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Curieusement,
parmi les commentateurs et analystes de la presse mainstream, la crise
financière que nous vivons ne soulève aucune question sur la
viabilité du système monétaire international. Pourtant,
nombre d'économistes, essentiellement des autrichiens, posent
clairement la question de la viabilité du système
monétaire tel qu'issu du jour funeste de 1971 ou l'administration de
Richard Nixon décida de supprimer la convertibilité du dollar
en or. C'est un raccourci, bien sûr. Les défauts de notre
système monétaire étaient antérieurs, mais je ne
prétends pas en refaire l'histoire ici.
En contrepartie,
beaucoup de libertariens voudraient imputer la crise aux seuls défauts
du système bancaire actuel. "The FED did it, period !". J'ai
eu l'occasion de critiquer cette approche bien trop simpliste selon
moi, sans une ancienne note consacrée à la politique monétaire d'Alan Greenspan.
Mais je n'en
concluais pas moins que Greenspan avait accentué la crise. Voyons
maintenant pourquoi une monnaie non planifiée, obéissant
à des mécanismes de marché, aurait empêché
la bulle immobilière de prendre de telles proportions, d'une part, et
pourquoi une monnaie déconnectée de tout actif et
gérée de façon centralisée par des banques
centrales favorise l'apparition de désordres économiques.
Fiat Money
Nous vivons
actuellement sous un système de monnaie dite fiduciaire, "Fiat Money",
c'est à dire basée sur la confiance. Confiance dans le fait que
lorsqu'une certaine quantité d'argent circule, cela suppose
qu'à l'origine de cette circulation, des biens dont la valeur de
marché est à peu près égale à cette quantité
aient été produits. Si la quantité de monnaie en
circulation augmente un peu (ou beaucoup) plus vite que la quantité
d'échanges permise par la production réelle des agents
économique capable de trouver preneur, alors il y a inflation: les
prix de certains articles augmentent du fait du surcroît de monnaie
disponible pour se porter sur l'achat de ces produits. Par des
mécanismes divers, la banque centrale tente de faire en sorte que la
masse monétaire augmente à peu près au même rythme
que la production: la masse monétaire est pilotée de
façon centralisée. Les banques centrales sont censées
être indépendantes des pouvoirs politiques. Elles n'en sont pas
moins des monopoles garantis par l'état. Quiconque oserait
émettre des monnaies concurrentes serait impitoyablement
pourchassé, soit comme contrefacteur, soit comme faux-monnayeur.
Nous avons tous
peu ou prou perdu de vue la façon dont pourrait fonctionner un
marché libre de la monnaie. Attardons nous un peu sur ce
fonctionnement, de façon ultra simplifiée, pour faire court.
Le cycle de la
monnaie et du crédit dans un marché monétaire libre
Mises et Hayek
furent les principaux défenseurs d'une monnaie libre de toute
influence des régulateurs publics. Voici un résumé de
leur modélisation du cycle de la monnaie et du crédit dans un
marché libre, de fait parfois appelé "cycle
autrichien".
Imaginons une
société dans laquelle le stock de monnaie disponible serait
à peu près stable (nous verrons comment ultérieurement).
Dans cette société, les banques n'auraient pas la
possibilité de créer ex-nihilo une monnaie de crédit
pour alimenter le compte d'un individu ou d'une entreprise.
Dans un tel
système, l'existence du crédit est liée à la
propension des agents économiques à vouloir prêter de
l'argent à des tiers. Si les agents économiques veulent
consommer peu, et donc épargner beaucoup, alors beaucoup de monnaie se
présente aux guichets des établissements de crédit. Pour
pouvoir la prêter, les prêteurs, ou plus
généralement les intermédiaires gérant les
opérations de prêt (les "banques"), doivent en baisser
le prix. Les taux d'intérêts tendent à baisser. Des
entreprises sont alors prêtes à investir pour découvrir
les produits nouveaux, ou meilleurs, ou moins chers, qui ramèneront
les consommateurs dans les magasins.
Lorsque ces
produits sortent, la propension à vouloir consommer augmente,
aidée par la baisse des taux d'intérêts qui permet aussi
d'alimenter le crédit à la consommation. De fait,
l'épargne prête à s'investir diminue. Les taux tendent
à augmenter. Les entreprises investissent un peu moins: cela tombe
bien, les clients sont dans une phase où ils sont plutôt
satisfaits du choix qui est le leur.
Puis, sous le
double effet de la satiété et de l'augmentation de la
rémunération de l'épargne, les agents économiques
se remettent à épargner. Et le cycle peut recommencer.
