Mes chères contrariées, mes chers contrariens
!
Il y a des sujets économiques passionnants comme par exemple le
prix des lunettes. Membre d’une famille de bigleux je sais bien de quoi
je parle. Ca coûte cher les lunettes en
France, très cher. Aujourd’hui le prix des lunettes thème
majeur a été mis sur la place publique par l’UFC que
choisir qui dénonce cette dérive inacceptable. Disons que le
chômage lui est un vrai sujet, ce qui n’empêche pas les
lunettes d’être trop chères.
Alors dans ce genre de débat on entend encore une fois tout et
n’importe quoi du genre « les lunettes sont vendues par des
personnes très qualifiées… ». Je n’ai jamais
vu de personne très qualifiée pour me vendre des lunettes,
d’un autre côté si je porte des lunettes c’est parce
que je ne vois pas bien, ceci expliquant sans doute cela.
Nous allons avoir droit au sempiternel chantage à
l’emploi de l’association professionnelle nationale de France et
de Navarre des vendeurs de lunettes (APNFNVL) qui nous explique
déjà qu’avec plus de 11 000 boutiques le poids
économique des vendeurs de lunettes est incontournable (surtout leur
profits) plus pleins d’autres bêtises du même genre.
En réalité le problème du prix des lunettes est
assez simple à régler. Il suffit que les mutuelles baissent le
remboursement de leur forfait optique (cela ne m’arrangerait pas
à titre personnel) de 100€ pour que le prix moyen des lunettes
baisse de 100€…. Pas compliqué du tout.
En réalité les vendeurs de lunettes sont tout simplement
subventionnés par de l’argent parapublic (celui des mutuelles).
Baissez les subventions. Les ventes de lunettes seront divisées par
deux. Les vendeurs devront ajuster leur prix surtout qu’ils ont de la
marge. Beaucoup, beaucoup de marge, ce qui n’est en aucun cas
justifié. D’ailleurs le prix d’une monture
fabriquée en Chine ne coute pas plus cher qu’une paire de
chaussures livrée au Havre et dont le prix est de 0,80 centime d’euro
le Kg…. Oui oui vous avez bien vu (avec ou
sans binocle). 0,80 cts le prix au kilo de vos godasses dont le prix de vente
moyen est de 70 euros. Alors là aussi la marge est excessive mais le
prix de vente moins élevé puisqu’il n’y a pas de
mutuelle de la chaussure.
Pour être encore plus clair, regardez le prix des chaussures
orthopédiques… (à peine plus complexe que n’importe
quelle autre paire de chaussures) mais qui, elles seront remboursées
par la sécu et votre mutuelle… et voilà vous avez tout
compris.
Voilà comment par des remboursements médicaux que nous
payons tous, nous obtenons une dérive des dépenses publiques et
un gavage généralisé de certaines profession dont la
valeur ajoutée n’est pas à la hauteur de la marge
demandée…
Bon passons, de tout façon ce n’est pas un
problème essentiel.
Là j’ai trouvé un problème essentiel, enfin
en tout cas autrement plus sérieux. Oui mes chers contrariens
je suis en mesure de vous l’annoncer aujourd’hui, avec plusieurs
mois d’avance, le PIB américain va augmenter de 3% en juillet
2013.
Le PIB
américain va faire un bond de 3% en juillet !
C’est la nouvelle du jour. A mis chemin entre bouffonnerie
étatique et triche organisée à vous de juger.
On apprend donc que le mode de calcul du PIB US va en effet »
subir une refonte complète, qui fera techniquement gonfler le PIB
américain de 3%, soit environ 470 milliards de dollars, par rapport au
PIB du 4ème trimestre 2012 (15.829 Mds$). Ces changements entreront en
vigueur au 1er juillet prochain, et au passage, les séries
statistiques concernant le PIB vont être entièrement
recalculées depuis... 1929 » !
Je souhaite bien du plaisir à nos statisticiens pour
reconstituer le PIB avec ce nouveau mode de calcul depuis 1929 car il va
falloir intégrer la valeur ajoutée de R&D par exemple. Je
vous laisse le soin de choisir un calcul pertinent pour la R&D de la
génération de Ford T commercialisée en 1930…
j’en rigole encore.
Et l’article de Boursier.com de poursuivre : Pourquoi un tel
'remue-ménage' ? Il s'agit de tenir compte dans le PIB des actifs
immatériels (Recherche & Développement, royalties, frais
annexes...), qui n'ont jamais été comptabilisés
jusqu'ici, mais que l'ONU a recommandé d'intégrer depuis 2008.
Après l'Australie, qui a ouvert le bal, les Etats-Unis sont le premier
grand pays à se plier à cette nouvelle règle, qui
reflète mieux l'économie moderne, dans laquelle les biens
incorporels ont pris un poids considérable. La dernière grande
réforme avait eu lieu en 1999, via l'intégration des ventes de
logiciels informatiques dans le PIB »...
Ce qu’il faut bien comprendre c’est que
jusqu’à présent la R&D était
considérée comme une dépense, en terme comptable on
parle d’une charge.
