon lesquelles la Fed financerait les déficits du gouvernement, et expliqué que ceux qui critiquent ce système ont tout compris à l’envers. La Fed ne fait qu’obéir. Il a ensuite ajouté que les politiques de la Fed sont influencées par « la culture plutôt que par l’économie ».

Il ne devrait surprendre personne que le gouvernement suisse s’oppose à toute forme de restriction imposée à la Banque nationale suisse, non pas parce qu’elle mettrait en danger l’indépendance de sa banque centrale, mais parce qu’elle réduirait la flexibilité du gouvernement. Mais c’est bien évidemment là le principe même des initiatives constitutionnelles en Suisse.

L’or présente-t-il un risque pour la Banque nationale suisse ? Le gouvernement du pays maintient que le déclin du prix de l’or de 2013 a entraîné d’importantes pertes pour la banque centrale. Il est triste que l’argumentation officielle du gouvernement Suisse doive avoir recours à la polémique. Eclairons toutefois quelques points quant à la comptabilité des banques centrales :

• L’or détenu par la Banque nationale suisse a été acheté à des prix très bas. Si la Banque continuait de vendre de l’or, elle enregistrerait des gains, et non des pertes.


• Dans son effort pour empêcher la hausse du franc suisse, la Banque nationale suisse a imprimé énormément de monnaie, - comme le montre le graphique ci-dessous – presqu’autant que la Réserve Fédérale Américaine !

 

 

 

• Les banques centrales n’impriment plus de la monnaie de nos jours.  Pour créer de la monnaie, La Fed ou la Banque nationale suisse achètent des valeurs mobilières aux banques en créditant leurs comptes en quelques clics sur un clavier. De la monnaie est littéralement créée à partir de rien.


• Ce que la plupart des gens n’imaginent pas, c’est que plus une banque centrale moderne créée de la monnaie, c'est-à-dire plus elle achète de valeurs mobilières, plus elle en tire des profits importants. C’est pourquoi les banques centrales se vantent de la rentabilité de leurs opérations.


• En revanche, bien que la Fed n’ait acheté que des valeurs mobilières américaines (bons du Trésor et titres adossés à des prêts immobiliers), la Banque nationale suisse a acheté des valeurs mobilières en euros et en dollars. Elle fait donc désormais face à un très important  risque de change.

 
• Toutefois, les banques centrales se soucient peu des pertes qu’elles peuvent encourir : la Banque d’Israël, par exemple, a une situation nette négative depuis plus de  vingt ans. Pour une banque centrale, des pertes ne signifient rien de plus qu’un simple problème d’image de marque, puisqu’elle peut imprimer de l’argent pour satisfaire ç ses obligations. Il est écrit dans les statuts de certaines banques centrales, telles que la BCE, que les Etats membres devront augmenter leur capital si elles venaient à encourir des pertes.

Les crises nécessitent-elles la vente d’or ?

Selon le gouvernement suisse, une banque centrale doit pouvoir vendre son or en temps de crise. Mais réfléchissons-y un instant : une telle « crise » pourrait survenir si l’effet de levier d’une banque est trop important et que la banque en question se trouve dans l’obligation d’être refinancée. Pour faciliter un refinancement, la Banque nationale suisse a des chances de devoir fournir de la liquidité (imprimer en promettant que ce ne sera qu’une opération de court terme). Si une banque est insolvable plutôt qu’illiquide, une augmentation de capital pourra devenir indispensable. Ce capital doit provenir de quelque part. Si de l’or est vendu pour en générer, c’est l’or du peuple qui se retrouve vendu. Le gouvernement Suisse voudrait garder la possibilité de socialiser les pertes.

Nous pourrions affirmer que la seule  condition de l’existence de banques de type « too big to fail »  est que les gouvernements leur viennent en aide et n’ont aucun problème avec le fait de sacrifier ou dilapider les fonds de leurs citoyens.  Selon les gouvernements, ces mesures sont mises en place pour le bien commun – parce que les déposants pourraient perdre leur argent placé en banque. En effet, lorsqu’une banque s’effondre, ce sont les épargnants qui en ressortent perdants, puisque ce sont eux qui ont prêté leur argent aux banques.

La bonne manière de protéger les épargnants, au contraire, serait de mettre en place des politiques prudentes qui exigeraient de demander à ceux qui prennent les risques de porter la responsabilité de leurs pertes.

L’or est l’argent du peuple

L’or est l’argent du peuple, et non celui du gouvernement. Si une devise est garantie par de l’or, alors elle représente cet or. L’or n’est pas là pour que le gouvernement en dispose : c’est pourquoi l’initiative demande à ce que l’or suisse ne puisse être vendu. C’est pour cette raison que l’or n’a pas besoin d’être déposé à l’étranger : c’est une réserve de valeur qui sert à garantir la devise en circulation.