Dans un tel
système, on voit que le cycle du crédit est parfaitement
équilibré: lorsque les individus tendent à
privilégier la consommation, l'incitation à l'investissement
est réduite, et lorsque les individus sont en attente
d'évolution des offres, l'incitation à l'investissement est
augmentée.
Naturellement,
dans le monde réel, le cycle peut connaître des à-coups.
Et la tendance haussière ou baissière des taux n'est pas
uniforme mais est la résultante de micro-tendances propres
à chaque secteur d'activité, à des "trends" de
consommations différents entre bassins d'emploi, styles de vie, etc...
L'envie de consommation de produits électroniques et de voyage peut
être forte alors que l'envie d'automobiles est moins importante, et
vice versa.
Le taux
d'intérêt ainsi déterminé sur un marché
libre est le résultat de millions de décisions individuelles
qui s'inscrivent dans autant de "micro-cycles" qui,
assemblées, créent une tendance générale. Il
permet de donner un signal assez clair aux investisseurs sur
l'opportunité ou non d'investir, mais évidemment, il
n'évite pas l'obligation, pour l'investisseur, d'étudier son
marché pour savoir si le temps est au renouvellement massif du parc
automobile ou au développement de l'immobilier...
Dans ce cycle, la
banque prêteuse n'a qu'une seule ressource, la monnaie
épargnée par ses clients: l'épargne
précède le crédit ! Elle détermine à la
fois le taux de rémunération de l'épargne (à son
passif) et le taux du crédit (à son actif) par la
nécessité à la fois d'attirer des clients
épargnants, ce qui détermine un "cout de sa
ressource", et de trouver des emprunteurs, ce qui détermine un
rendement des emplois. La banque fait ses affaires à la fois en
facturant ses services (mise à disposition d'instrument de paiements)
et en réussissant à payer plus cher qu'elle n'épargne.
Le taux d'intérêt consenti à l'emprunteur comprend donc
les éléments suivants :
- Le
coût de la ressource : rémunération de
l'épargne. C'est évidemment le principal poste de prix de
revient de la banque.
- Le
coût de son intermédiation dans les
opérations de crédit : "marge
d'intermédiation". Elle doit conserver cette marge aussi
faible que possible, concurrence oblige.
- Le
coût d'assurance: si un prêteur ne rembourse
pas sa dette, la banque se retrouve dans une situation difficile. Elle
doit donc d'une part bien sélectionner à qui elle
prête, mais aussi faire payer à tous ses clients
emprunteurs un surcroît de taux destiné à couvrir le
risque de défaillance d'une petite partie d'entre eux. Elle doit
donc rechercher le bon équilibre entre risque pris en prêtant,
et expansion de son volume d'affaires, pour maintenir ce coût
d'assurance à des niveaux acceptables. Ce coût est
généralement fonction des caractéristiques de
l'emprunteur et du prêt.
- Une petite
marge bénéficiaire, parce qu'il faut bien
rémunérer les investisseurs propriétaires de la
banque. Sinon, qui voudrait se lancer dans un business pareil, je vous
le demande ?
L'état,
facteur de désordre
Admettons
maintenant que l'état décide d'adopter un système
centralisé où des banques centrales pilotent elles mêmes
la quantité de crédit octroyés, donc la quantité
de monnaie en circulation. Laissons de côté, pour l'instant, la
lancinante question du "pourquoi".
A certaines
périodes, malgré sa légendaire
"indépendance", la banque centrale, sous la pression
combinée de l'opinion publique, de la presse et des politiques, parce
qu'elle est dirigée par des humains, pas des robots, décide
d'abaisser arbitrairement le coût de la ressource octroyée aux
banques, en amenant au passif de ces dernières de la "monnaie
centrale" à prix cassé, nettement plus faible que le
coût attendu de la rémunération de l'épargne tel
qu'un marché libre l'aurait déterminé.
La banque peut
alors augmenter son volume d'affaires en baissant son taux octroyé au
client final. Elle peut donc émettre plus de crédit qu'elle
n'aurait émis dans un système de monnaie de marché: bon
pour les bénéfices, les bonus du patron, et le moral !
Mais ce faisant,
elle détruit l'harmonie du cycle autrichien de la monnaie. Les
entreprises sont incitées à investir plus qu'ils ne l'auraient
fait si le taux de marché avait prévalu. De même, les
taux bas poussent les ménages à s'endetter pour consommer plus
qu'ils ne l'auraient fait si le taux avait été fixé par
le marché.