Certains objecteront que l’on est dans l’économie
de la connaissance et du progrès technique ce qui est vrai. Sauf que
chaque euro dépensé en R&D ne donne pas lieu
forcément à une invention ou à une application
concrète. Il y a souvent, très souvent des échecs de
recherche. On peut chercher et ne rien trouver (demandez au CNRS). Cela
n’a donc aucun impact positif sur le PIB. C’est même
l’inverse. La recherche aussi peut appauvrir. Elle peut ne pas
être rentable, raison pour laquelle justement elle était
considérée comme une dépense.
Comme les bonnes idées ont en général beaucoup de
succès, l’Europe devrait examiner une telle réforme
dès 2014 puisque cette nouvelle méthode devrait être
progressivement étendue partout à travers la planète.
J’expliquais hier dans un article du Contrarien
Matin que nos hommes politiques (mais pas uniquement les nôtres) ne
voulaient pas admettre que l’on vivait dans une période sans
croissance, voir, même plus grave que l’on rentrait certainement
dans une période durable de décroissance liée à
des facteurs extrêmement puissants et profonds comme la raréfaction
des ressources, une démographie négative puisque de plus en
plus de pays sont en train de vieillir, une période d’une
dizaine d’années de désendettement global dans le monde
occidental etc…
Le problème c’est que nos politiques ne savent pas
gérer un pays sans croissance. Ils n’y arrivent pas, ils ne
l’imaginent pas.
Comme la croissance n’est pas là et qu’elle ne
viendra pas comme par miracle ce que semble attendre
désespérément attendre notre Président, les
américains ont trouvé nettement plus simple.
C’est efficace et pragmatique. Puisqu’il n’y a pas
de croissance, changeons le mode de calcul de la croissance en faisant
augmenter le résultat.
Alors, soit notre ratio de dettes/PIB qui n’est pas bon, moins
le sens du vent, auquel j’ajoute l’arrivée de
l’invention du cendrier en 1929 dans la Ford T, plus la mise en place
de la R&D pour l’extension des rétroviseurs droits, plus le
fait que je veux gagner un an dans mon processus d’endettement et vous
obtenez en résultat l’augmentation de 3% du PIB américain
en juillet prochain.
Vous serez donc tous d’accord avec moi, la croissance va faire
un énorme bon. Donc c’est que l’économie se porte
bien, donc les actions à la bourse vont monter, donc il faut acheter
des actions… Et voilà, l’économie c’est
simple.
On veut vous faire croire que c’est compliqué. Mais pas
du tout. Je vous explique ce que dis le manuel de politique
américaine. C’est une exclusivité le Contrarien
Matin car nous nous sommes procuré ce document confidentiel.
D’ailleurs le FBI me poursuit :
Article 1 : Lorsqu’il n’y a pas de croissance imprimez de
nouveaux billets jusqu’à ce qu’il y ait de la croissance
et baissez les taux.
Article 2 : Si l’article 1 ne fonctionne pas c’est que
vous n’avez pas imprimé assez de billets, reportez-vous donc
à l’article 1 et baissez encore vos taux.
Article 3 : Si l’article 1 et 2 et que vos taux sont
déjà à 0 et que cela ne fonctionne toujours pas
c’est que votre population n’a pas d’effet richesse
suffisant. Imprimez encore plus de billets et achetez directement toutes les
actions à la Bourse afin que les cours ne puissent que monter
éternellement.
Article 4 : Si vous vous rendez compte que plus personne ne
détient d’actions car les gens ont déjà
été ruinés par plusieurs bulles
précédentes, que les taux sont à 0 et que vous continuez
à imprimer pleins de billets reportez-vous aux articles
précédents 1, 2 et 3 et profitez-en pour casser le
thermomètre utilisé pour calculer l’évolution du
PIB. Changez le mode de calcul pour obtenir le résultat
souhaité.
Article 5 : Quand tout a échoué… ouvrez le
parachute, allez-vous planquer à la campagne avec tous vos avoirs
financiers investis en or depuis bien longtemps. Laissez tous les actifs
baisser. Rachetez tout à vil prix pendant que le petit peuple lutte
pour se nourrir. Vous êtes riches. Ils sont pauvres mais vous vous en
foutez depuis le début.
Donc si vous avez bien suivi, les USA et le Japon en sont en gros
à l’étape n°4. Alors certains me feront remarquer que
je suis un peu malhonnête et que je caricature. Evidemment que je
caricature sinon ce ne serait pas drôle et autant lire les Echos
1,70€ chez votre marchand de journaux.
Mais plus sérieusement tout cela révèle un
état d’esprit assez délétère sur la
façon de quantifier ou de mesurer les choses. Tout cela participe au
fait que les marchés ne sont ni libres, ni efficients puisqu’ils
sont totalement orientés à défaut d’être
« manipulés ».
Au moment où je termine ces lignes la bourse de Paris explose
à la hausse, avec plus de 3%. Il faut dire que des rumeurs
sérieuses indiquent que la BCE va baisser ses taux… imprimer des
billets et sans doute changer le mode de calcul du PIB. Le pire c’est
que tout le monde veut y croire car c’est tellement plus rassurant que
de parler des vrais sujets ceux que l’on devra tôt ou tard
aborder… mais plus ce sera tard mieux ce sera…
Charles
SANNAT
Editorialiste et rédacteur du Contrarien
Matin
Directeur des Études Économiques Aucoffre.com
http://www.lecontrarien.com/
http://www.boursier.com/actualites/macroecono...let-527540.html
http://www.franceinter.fr/depeche-les-lune...heres-en-france
|