Les banques centrales du Japon
et des Etats-Unis étouffent le marché privé de la dette gouvernementale. Les
programmes d’achat d’obligations sans précédent mis en place pour les titres du
gouvernement Japonais et les bons du Trésor Américain ont porté les
rendements si bas que les investisseurs font désormais tout pour ne plus être
impliqués sur ce marché.
Le volume mensuel du marché
des obligations Japonaises a chuté pour atteindre seulement 385 milliards de
dollars, niveau le plus bas jamais enregistré, ce qui illustre clairement que
les institutions privées ne veulent plus de la dette Japonaise. Peut-être
est-ce parce que les rendements sur 10 ans ont perdu 55% en trois ans pour
atteindre 0,6% aujourd’hui. Ce taux dérisoire n’existe que grâce à la
monétisation de dette de 7 trillions de yens par mois. Si le marché libre
dictait les rendements des obligations, l’objectif d’inflation Japonais de 2%
et sa dette de plus d’un quadrillion de yens (244% du PIB), ils auraient
flambé depuis longtemps.
De la même manière, la Réserve
Fédérale des Etats-Unis achète 80% du déficit annuel du pays. La banque
centrale a fait fuir les investisseurs privés avec sa dette de 17,15
trillions de dollars et sa politique de taux d’intérêt à zéro pourcent – qui
devrait rester effective pendant au moins huit ans. Les investisseurs savent
très bien que cette dette, couplée à des bilans de la Fed de 4 trillions de
dollars, impliquent des risques de crédit et d’inflation qui ne sont pas
reflétés par des rendements de moins de 3% sur dix ans.
Mais les bases fondamentales
du marché n’ont aucune importance sur le court terme si les banques centrales
écrasent le secteur privé. De jour en jour, ces marchés des obligations – et
les économies toutes entières – sont de plus en plus attachées à ces taux
artificiels. A mesure que l’impression monétaire parvient à faire grimper
l’inflation, les taux d’intérêts deviennent négatifs. Des taux d’intérêts
réels négatifs qui diminuent au fil du temps sont la raison pour laquelle les
investisseurs se débarrassent de leur dette souveraine en grand nombre.
La hausse du taux d’inflation,
la dette gouvernementale et les taux d’intérêts à zéro pourcent vont contre
la nature du marché libre. Ainsi, ce que la Fed et la banque centrale du
Japon ont créé est un aspirateur de taux d’intérêts. Elles pourront
éventuellement mettre fin à leurs programmes de monétisation de la dette une
fois que leurs objectifs d’inflation seront atteints. Mais cela entraînera
une forte augmentation des rendements à mesure que les prix des obligations
chuteront jusqu’à attirer à nouveau les investisseurs.
On peut déjà prévoir l'effondrement
à venir du marché des obligations. Les banques centrales devront soit rester
indéfiniment les acheteurs majeurs de dette gouvernementale, ce qui conduira
à l’hyperinflation, ou s’éloigner de la monétisation et laisser les taux
d’intérêt grimper, ce qui entraînera une dépression déflationniste. Chacune
de ces décisions aura de graves conséquences pour les investisseurs.
Ce que la Fed et les marchés
manquent de percevoir est que si la Fed, la banque centrale Japonaise ou la
BCE décide de mettre fin à son programme de quantitative easing,
le resserrement induit devra être distribué au travers des trois banques. Si
l’une de ces banques centrales prenait une décision unilatérale, les devises
fluctueraient indépendamment des unes des autres. Par exemple, si Janet Yellen commençait à réduire le programme de QE de la Fed
et que la BCE et la banque du Japon maintenaient leurs politiques monétaires
intactes, le dollar grimperait. La nouvelle directrice de la Fed craindrait
la déflation (l’ennemi public numéro un selon nos banquiers centraux
Keynésiens), et le marché des actions s’effondrerait en raison d’une pression
sur les revenus des multinationales basées aux Etats-Unis. Et les chances de
voir la Fed, la BCE et la banque Japonaise s’accorder sur une réduction de
leur QE dans un avenir proche sont identiques à leurs objectifs de taux
d’intérêts – zéro.
Attendez-vous donc à ce que
les manipulations des taux d’intérêts par les banques centrales durent plus
longtemps que le prévoit Wall Street. L’inflation est désormais la menace
première pour les portefeuilles des investisseurs. Le besoin d’investir sur
des actifs physiques devrait être encore plus prononcé l’année prochaine, à
mesure que les marchés réaliseront que les banques centrales ont complètement
étouffé le marché privé pour la dette souveraine. Et la ressuscitation des
obligations gouvernementales demandera une hausse des taux d’intérêts qui
s’avèrera bien entendu catastrophique.