Par
conséquent, alors que dans le cycle autrichien, investissement et
consommation obéissent à des cycles antagonistes favorisant un
certain équilibre, l'introduction d'une distorsion à la baisse
du prix de l'argent pousse à la fois l'investissement et la
consommation à la hausse en même temps.
"Et alors, me direz
vous, il n'y a pas de
risque de pénurie de monnaie dans un tel système ! Puisque la
banque centrale peut créer la monnaie ex-nihilo, pourquoi ne pas
baisser le taux d'intérêt auxquels les agents économiques
peuvent emprunter, pour pousser à la fois la consommation et
l'investissement ?"
La monnaie sans
la ressource
Ce raisonnement
à très court terme est celui qui nous est servi par tous les
apôtres des politiques de relance par les taux d'intérêt.
Il n'a qu'un seul très gros inconvénient: s'il est possible de
multiplier la monnaie, il est absolument impossible de multiplier les
ressources que la monnaie permet d'acheter ! En augmentant artificiellement
la quantité de monnaie accessible à la fois au consommateur et
à l'investisseur, la relance par des taux artificiellement bas ne fait
qu'exacerber la compétition pour s'approprier les ressources les plus
courues, et favorise donc l'émergence soit d'une inflation des prix
à la consommation, soit l'apparition de bulles inflationnistes sur
certaines catégories de produits: facteurs de production ou actifs
divers.
L'entrepreneur
qui a cru faire une affaire en empruntant à un taux massacré
s'aperçoit que les ressources nécessaires pour produire les
fruits de son investissement tendent à augmenter, et que des
investissements qu'il croyait rentables sont de fait de mauvais choix.
L'acheteur de maison qui a cru pouvoir s'endetter pour acheter une maison
à un prix en forte hausse se retrouve avec un bien fortement
dévalué. Et ainsi de suite.
Dans ce
système, l'émission de monnaie peut avoir lieu sans que
l'épargne correspondante ait été accumulée, et la
manipulation des taux facilite les mauvaises décisions
d'investissement, ou la consommation de biens produits inefficacement
à des prix trop élevés. Seul problème: dans ce
cas, tôt ou tard, la valeur créée par les entreprises
sera insuffisante pour permettre aux agents économiques de rembourser
à la banque ce qu'ils doivent : ces périodes sont celles de
l'éclatement des bulles, qui peuvent, comme nous le voyons,
déboucher sur des crises graves.
Bref, vous l'avez
compris, le système est fortement propice à la formation de
bulles inflationnistes procurant un sentiment de richesse artificielle,
alternant avec de forts retours de bâton. L'on a cru longtemps pouvoir
avec ce système garantir une inflation stable à +/-2% ad vitam
eternam, avec une croissance moyenne de l'ordre de 2 à 3%. La crise
actuelle montre que cette prétention est totalement illusoire : notre
système financier a amplement démontré sa dangereuse
instabilité.
La crise actuelle
dans un système de monnaie de marché
Comme je l'ai
déjà écrit, dit
et redit,
les mécanismes de marché, si on les avait laissé
s'exprimer, nous auraient protégé de la crise. La monnaie de
marché, et donc le crédit de marché, nous auraient sans
peine permis d'éviter de traverser la crise actuelle. En effet,
plus la demande des ménages pour emprunter des sommes importantes pour
acheter des maisons aurait été forte, et plus les taux
d'intérêts auraient réagi rapidement à la hausse,
alors même qu'Alan Greenspan a attendu 3 ans pour réagir aux
bulles en formation entre 2002 et 2005. Cela aurait fortement
limité la possibilité, pour les banques comme pour les
géants du refinancement Fannie Mae et Freddie Mac, de financer leurs
montages bancaires bancals destinés à faire croire que l'on
pouvait considérer comme parfaitement sûrs des pools de
prêts octroyés à des ménages peu solvables sous la
pression du pouvoir politique !
Bref, une monnaie
de marché nous aurait protégé des dérives du
pouvoir central et des défauts des outils créés par les
banques pour s'accommoder de ces dérives.
Pourquoi les
états aiment les banques centrales et la monnaie fiduciaire ?
Nous comprenons
pourquoi les banques aiment les banques centrales: parce qu'elles leur
permettent d'augmenter artificiellement leur volume d'affaires et leurs
marges, ce qui est bon pour les revenus de leurs cadres dirigeants.
