Rien ne va plus. Des trous noirs sont apparus dans le tissu de mensonges et de fraudes qu’est le système monétaire mondial. Ils aspirent par gravitation toutes les pièces qui s’en détachent et traversent leur horizon pour ne plus jamais être vues. Ces pièces dont je parle sont les nantissements de la grande nébuleuse de dettes générées artificiellement et d’obligations qui n’auraient jamais dû être honorées - ou devrais-je dire perçues comme authentiques. Alors qu’elles disparaissent dans les siphons de l’espace, elles emportent avec elles leur supposée valeur monétaire, ce qui signifie qu’elles laissent derrière elle des réverbérations d’appauvrissement dans le sombre endroit qu’est devenu le monde réel.
Le processus décrit ci-dessus finira par faire naître la lumière où règnent aujourd’hui les ténèbres, révélant un monde aux couleurs vives et aux contours contrastés. Le rouge, par exemple, représentera les pertes réelles de chaque ménage, de chaque entreprise et de chaque gouvernement tout autour du monde. S’ensuivra une ruée vers la sécurité, qui ne visera non pas à s’accrocher désespérément à tout ce qu’il restera de monétaire, mais aux ressources qui dirigeront nos économies – l’or et l’argent, le pétrole et le gaz.
Bien entendu, des forces géopolitiques gravitent en arrière-plan. Seuls les idiots souscrivent aux fantaisies paranoïaques que sont le gouvernement unique et les devises globales. Au sein du chaos qui se prépare, les pièces qui se détachent incluent des unités de gouvernance, qui se divisent en des entités plus petites… L’Union Européenne se disloquera, mais ce sera également le cas de la matrice d’accords et de protocoles qui font de l’Occident ce qu’il est – depuis le FMI jusqu’au G7 et à la Banque Mondiale. L’un des scénarios potentiels les plus extrêmes avec lequel je ne suis pas entièrement d’accord, et qui a été avancé par le bloggeur Jim Willie très récemment, voudrait que la Russie, la Chine et d’autres nations isolent et neutralisent le rôle du dollar en tant que devise de référence internationale en convertissant systématiquement leurs bons du Trésor en or, diminuant ainsi l’influence du béhémoth Américain. Elles seraient assistées dans leur tâche par les Etats-Unis eux-mêmes et ses efforts incessants de manipuler le prix de l’or et son refus de stipuler officiellement quelles quantités d’or il reste encore dans ses coffres – Fort Knox, West Point, et les labyrinthes qui se trouvent sous la Réserve Fédérale de New York – qui font peser toujours plus de doutes sur les quantités d’or disponibles et donc la valeur de l’or par rapport aux devises. Personne ne semble jamais capable de poser les bonnes questions.
Alors que le New York Times se concentre sur les problèmes liés à la vente de biens immobiliers dans les Hampton, la Russie et la Chine mettent en place des devises soutenues par l’or qui visent à monopoliser le commerce des ressources minérales et énergétiques et qui laisseront les Etats-Unis et l’Europe dans le noir, faisant la queue devant des pompes à essence vides. Pendant un temps, tout cela pourra fonctionner à l’avantage de l’Est – jusqu’à ce qu’il devienne clair que la contraction des industries économiques est le lot de tous et que nous nous tournions vers un monde manuel. Tôt ou tard, la Chine et la Russie feront elles-aussi aussi face à des difficultés. Mais d’ici là, elles auront la capacité de rendre l’Histoire bien plus intéressante qu’elle ne l’est déjà.
Le suspense sera pesant ce weekend de Pâques, alors tous les observateurs attendront de voir à quel point la peur de la confiscation aura pénétré les centres monétaires en périphérie de la zone Euro. La Slovénie, une république de conte de fées située entre l’Autriche et le Duché du Grand Fenwick a été nominée par les observateurs comme étant le pays sur lequel les agents de confiscation Européens auraient le plus de chances de se déchaîner prochainement. La Slovénie doit dix milliards d’euros à l’Union Européenne et a tout juste zéro chance de pouvoir un jour répondre à son obligation. Mais comme à son habitude, le cygne noir pourrait très bien survoler la Slovénie pour aller se poser sur une cheminée là où personne ne l’attend, comme en Lettonie ou en Italie. Dans tous les cas, la monnaie Européenne se consumera, et la fumée qui s’en échappera viendra planer sur les marchés des actions Américaines à la recherche de sécurité. Ce n’est qu’un accident qui attende calmement de pouvoir se produire. La monnaie n’est plus ce qu’elle était, et elle n’est certainement pas ce qu’elle semble être.
Dimanche dernier, tout le monde pensait Chypre sur le point de la jouer à l’Islandaise, ou devrais-je dire présenter son majeur à Bruxelles et répudier sa dette. Cette option semble très certainement plus intéressante à pratiquement tout citoyen du monde fauché, peut-être même aux étudiants Américains endettés jusqu’aux oreilles, grognant sous le poids de leur dette au beau milieu du champ désolé du chômage… Tous ces gens s’imaginent que le nirvana est un endroit froid et sombre sur lequel plane une vague odeur de poisson pourri…
