Il est dit que si la Fed
pouvait simplement relancer « l’effet de richesse » aux Etats-Unis,
l’économie du pays pourrait se remettre complètement de la récession. Mais
cet « effet de richesse » est un fantôme, une idée fausse
économique que seul un Keynésien pourrait inventer. Ceux qui soutiennent
cette fiction pensent que la performance d’un marché des actions est liée à
un afflux net de fonds qui à son tour est généré par la croissance économique.
Les Keynésiens vont encore plus loin en stipulant que la croissance est générée
par l’investissement, l’innovation et la productivité, qui influencent les
profits des corporations, qui à leur tour influencent les prix des actions.
Naturellement, lorsque ces facteurs sont positifs, le PIB gonfle.
Voilà qui s’inscrit dans
le raisonnement selon lequel la hausse des prix des actions dans un tel
environnement est le signe d’une économie en expansion. Cette logique a été
utilisée pour décrire l’état des économies américaine et australienne tout au
long des années 1990 et jusqu’à aujourd’hui. Elle veut également que la
baisse du taux de chômage entraîne une hausse des revenus des ménages, dont
une partie se retrouve investie sur des actions. Tout ceci entraîne une
réaction en chaîne, comme suit :
La
demande additionnelle sur le marché des actions en fait gonfler le prix, ce
qui entraîne ensuite une hausse du capital des ménages (plus vous
investissez, plus vous devenez riche). Cette hausse de capital encourage les
ménages à emprunter ce qui alimente la consommation et entraîne le gonflement
des revenus des corporations et la demande en main d’œuvre, ce qui ensuite
entraîne une hausse des revenus, qui sont eux-aussi réinvestis sur les
actions.
Si cela résonne pour
vous comme l’équivalent économique du mouvement perpétuel, vous avez tout à
fait raison. Les logiciens ont un terme pour ce genre de raisonnement. Ils le
surnomment pétition de principe. Mais voyons quelques règles économiques de
base. L’épargne nourrit l’économie alors que l’entreprenariat la porte. Mais
qu’est-ce exactement que l’épargne ? Il s’agit d’un processus au cours
duquel les biens actuels sont convertis en des biens futurs. Ce processus
entraîne une hausse de l’afflux futur de biens à la consommation. Les soldes
en espèce ne sont pas l’épargne, même s’ils sont une consommation différée.
Chaque économie a une
structure de capital qui consiste en des étapes complexes de production. L’effet
de l’accumulation d’épargne est de rallonger cette structure* en y ajoutant
davantage d’étapes complexes. Ces étapes consistent en des biens d’équipement
auxquelles sont appliquées les avancées technologiques. C’est là la vraie
nature de la croissance économique. Il devrait également être clair que la
productivité est le fruit et non la source de la croissance économique.
Au sein d’une économie progressive,
l’ensemble des bénéfices excède l’ensemble des pertes. Nous verrions donc non
seulement se développer une tendance haussière continue sur le marché des
actions, mais leurs rendements excèderaient également ceux des obligations,
la différence étant le profit restant une fois le risque pris en compte. La
productivité de biens physiques et de valeurs d’une entreprise peut continuer
d’augmenter à mesure que la société fait faillite (il n’y a pas de paradoxe
ici, souvenez-vous que ce qui importe est la demande pour le produit).
Les profits sont un
mal-ajustement entre l’offre et la demande, tout comme les pertes. Cela
signifie que si une industrie ou société est profitable, ses facteurs sont
sous-évalués en relation à la valeur de leur produit. Nous pouvons en déduire
qu’une modification importante de la demande puisse causer la banqueroute d’une
société dont la productivité augmente et qui génère des profits.
Bien entendu, si un
entrepreneur dispose d’un système de prévisions suffisamment efficace, il
peut investir de manière à diminuer ses coûts de production, c’est-à-dire
augmenter sa productivité, qui génère ainsi davantage de profits. Mais notez
que la manière d’y parvenir est d’accroître le mal-ajustement entre l’offre et
la demande, ce qui aura l’effet d’attirer davantage de compétition et finira
par réduire les profits de l’entreprise à mesure que sa productivité continuera
d’augmenter. Ce processus se trouve accéléré par la recherche d’une hausse
continuelle de la productivité pour réduire les coûts. L’idée ici est que la
productivité n’est pas la clé du profit – c’est la prévision entrepreneuriale
ou la capacité de prendre des décisions qui en est la clé.
Deux choses émergent de
cette analyse : (a) les ménages qui investissent sur le long terme
finiront certainement par voir le capital s’accroître ; (b) dans cette
situation, il ne peut y avoir de croissance spéculative. La cause de ces
croissances est facilement déterminée, et le coupable en est l’expansion du
crédit. Les banques centrales permettent au crédit de s’étendre, ce qui
génère une hausse des revenus nominaux et de l’investissement**.
Ce crédit finit par
intégrer le marché des actions, et coule les fondations d’une croissance
spéculative. A mesure que les gens se considèrent plus riches, ils ont
tendance à emprunter plus ou à investir (ou devrais-je dire parier) sur le
marché. Des milliers de personnes se lancent dans la pratique risquée des
marges d’emprunt, pensant que la gravité économique pourra toujours être
défiée. Mais d’où provient tout ce crédit ? Du système bancaire.
Oubliez « l’effet
de richesse » et les « emprunts de marge » qui alimentent les
manias spéculatives : ils sont une illusion monétaire, une création de l’expansion
de crédit – rien de plus.
* * *
*Strictement parlant, un
rallongement des périodes d’investissement ne demande pas toujours davantage
d’étapes de production. Dans certains cas, ce rallongement implique le remplacement
d’étapes existantes par d’autres étapes plus avancées mais qui demandent un
temps de développement plus long. J’ai mis l’accent sur la multiplication du
nombre d’étapes pour souligner l’importance de l’analyse des étapes de
production. C’est parce qu’ils n’ont pas pu comprendre son importance et le rôle
vital de la théorie autrichienne du capital que R. G. Hawtrey et Keynes ont
été surpris par l’arrivée de la Grande dépression. Malheureusement, aucun d’entre
eux n’en a jamais appris la leçon.
**Selon Steve
Kates, les économistes classiques pensaient que les cycles de croissance
et de récession étaient des évènements spontanés causés par les erreurs du
capitalisme. Complètement faux. L’école des devises a entraîné le
développement d’une théorie monétaire sur les cycles de commerce, et c’est
cette théorie qui a dominé l’économie jusqu’à la fin des années 1840. Je suis
toujours surpris d’entendre des gens dire le contraire malgré avoir étudié la
période.
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