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1. Introduction
Je vous propose ici une analyse de la
valeur de la monnaie. Je tenterais de rattacher le pouvoir d’achat de la monnaie
à celui de l’or pour démontrer comment l’impression de nouvelle monnaie en
dilue la valeur. En tant que valeur de réserve, la valeur de la monnaie est
représentée par son pouvoir d’achat. Je comparerais donc ici la capacité de
la monnaie papier et de l’or à fonctionner en tant que valeur de réserve sur
le long terme. J’en conclurais que l’or est une excellente valeur de réserve,
ce qui n’est pas le cas de la monnaie papier. Nous verrons que la création
excessive de monnaie papier est la cause ultime de l’incapacité de la monnaie
à fonctionner de manière appropriée en tant que valeur de réserve.
2. Origine des données
Les
données monétaires historiques utilisées ici sont amplement disponibles sur
internet. Ma source officielle est le site du Comité de direction de la
Réserve fédérale, et les données qui y sont publiées sont disponibles
gratuitement au public.
Le Bureau des statistiques du travail
publie quant à lui les données historiques concernant l’indice des prix à la
consommation. Tout comme la Fed, il les met gratuitement à la disposition du
public. Pour déterminer le pouvoir d’achat de la monnaie, il faut observer
l’inverse de l’indice des prix à la consommation. Pour illustrer cette idée,
si l’IPC double, le pouvoir d’achat de la monnaie est divisé par deux. Si
l’indice est multiplié par dix, le pouvoir d’achat de la monnaie chute de
90%.
3. Le pouvoir d’achat du dollar US
Le graphique ci-dessous nous montre les données provenant de ces deux
sources.
Le graphique nous procure une image de cette relation parfaitement inversée
de la quantité de monnaie en circulation et de son pouvoir d’achat. Elle
reflète une relation simple: les prix augmentent à peu près
proportionnellement à l’offre de monnaie. Dit d’une autre façon, elle reflète
le principe de base du monétarisme selon lequel, sur le long terme,
l’inflation des prix est une conséquence directe de l’inflation monétaire. Et
elle sous-tend également la théorie classique de la neutralité de la monnaie.
Que l’on considère ou non la monnaie comme «neutre» est une toute autre
histoire.
Si l’on considère les données de janvier 1971 à décembre 2008, l’offre de
monnaie américaine a été multipliée par 16,8, et cette augmentation a été
accompagnée d’une baisse du pouvoir d’achat du dollar de 81.1% comme le
sous-entendent implicitement les chiffres de l’IPC rapportés par le
gouvernement. Ainsi, les données suggèrent que cette multiplication par 17 de
l’offre de monnaie a eu pour résultat une division du pouvoir d’achat par
plus ou moins 5. Je ne tenterais pas d’expliquer ici cet écart significatif
mais je mentionnerai néanmoins qu’il peut avoir les raisons suivantes: (1)
une augmentation de la productivité, (2) une surestimation de l’offre
monétaire, (3) une sous-estimation de l’IPC, (4) une surestimation du prix
des avoirs (actions, obligations et biens immobiliers), ou (5) une erreur de
calcul en termes de théorie quantitative de la monnaie. (3), (4) et (1) en sont
les facteurs les plus importants.
4. Le pouvoir d’achat des devises majeures
Les Etats-Unis ne sont pas les seuls à
poursuivre une politique monétaire inflationniste et à accroître sans cesse
leur offre monétaire. Les données historiques disponibles concernant les taux
de changes et l’offre de monnaie permettent des analyses similaires pour la
plupart des autres monnaies d’importance. J’ai établi des analyses
comparables pour la livre sterling (1), le dollar canadien (2), le dollar
australien (3), le yen japonais (4), et le franc suisse (5) sur la même
période (de 1971 à 2008).
J’ai choisi 1971 comme point de départ pour trois raisons. Tout d’abord,
avant 1971 les taux de change étaient fixes, deuxièmement, les taux de change
d’avant 1971 sont difficiles à obtenir, et finalement, avant 1971 le dollar
avait un prix fixe (une convertibilité fixe) par rapport à l’or. En revanche,
après 1971, les taux de change étaient flottants, les données accessibles et
le dollar flottait par rapport à l’or.
En d’autres termes, j’ai choisi d’étudier la période post-Bretton-Woods.
Bretton Woods caractérise le régime monétaire international qui s’est étendu
entre la seconde guerre mondiale et 1971. Après la seconde guerre mondiale,
seul le dollar américain est demeuré convertible en or au taux de 35 dollars
par once. Pendant cette période, toutes les autres monnaies étaient liées au
dollar à taux fixe. Le 15 août 1971, le Président Nixon a pris la décision
unilatérale de fermer le guichet de l’or pour éviter un retrait excessif d’or
par les pays étrangers. 1[i].