Un taux de réserve minimum de 20%

Marc Faber, par exemple, a dit s’être vu demander de soutenir publiquement l’initiative, mais a jusqu’à présent refusé de le faire. Selon lui, 20% n’est qu’une solution temporaire : seule une garantie de réserves de 100% vaudrait d’être soutenue publiquement. De mon propre point de vue, Marc Faber passe à côté des mérites de l’initiative. Ce taux de réserve minimum combiné au fait que la Banque nationale suisse ne pourra jamais, jamais vendre d’or a d’importantes ramifications :

• Imaginons que 20% des actifs de la Banque nationale suisse soient garantis par de l’or, et que le prix de l’or chute. La Banque nationale devrait immédiatement acheter plus d’or. Au fil du temps, ses réserves d’or représenteraient donc plus de 20% de ses réserves totales. Et au fil du temps, elles pourraient se rapprocher des 100%. A chaque fois qu’une crise se développera et que la Banque nationale suisse se trouvera tentée d’imprimer de l’argent pour refinancer une institution, sa flexibilité future s’en trouvera affectée, puisqu’elle finira par posséder plus d’or qui ne pourra être vendu.

•Une banque nationale suisse interventionniste qui continuerait d’acheter des valeurs mobilières étrangères pourrait, au fil du temps, avoir des difficultés à défendre un plafond pour sa devise. La raison en est qu’un plafond sur sa devise est similaire à un plan de sauvetage pour le pays dans son ensemble, avec l’argumentation sous-jacente que la dévalorisation de la monnaie est bonne pour le pays.

Un franc suisse compétitif ?

Selon le gouvernement suisse, un franc suisse fort est un problème pour les exportateurs. Sans rire. Les autres problèmes sont les concurrents – peut-être devrions-nous aussi nous débarrasser d’eux ? Sans oublier ces clients qui n’ont pas toujours le cœur à acheter les gadgets et services fabriqués en Suisse…  Restons sérieux : il n’est plus possible pour une économie avancer de d’être compétitive en matière de prix. Une économie avancée doit être compétitive en matière de valeur. Seuls très peu de biens bon marché sont exportés par les économies avancées.

Prenons la bière, par exemple, qui est un secteur sur lequel se sont aventurées un certain nombre d’économies moins avancées grâce à des produits de moindre qualité : la bière est aujourd’hui considérée être un produit de luxe. Afin d’avoir une influence sur le prix, il y a dû y avoir une importante consolidation sur le secteur de la brasserie ces dernières décennies, notamment en Europe, et la Suisse s’est retrouvée prise de distance – notons qu’il s’agit ici d’une tendance qui était déjà amorcée avant la crise financière. Un franc suisse plus faible ne pourrait pas apporter de solution à ce problème. Une alternative serait de chercher à être profitable à l’échelle locale. Certaines micro-brasseries qui n’exportent pas ont en effet rencontré un vif succès sur le marché des bières de luxe.

Les multinationales suisses ont depuis longtemps appris à mettre en place des arbitrages naturels et à équilibrer leurs revenus et leurs dépenses sur leurs marchés d’exportation.

Le siège social des sociétés demeure généralement en Suisse, parfois aussi les départements recherche et développement. La Suisse a de très nombreux travailleurs saisonniers ; les législateurs devraient réfléchir à des alternatives, comme de payer les salaires de ces travailleurs étrangers en euros. Il pourrait être préférable de rémunérer des travailleurs dans une devise en dépréciation plutôt que de se débarrasser de ses réserves d’or pour attirer de la main d’œuvre saisonnière...

Le marché suisse a toujours été difficile. On entend parfois dire que cela provient du niveau d’exigence du consommateur Suisse et que si un produit se vend en Suisse, il peut se vendre n’importe où.

Nous vivons dans un monde qui croule sous la dette. Les Etats-Unis, l’Union européenne, le Japon, pour n’en nommer que quelques-uns, n’ont plus les moyens de tenir leurs engagements sur les promesses faites dans le passé. Comme Alan Greenspan l’a récemment expliqué, un Etat-providence ne peut pas supporter un étalon or. Il doit déprécier sa devise au fil du temps afin de pouvoir payer les promesses qu’il a faites.

Il ne sera pas facile de vendre à des pays qui ont mis en place des politiques qui, comme nous le penson, appauvrissent leur classe moyenne. La solution, en revanche, n’est pas d’appauvrir la Suisse à son tour. Les choses ne seront pas simples, mais la Suisse devra éventuellement réaliser que la dévaluation compétitive n’est pas dans ses intérêts. Et le plus tôt sera le mieux.

Retour à la réalité

Maintenant que nous savons en quoi consiste l’initiative sur l’or, remarquez que sa mise en œuvre ne serait qu’une première étape. A moins que les législateurs n’embrassent l’esprit de la loi, il pourrait s’agir d’un long combat. Nous avons déjà pu lire un certain nombre de rapports expliquant comment la Banque nationale suisse pourrait tenter de contourner ses obligations.  La Banque ationale pourrait également s’engager sur les marchés des produits dérivés pour saper l’esprit de l’initiative si elle venait à être ratifiée.

N’oublions pas non plus que la banque centrale aura cinq ans pour parvenir à un taux de réserve en or de 20%. Voilà qui devrait lui permettre de conduire des achats d’or sans trop influencer les marchés. Sur le court terme, les effets pourraient en être assez importants : le plafond du franc suisse par rapport à l’euro pourrait faire l’objet de pressions. De tels plafonds ne peuvent imposés que lorsqu’ils représentent un engagement inconditionnel. Dès que quelqu’un bougera un cil, le marché mettra à l’épreuve la résolution des responsables. La Banque nationale suisse pourrait avoir intérêt à acheter de l’or dès le tout début si elle accélère ses achats d’euros.

In ultima ratio, personne ne devrait jamais se reposer sur son gouvernement pour établir un étalon or, mais mettre en place son propre étalon or personnel.

 

 

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