Ajoutons que la
crise actuelle montre combien la FED et la BCE jouent un rôle majeur
dans le sauvetage des mauvaises banques, et donc dans la perpétuation
de l'irresponsabilité de leurs dirigeants, en acceptant de
prêter de l'argent aux banques en échange d'actifs de plus en
plus douteux. Ainsi, les banques centrales sont devenues le pilier majeur de
ce que l'on appelle "l'aléa moral", c'est à dire la
faculté, pour des dirigeants de banques non actionnaires de leurs
établissements, de privilégier des stratégies de gain
à court terme bonnes pour leurs bonus, sans se préoccuper
excessivement des risques que ces attitudes font courir à leurs
actionnaires et à l'économie en général.
Mais pourquoi les
états aiment tant les banques centrales et la monnaie fiduciaire ?
Les
premières banques centrales furent crées de façon
totalement dépendante du pouvoir central, car celui ci peut imprimer
de la monnaie, et les gouvernements y voyaient un moyen commode de financer
ainsi leurs aventures, notamment militaires. Ainsi, par exemple, la banque de
France fut créée par le Consul Bonaparte. Mais évidemment,
un tel manque de sérieux aboutissait immanquablement à ruiner
la monnaie du pays se livrant à de telles pratiques.
Aujourd'hui, la
plupart des banques centrales des pays sérieusement
gérés sont dites "indépendantes", ce qui donne
confiance aux investisseurs dans la solidité de la monnaie. Cela
n'empêche pas les états d'y trouver leur compte. Parce que les
états ont pris la mauvaise habitude de financer leur embonpoint non
par l'impôt, car pratiquer une telle vérité des prix de
l'action publique serait très impopulaire, mais par l'emprunt, elles
chérissent un système où, au nom de la
"croissance", un tiers acteur peut artificiellement baisser le
coût de l'argent, permettant aux états de s'endetter à
meilleur compte que si le taux d'intérêt était
strictement fixé par un marché libre. Si les états
empruntent trop dans un tel marché, ils forcent à la hausse les
taux d'intérêt, et s'obligent bien vite à revenir
à plus de discipline budgétaire... Avec la banque centrale, un
arrangement permettant de continuer sur la voie de l'irresponsabilité
budgétaire est toujours envisageable.
Malheureusement,
cet espoir d'un arrangement avec les banques centrales fournit aux
états un "aléa moral" de premier ordre. Les
états n'hésitent pas à s'endetter à des niveaux
stratosphériques, car ils espèrent que même s'ils
rencontrent des difficultés pour souscrire leurs emprunts -- l'épargnant finit par
être méfiant... --, ils pourront toujours demander
gentiment à la banque centrale de racheter leur dette par
création monétaire, créant une hyperinflation qui
réduira artificiellement la dette des états... et spoliera de
facto tous ceux qui leur ont prêter de l'argent.
Malheureusement,
une inflation renforcée, parce qu'elle est à la fois forte et
imprévisible, rend très difficile l'investissement à
long terme: emprunter à des taux élevés interdit les
emprunts de long terme, et l'incertitude sur la valeur réelle des
gains futurs rend les entrepreneurs frileux. Voilà pourquoi l'on peut
dire que les états financent leur croissance actuel aux dépens
de la prospérité future de leur population.
Une monnaie de
marché: l'étalon or
Nous voyons que
le problème de la monnaie fiduciaire est que ce système n'est
pas "autodiscipliné". Certes, si les banquiers
centraux pouvaient rester à la fois totalement indépendants des
pressions du pouvoir, et identifier toutes les bulles en formation, si leur
détermination à maintenir la valeur de la monnaie qu'ils
gèrent était certaine (après tout, ce n'est pas la
leur), et si les formules magiques leur permettant de calculer "le bon
taux" étaient garanties exactes 100% du temps, l'on pourrait
à la rigueur s'accomoder d'un tel système. Mais vous l'avez
compris: cela fait trop de "si". La discipline de la banque
centrale pour fixer "le bon prix de la monnaie" repose non pas sur
un libre marché des taux d'intérêt, mais sur la science
et la sagesse de gourous dont on ne sait que trop qu'ils sont, hélas,
faillibles pour de multiples raisons. En outre, en période de crise,
la sacro-sainte indépendance de la banque centrale risque
littéralement de voler en éclat (Cf. Cette information,
déjà mentionnée ici il y a peu).
