Alors que GDPNow, l’indicateur de la Fed d’Atlanta qui mesure la
croissance américaine en temps réel, vient de chuter à 0,6 %, Egon von
Greyerz a rappelé durant sa dernière interview sur KWN
qu’en temps de crise, les risques géopolitiques ont plus de chances de
dégénérer :
« Nous avons beaucoup parlé des risques financiers et économiques à
travers le monde. Je pense qu’un désastre économique se manifestera dans les
années à venir ; il s’agira d’une catastrophe qui abaissera le niveau de
vie global pendant de nombreuses années.
Mais malheureusement, nous faisons également face à des risques de
guerres, de guerres civiles et de troubles sociaux. Loin de moi de m’ériger
en expert de la géopolitique, mais identifier et comprendre les risques est
l’une de mes passions.
Chute des empires
À travers l’histoire, tous les empires arrivent à un stade où leurs
dépenses inconsidérées et la mauvaise gestion de leur économie mènent à leur
chute. Les États-Unis ont atteint ce stade. À tous les points de vue, ce pays
est en faillite. Il n’a plus enregistré d’excédent budgétaire réel depuis
1960 ou une balance commerciale positive depuis le début des années 70 alors
que ses dettes augmentent de façon exponentielle.
La dette du gouvernement américain est passée de 8,4 trillions depuis la
crise économique, dont les débuts remontent à 2006, à 19,2 trillions
aujourd’hui. Ce n’est que parce que le dollar est la monnaie de réserve que
le pays peut se permettre de dépenser de façon irresponsable, de s’endetter
et de créer autant d’argent. Mais le dollar mourra bientôt tandis que les
États-Unis tenteront désespérément de se sauver de l’effondrement économique
à venir, ainsi que de la chute du dollar.
Durant les derniers jours d’un empire, une guerre majeure est
habituellement l’écran de fumée utilisé pour occulter l’état catastrophique
de l’économie. Récemment, les États-Unis ont initié des guerres en
Afghanistan, en Irak, en Iran, en Libye en Syrie ainsi que d’autres conflits
mineurs. Mais les risques d’une guerre d’ampleur grandissent. Cela
justifierait des trillions de dollars de dette et de création monétaire afin
de sauver l’économie tout en avançant un prétexte extérieur.
Plusieurs régions pourraient être candidates à une intervention
américaine. Le litige avec la Russie concernant l’Ukraine n’a pas été résolu.
La situation pourrait s’envenimer à nouveau dans cette région avec un risque
d’attaque nucléaire dirigée contre la Russie. Les États-Unis ne sont pas en
mesure de remporter une guerre au sol contre une nation majeure. Ses échecs
dans ses conflits récents en sont la preuve. Donc, l’option nucléaire est
malheureusement la plus plausible.
La Corée du Nord est une autre zone de tension. Leur leader, Kim Jong-un,
fait encore plus de vagues lorsqu’il s’agit de menacer la planète, et en
particulier les États-Unis, de ses missiles nucléaires. Peu de gens estiment
qu’ils disposent des missiles à longue portée nécessaires pour frapper avec
précision les États-Unis, mais le risque de leur développement dans les
années à venir serait suffisant pour pousser les États-Unis à réaliser des
frappes préventives contre la Corée du Nord.
L’expansion de la Chine
si nous continuons un peu vers le sud au-delà de la mer de Chine du Sud,
nous atteignons une zone dans laquelle des pays rivaux se disputent des territoires
depuis des siècles. La tension est montée d’un cran avec la construction
d’îles artificielles par la Chine dans des zones qu’elle revendique. (…)
En ce qui concerne le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, il s’agit
toujours d’une bombe à retardement en raison des conflits potentiels qui
planent en Syrie, en Iran, en Irak, en Turquie, en Arabie Saoudite, en
Israël, en Libye, en Égypte et dans bien d’autres pays, sans parler de la
présence de groupes comme l’État islamique, Al Qaïda, etc. Rien qu’en Syrie,
de nombreux pays sont impliqués, de la région mais aussi d’Occident sans
parler de la Russie. (…)
Voici quelques endroits de la planète où une guerre majeure pourrait
éclater. Mais le risque de guerre civile et de troubles sociaux est aussi
élevé dans de nombreux pays. Les troubles sociaux sont souvent la résultante
de difficultés économiques et de ventres vides. Dans une nation à la
population homogène, le risque de conflit interne est moindre vu
l’absence de bouc émissaire. Or, les États-Unis et les pays européens
ont connu durant ces dernières années une immigration massive. L’immigration
aux États-Unis a plusieurs origines, dont le Mexique.
Dans l’Union européenne, des afflux massifs de migrants en provenance
d’Afghanistan, d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient ont lieu. Plus les
allocations sociales sont élevées, plus les migrants affluent. C’est pourquoi
l’Allemagne et la Suède ont connu tant d’arrivées. Récemment, j’étais en
Pologne et je leur ai demandé s’ils avaient beaucoup de migrants. Ils m’ont
dit qu’ils ne connaissent pas ce problème car ils ne payent pas d’allocations
sociales. Donc, lorsque les États-Unis et l’Europe connaîtront un revers
économique alors que leur situation est fragile, le risque de conflits
intérieurs sera grand. (…)
L’argent est une excellente opportunité
Loin de moi d’être belliciste, j’espère vraiment que tout ceci n’aura pas
lieu. (…) Mais tous ces risques existent bel et bien, et dans un tel
environnement assurer ses arrières est critique. Dans toutes les crises de l’histoire,
qu’elles soient politiques ou économiques, l’or physique ainsi que
l’argent dans une autre mesure ont sauvé beaucoup de gens de la misère. À mon
avis, l’or est le meilleur véhicule de préservation de la richesse, mais je
pense qu’actuellement l’argent représente également une excellente
opportunité. Il est sous-évalué par rapport à l’or. Les stocks d’argent ont
baissé de plus d’un milliard once récemment pour être quasi non-existants
aujourd’hui. »