Il a ainsi mis fin à la convertibilité du dollar en or et a permis au dollar
de flotter par rapport à l’or. Son objectif était sans aucun doute d’éviter
la dissolution totale des réserves d’or américaines. En conséquence, les
autres monnaies ont commencé à flotter par rapport au dollar. Depuis cette
date, aucune monnaie n’est soutenue par un actif tangible. Il s’agit là d’une
expérience monétaire sans précédent qui s’étend au monde entier et nous
concerne tous, où que nous soyons.
Les trois graphiques qui suivent montrent des relations similaires pour la
livre sterling, le dollar canadien et le dollar australien.
Il est assez intéressant de constater que le yen japonais et le franc suisse
montrent une meilleure résistance face à l’inflation monétaire et à la
dépréciation. C’est particulièrement vrai pour le franc suisse – la quantité
de francs suisses en circulation augmentant de façon assez modeste au fil du
temps. Cette explication peut sembler liée au fait que même si le franc
suisse n’a jamais été (légalement) convertible en or, la banque centrale
suisse a tenté de maintenir des réserves d’or suffisantes pour soutenir son
franc, ce qui a eu l’effet de modérer l’inflation.
5. Le pouvoir d’achat de l’or
Avant 1971, l’or avait toujours été
utilisé comme base monétaire. L’idée que l’or puisse jouer le rôle de valeur de
réserve était très répandue. Il faut dire qu’il ait maintenu son pouvoir
d’achat pendant plus de 5.000 ans. Que pouvons-nous donc dire de l’offre
monétaire et du pouvoir d’achat sur la période de 1971 à 2008 ? Comment
l’or a-t-il continué de jouer le rôle de valeur de réserve (comment a-t-il
maintenu son pouvoir d’achat) par rapport aux autres monnaies de référence
sur la période ?
Pour ce qui est de l’offre d’or, j’ai utilisé les données rendues disponibles
par l’US Geological Survey (USGS) [Enquête Géologique des Etats-Unis] et par
le Conseil mondial de l’or. L’USGS relève les données statistiques
historiques de l’offre et de la demande pour une multitude de minerais et
métaux, y compris l’or, depuis 1900. Le Conseil mondial de l’or estime qu’un
total de 165.547 tonnes d’or ont été extraites, dont 2.400 tonnes rien qu’en
2008. En analysant ces deux ensembles de données, il est possible de dire que
pour la période allant de 1971 à 2008, l’offre d’or est passée de 93.515 à
165.948 tonnes, soit, pour l’ensemble de la période, une hausse d’à peine
78%.
Pour la même période et en utilisant
les mêmes statistiques de l’IPC, le pouvoir d’achat de l’or a été multiplié
par 4. Le prix de l’or est passé de 38 à environ 822 dollars, ce qui
correspond à une multiplication de son prix par 22, tandis que l’IPC est
passé de 40 à 210 - soit une multiplication par 5. Ainsi sur cette période,
le prix de l’or a été multiplié par 22 tandis que le niveau de prix a été
multiplié par 5. Le pouvoir d’achat de l’or a été multiplié par 4 – la hausse
exacte est de 310%, ce qui revient à une multiplication par un peu plus de 4.
Ces données sont représentées par le graphique ci-dessous :
6.
Conclusion
Que pouvons-nous conclure de cette
analyse? L’idée générale est que l’or est de loin une meilleure valeur de
réserve que les monnaies papier. Tandis que le pouvoir d’achat de l’or a été
multiplié par 4, le pouvoir d’achat des devises majeures a été divisé par 5
ou 10, à l’exception du franc suisse et du yen japonais dont la dépréciation
a été largement inférieure. La seconde colonne du tableau ci-dessous nous
montre les pourcentages exacts :
|
Augmentation
de l’offre
|
Changement
des unités de valeur en (%)
|
Or
|
1,8
|
310,4
|
Franc suisse
|
3,8
|
-23,7
|
Yen
|
15,9
|
-25,4
|
USD
|
16,8
|
-81,1
|
CAD
|
15,4
|
-84,4
|
AUD
|
33,5
|
-88,2
|
Livre
sterling
|
12,6
|
-88,3
|
La raison pour laquelle l’or a une
meilleure capacité à maintenir son pouvoir d’achat est rendue évidente par la
première colonne de ce tableau. Alors que l’offre d’or a à peine doublé sur
la période, l’offre monétaire de certaines devises a été multipliée par vingt
ou trente. L’offre de dollars australiens a été multipliée par 33,5, et celle
de dollars canadiens par 15,4. La dévaluation des devises ne devrait donc
être une surprise pour personne. Plus les gouvernements impriment, plus les
monnaies sont dévaluées – c’est aussi simple que ça. Les gouvernements ne
peuvent pas imprimer d’or, et ne peuvent donc pas en déprécier la valeur.
Dans le monde de la monnaie, l’or demeure la meilleure valeur de
réserve.
Notes
1° Il était illégal pour les Américains de détenir de l’or
à des fins d’investissement suite au décret n° 6102 du 5 avril 1933, signé
par le président Roosevelt. Il a fallu attendre 1974 pour que les
Américains puissent de nouveau détenir de l’or sous forme de pièces, de
lingots et de certificats.
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