Au contraire, ce
que j'ai jusqu'ici appelé "une monnaie de marché"
semble bien mieux conçue en vue d'accompagner les cycles de
consommation et d'investissement propres à tout système
d'échanges économiques, et pour mettre une barrière
à l'inconséquence budgétaire des états. Comment
une telle monnaie de marché pourrait elle fonctionner ? Inutile
d'aller chercher bien loin: longtemps, l'étalon or a joué ce
rôle de monnaie de marché. Peut être existe-t-il d'autres
dispositifs à inventer qui tiendraient la même fonction, mais
jusqu'ici, seul l'étalon or (et,
d'une façon générale, les étalons-métaux
précieux) a prouvé sa faisabilité.
La monnaie
actuelle est déconnectée de tout actif. Or, jusqu'au
début du XXème siècle, la base de nombreuses monnaies
était l'or. Autrement dit, pour tout billet d'une certaine valeur
faciale, un possesseur de monnaie pouvait se faire remettre une
quantité d'or équivalente. Ce n'est plus le cas
aujourd'hui.
Pour bien
comprendre la monnaie basée sur l'or, il faut la considérer
comme une marchandise parmi d'autres. De même que le pain sert à
nous nourrir et la voiture à nous déplacer, la monnaie est une
marchandise qui a une fonction bien particulière : fluidifier le troc,
qui sans cela serait impraticable à grande échelle.
Il faut noter que
ce n'est pas la seule fonction de l'or: il est utilisé abondamment en
joaillerie depuis la nuit des temps, et plus marginalement dans les
connections électroniques. L'idée d'utiliser l'or comme outil
de fluidification du troc ne serait sans doute jamais venue aux marchands des
temps jadis si l'or n'avait pas déjà été en
circulation pour ses qualités propres.
Le prix de l'or,
exprimé en marchandises, augmente quand la demande relative d'or par
rapport aux autres marchandises diminue (par exemple, lorsque la
quantité d'or circulant sur le marché augmente moins vite que
la quantité des autres marchandises échangeables produites).
Cela veut donc dire que pour une même quantité d'or, vous pouvez
obtenir plus de marchandises: les prix tendent à baisser. Au
contraire, si l'offre d'or augmente plus vite que l'offre des autres marchandises,
le prix de ces dernières monte.
les banques sont
donc limitées, dans leur capacité d'émettre du
crédit, par la quantité d'or disponible sur le marché,
et par la part qu'ils ont en réserve. Cette limitation est
évidemment extrêmement contraignante, et peut aboutir à
ce que les prix de marché des marchandises baisse. Ce n'est d'ailleurs
pas réellement un problème: les prix, aux USA, au XIXème
siècle, ont baissé de 37%. Cela n'a pas
empêché les USA de connaître une croissance
économique tout à fait remarquable à cette époque,
du fait du développement technologique qui a touché le monde
à cette époque: révolution du machinisme,
révolution des transports... Voilà pour ceux qui
prétendent que l'étalon or est inadapté à nos
sociétés de forte croissance !
Lorsque l'on a
compris que l'or n'est qu'un utilitaire d'évaluation de la valeur
relative des autres marchandises les unes par rapport aux autres, alors l'on
comprend que ce n'est pas la quantité d'or qui fait croitre
l'économie, mais au contraire la quantité des autres productions
échangeables rapportée au nombre d'individus profitant des
processus d'échange, autrement dit, le génie et la
productivité humaines.
Pourquoi fut il
abandonné, "officiellement" ?
L'étalon
or n'est pas un système parfait. Tout d'abord, il n'empêche pas
certains entrepreneurs de prendre de mauvaises décisions, et de faire
faillite. Il n'empêche pas qu'une banque puisse faire faillite. Si,
pour quelque raison que ce soit, l'offre d'or, à un instant
donné, croît trop lentement, alors les taux
d'intérêts peuvent augmenter de façon non
coordonnée avec les cycles de l'investissement et de la consommation.
Mais alors le prix de l'or tend à augmenter, ce qui incite les
explorateurs à se montrer plus efficients, et tout rentre dans l'ordre
assez vite.
D'autre part, si
la baisse des prix exprimés en or est plus rapide que les gains de
productivité à une époque donnée, le manque de
flexibilité "à la baisse" des agents
économiques se paie cache en terme de faillites: le XIXème
siècle a lui aussi connu des crises. Mais celles ci ont
été pour la plupart courtes, car les états
étaient alors, en pourcentage des produits intérieurs bruts,
liliputiens, et n'intervenaient guère sur les cycles
économiques... Excepté, pour certains d'entre eux,
déjà, sur les banques.
La raison officielle de l'abandon progressif de l'étalon or, notamment
aux USA, était que l'instauration de banques centrales comme
prêteurs de dernier ressort allaient "stabiliser le système
bancaire et éviter les faillites d'établissements de
dépôt qui ruinent les épargnants". Les travaux de
recherche de chercheurs tels que Randall
Krozner ont montré que l'objectif affiché
n'avait pas été atteint et que les faillites bancaires
s'étaient poursuivi à un rythme plus soutenu après la
création des banques centrales qu'avant.
Mais la
véritable raison de l'abandon progressif des monnaies se rapprochant
de monnaies de marché, comme en Europe, est bien évidemment l'imminence
de conflit de mondiaux dont les états craignaient ne pas pouvoir
assurer le financement s'ils ne pouvaient pas imprimer eux mêmes leurs
billets. Quant aux banques, nous avons vu que nombre d'entre elles ont vu
dans cette création un effet d'aubaine remarquable, au point que
certains auteurs affirment que la loi créant la FED fut en fait
rédigée au cours d'un dîner entre banquiers. J'ignore si
cette affirmation est vraie, mais il est exacte que la FED, institution privée
à statut très particulier, fut une création conjointe de
l'état US et de grands banquiers.
A la fin de la
WWII, il fut décidé que les monnaies flotteraient autour du
dollar, celui ci restant convertible. En 1971, l'état
américain, embourbé dans l'aventure vietnamienne, incapable de faire
face à ses dettes et ses obligations de conversion, décide de
dévaluer sa monnaie en supprimant sa convertibilité en or. Nous
noterons sans surprise que c'est à partir de 1973 que l'état
Français s'est mis à accumuler les déficits abyssaux
presque sans discontinuer.
Aujourd'hui,
point de guerre en prévision, mais les états se sont
habitués à l'indiscipline permise par l'émission
excessive de monnaie fiduciaire, qui permet une combinaison de taux bas et
d'endettement stratosphérique. Au point de menacer la stabilité
du système économique dans son ensemble.
Conclusion
Une monnaie dont
le coût aurait obéi à de stricts principes de
marché nous aurait protégé efficacement des excès
d'intervention du politique dans l'octroi du crédit bancaire, la
gestion du bilan des banques, les politiques de restriction foncières,
et autres facteurs ayant lourdement contribué à former la bulle
de crédit sans création de valeur qui est en train d'exploser.
En outre, avec
une telle monnaie, cela fait longtemps que les états les moins bien
gérés auraient dû rétablir des situations
budgétaires plus saines.
Bref, une monnaie
de marché n'empêcherait pas les agents économiques, au
premier rang desquels l'état, de faire de mauvais choix, mais elle
rendrait plus difficile la continuation de ces mauvais choix sur de longues
périodes, évitant les crises graves.
Il parait donc
urgent que nos élites du G20 et d'ailleurs examinent le retour aussi
rapide que possible à un système monétaire mondial
fondé sur des monnaies de marché, et donc sans doute sur
l'étalon or, plutôt que d'envisager une
"super-supervision" du système financier mondial qui ne fera
qu'augmenter l'incapacité des régulateurs à prendre en
compte les bons paramètres issus de milliards de décisions
individuelles pour prendre les bonnes décisions au bon moment.
Vincent
Bénard
Objectif Liberte.fr
Egalement par Vincent Bénard
Vincent Bénard, ingénieur
et auteur, est Président de l’institut Hayek (Bruxelles, www.fahayek.org) et Senior Fellow de Turgot (Paris, www.turgot.org), deux thinks tanks francophones
dédiés à la diffusion de la pensée
libérale. Spécialiste d'aménagement du territoire, Il
est l'auteur d'une analyse iconoclaste des politiques du logement en France, "Logement,
crise publique, remèdes privés", ouvrage publié
fin 2007 et qui conserve toute son acuité (amazon), où il
montre que non seulement l'état déverse des milliards sur le
logement en pure perte, mais que de mauvais choix publics sont directement
à l'origine de la crise. Au pays de l'état tout puissant, il
ose proposer des remèdes fondés sur les mécanismes de
marché pour y remédier.
Il est l'auteur du blog "Objectif
Liberté" www.objectifliberte.fr
Publications :
"Logement: crise publique,
remèdes privés", dec 2007, Editions Romillat
Avec Pierre de la Coste : "Hyper-république,
bâtir l'administration en réseau autour du citoyen", 2003, La
doc française, avec Pierre de la Coste
Publié avec
l’aimable autorisation de Vincent Bénard – Tous droits
réservés par Vincent Bénard.
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